Le mariage précoce : une grave entrave à l’épanouissement de l’enfant

L’article 1^er de la Convention Relative aux Droits des Enfants (CDE) définit l’enfant comme tout être humain âgé de moins de 18 ans, sauf si la majorité est atteinte plutôt en vertu de la législation qui lui est applicable.                                                                                                                                                                  Le mariage précoce, au terme de cette même convention, se définit comme un mariage dans lequel l’un des conjoints (le plus souvent la fille) a moins de 18 ans. La coutume de marier les filles est très répandue en Afrique Subsaharienne, particulièrement au Mali. Le mariage après l’âge de la puberté est fréquent au Mali chez les ethnies au style de vie traditionnelle comme les Peulhs, Soninkés, Sonrhaï, Dogons, Malinkés. Etc. Il est d’une pratique néfaste qui tire ses justifications dans des arguments non fondés parmi lesquels il faut citer : la perpétuation des relations interfamiliales, la sauvegarde de l’honneur de la famille, la préservation de la virginité avant le mariage, la suite dite logique du processus d’évolution traditionnelle des filles. La crainte des grossesses extraconjugales ainsi que la pauvreté sont aussi très souvent à la base du mariage précoce ou forcé. Etant entendu que dans plusieurs communautés, le mariage se forge sur la base d’une dote substantielle. Il est évident que toutes ces explications sont inconstantes et ne résolvent aucunement la violation flagrante des droits des filles victimes de mariage précoce.

La convention relative aux droits des enfants, dans ses articles 3 et 34, dénote que toutes les décisions qui concernent l’intérêt supérieur de l’enfant doivent se fonder sur une considération primordiale et en conformité du droit de protection dont il dispose contre toutes formes d’exploitation et de violence sexuelles. Il est difficile de déterminer le taux de prévalence du mariage précoce, au regard des conditions informelles dans lesquelles il se tient. En Afrique subsaharienne néanmoins, il ressort que le Mali est classé parmi les pays qui arrivent en tête de peloton en la matière. Au Mali, 40% des jeunes femmes ont connu le mariage ou une union quasi mariale avant d’avoir atteint 18 ans. Un mariage forcé dont les conséquences détruisent la vie des jeunes filles qui en sont victimes. Elles sont détruites par le fait d’une scolarisation inadéquate ; d’une éducation intermittente ; et de graves atteintes physiologique et émotionnel dues à des grossesses répétées. Car si le mari meurt avant que le mariage ait été consommé, la fille est traitée comme une veuve. En témoigne le cas de cette jeune fille, O.M, âgée de 16 ans, résident en commune VI : «quand on m’a dit que j’allais me marier, je n’étais pas heureuse car je savais que ce n’était pas une bonne chose. J’aurais été ravie d’aller à l’école. Ce que je voulais faire, c’était d’apprendre à lire ». Elle s’est mariée l’année passée. Elle tente maintenant de se remettre de graves blessures liées à son accouchement. Elle a également des problèmes d’incontinence et une fistule. De tels effets sur la santé sont courants chez les jeunes filles mariées qui ne sont pas prêtes physiquement à avoir des relations sexuelles ou à avoir un enfant.

K.D, âgée 13 ans, estime avoir connu pire. Elle apprît un beau matin qu’elle allait se marier. Elle était une adolescente normale et qui aimait beaucoup l’école. La nouvelle de son futur mariage l’a fait fondre en larmes. Plus tard dans la semaine, on lui présentera son nouveau mari. « Mes parents ne me l’ont même pas annoncé », dit l’adolescente perplexe. « Je suis juste allée chercher quelques manuels chez une de mes amies. Sur le chemin du retour, j’ai rencontré des filles qui m’ont dit qu’elles avaient vu des personnes chez moi et qui avaient indiqué qu’elles reviendraient pour me demander en mariage ! J’étais triste depuis le premier jour où l’on m’a dit que je n’irais plus à l’école et que j’allais me marier. Je ne mangeais plus comme avant. Je dormais mal car je n’arrêtais pas de penser à ma nouvelle situation.

Je ne sortais même plus. Tout cela a été vain. J’ai été mariée contre mon gré. Quelques mois après, mon mari est décédé. J’ai été donnée de force à son frère cadet qui aimait une autre et qui m’a fait vivre tout l’enfer du monde. A chaque que l’idée de m’enfuir me parvenait, ma mère m’en dissuadait car elle-même menacée de répudiation par mon père au cas où je déshonorerais la famille ».

Les mesures politiques et institutionnelles en vue de lutter contre le mariage précoce et ses conséquences n’ont jamais fait défaut. Elles se sont toujours butées à des barrières et réalités sociales encore réfractaires à toute modernité. Posant ainsi la nécessité de recourir à des mesures préventives visant plus généralement la société.

Abdoul Karim SANGARE. Stagiaire

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