L’attaque de la résidence officielle d’Alpha Oumar Konaré a fait un mort : Qui étaient les assaillants et que voulaient-ils ?

Le samedi 5 avril dernier, aux environs de 4h00 du matin, des hommes armés ont attaqué la résidence (mise à sa disposition par l’Etat) de l’ancien président de la République Alpha Oumar Konaré, sise à Titibougou, sur la route de Koulikoro. Au nombre d’une dizaine, les assaillants, après avoir coupé les fils électriques conduisant dans cette demeure ultrasécurisée et l’avoir plongée dans le noir, ont attaqué sur deux fronts : côté fleuve où ils ont pu escalader le mur et côté route de Koulikoro où ils ont essuyé la réaction rapide et vigoureuse des militaires chargés de la sécurité de l’ancien président de la République et de sa famille. Un assaillant a été tué et les autres ont pu s’enfuir à la faveur de l’obscurité.

Au cours de l’attaque qui a duré une heure d’horloge, un assaillant, celui-là qui était parvenu à escalader le mur, a été abattu par la sécurité et son corps est tombé comme un fruit mur dans la cour de cette résidence dont seuls les oiseaux  perturbaient le calme. Quant aux autres assaillants, ils sont  parvenus à prendre la tangeante au moment où la garde cherchait à réorganiser la sécurité autour de la famille de l’ancien président de la République.

Durant l’attaque, une partie de la famille de l’ancien président se trouvait sur place, dont l’ex-première dame Adam Ba Konaré. Quant à Alpha Oumar Konaré lui-même, il était en déplacement au Caire où il est, depuis plusieurs mois déjà, médiateur de l’Union Africaine dans la crise égyptienne.

Depuis que l’ancien président Alpha Oumar Konaré a quitté le pouvoir en 2002, personne n’a pu le faire parler. On le disait même à la retraite politique, lui qui aimait à dire, s’agissant de l’ADEMA, le parti qu’il l’a fait accéder au pouvoir en 1992 : “Je ne serai jamais un ancien militant “. Pourtant tout son comportement, après son départ du pouvoir, contredit cette prédiction. Après avoir passé le témoin à ATT, un 8 juin 2002, il s’est confiné dans un épais mutisme que même l’arrestation de son fils, le commandant d’alors Mamadou Lamine Konaré dit Mala, par l’ex-junte putschiste lors des affrontements meurtriers de la nuit du 30 avril au 1er mai 2013, ne parviendra à briser. C’est dire combien Alpha Oumar Konaré sait encaisser les coups, subir des coups …sans les rendre. S’agissant même du coup d’Etat contre son prédécesseur Amadou Toumani Touré, un 22 mars 2012 de triste mémoire, il n’en fera aucun commentaire. Ni approbation ni condamnation. L’opinion a attendu qu’il lâche une phrase, une seule sur l’événement. En vain.  Il fera comme si rien ne s’était passé. Une attitude qui n’a pas plu à l’ex-junte et qui décidera, dans un premier temps,  d’aller saccager sa résidence – la même qui vient d’être attaquée – avant de se raviser à la suite d’un débat interne qui a exclu cette éventualité. C’est après que son fils, devenu colonel Mala, passera sept longs mois dans les geôles du capitaine-général Amadou Haya Sanogo, à Kati, puis au camp I de la gendarmerie avant que lui et certains de ses camarades d’infortune ne soient libérés. 21 bérets rouges, arrêtés en même temps qu’eux avaient été moins chanceux.

A en juger par la   détermination des assaillants, il est difficile de croire à un acte de banditisme crapuleux, avec comme but de voler des biens en espèces sonnantes et trébuchantes, voire de l’or que garderait dans des coffres-forts cette famille. En excluant cette hypothèse, il va falloir pister du côté d’un éventuel règlement de compte d’individus qui en voudraient à l’ancien président de la République Alpha Oumar Konaré pour avoir “exfiltré” son fils, le colonel Mala, inculpé dans l’affaire susmentionnée au même titre qu’une cinquantaine d’autres militaires, en le mettant à l’abri à l’extérieur comme conseiller militaire auprès du Bureau de l’Union Africaine au Tchad.

Il n’est donc pas exclu que certains militaires, par jalousie, aient décidé de faire payer à la famille Konaré cette promotion dont a bénéficié l’officier d’aviation. C’est, pour le moment, l’unique piste susceptible de prospérer au moment où les enquêtes viennent tout juste de commencer.

Cette attaque armée du domicile que l’ancien président de la République vient rappeler à quel degré le coup d’Etat du 22 mars 2012 a mis le pays dans une situation d’insécurité totale et de longue durée.

Les services de sécurité et les services judiciaires ont entamé depuis dimanche des investigations en vue d’identifier les membres du commando. Le téléphone portable trouvé sur l’assaillant abattu  permettra certainement de percer des zones d’ombre et de conduire les enquêteurs vers les auteurs de ce raid barbare et criminel.

Mamadou FOFANA

Commentaires via Facebook :