Les accusations ont fait les gros titres et les choux gras des médias. Et pas que. Mais lorsque la vérité fait surface, peu d’entre eux en parlent ; et ils sont encore plus rares à la mettre à la Une. L’histoire des prétendus liens délictuels entre l’homme d’affaires français, Tomi Michel et le président malien IBK en est un douloureux exemple. Que n’a-t-on pas dit à sa charge ? Corruption, attribution de marchés illégaux au Mali et même au-delà, surfacturation… bref, tous les péchés d’Israël. Après cinq ans d’une enquête minutieuse, la justice française déclare “un non-lieu”.
En fin 2016, IBK fut trainé dans la boue pour la énième fois à la faveur d’une honteuse campagne de dénigrement. Une enquête judiciaire s’ouvrait à Paris, en France, à l’encontre d’un citoyen français, Michel Tomi. L’occasion était bonne pour faire le rapprochement entre l’homme d’affaires corse et le président de la République du Mali. Oui, les deux eurent des contacts dans le passé – IBK ayant vécu 25 ans en France -. Oui, les deux ont gardé de bons rapports se reconnaissant mutuellement valeureux, mais jamais cette relation n’a été guidée par le sens des affaires encore moins fondée sur la corruption.
Pour rappel, l’enquête sur Michel Tomi a commencé en juin 2014 avant d’être validée en décembre 2016 par la Cour d’appel de Paris. Cela, malgré les recours de la défense qui ont tous été rejetés. Selon certains médias, portés sur le sensationnel, l’enquête s’est intéressée à plusieurs dirigeants africains, dont le président malien Ibrahim Boubacar Kéita. Une partie de la presse malienne a pris le relais et a fait de cette affaire ses choux gras.
Pour faire court, l’homme d’affaire était soupçonné, entre autres, de “corruption d’agents publics étrangers, faux et usage de faux, abus de confiance, complicité d’obtention indue d’un document administratif et de travail dissimulé”. Ceux-ci concerneraient ses activités en Afrique, notamment, au profit du président malien, Ibrahim Boubacar Kéita, qui figurerait parmi ses collaborateurs et, selon les enquêteurs, qui aurait même reçu des cadeaux de la part de Michel Tomi.
La fertile imagination des enquêteurs et des fabulistes locaux aidant, IBK est également soupçonné d’avoir joué un rôle prépondérant dans l’acquisition de marchés non seulement au Mali, mais aussi au Cameroun, au Tchad, au Sénégal, au Gabon et en RD Congo.
De grotesques accusations. Coup de théâtre, la justice française, rendant son jugement, blanchit Michel Tomi à travers “un non-lieu”. Et la vérité éclate au grand jour. En conséquence, IBK est définitivement lavé de tout soupçon. Cette décision intervient après des années d’enquêtes et investigations de la police et de la justice françaises qui ont conclu qu’il n’existe pas de charges suffisantes contre Tomi Michel dans le cadre de l’enquête portant sur le blanchissement d’argent et le trafic d’influence exercé auprès des décideurs politiques, agents publics, dans divers pays africains dont le Mali.
Ce n’est pas tout. Il semble être reproché à IBK l’octroi de marchés conclus avec l’Etat malien ou des sociétés maliennes à travers la location et l’achat d’un avion, l’implantation des sociétés chinoises, de concession d’exploitation de mines d’or, achat de matériels et uniformes contractés avec le groupe Marck. Du grotesque !
Un homme d’honneur. La justice française reprochait à Michel Tomi d’être proche d’IBK au point de prendre en charge ses frais médicaux à Marseille, réglé ses factures d’hôtel à Paris et prêté son avion pour la campagne présidentielle de 2013. En mai 2014 déjà, le président Kéita déclarait à Jeune Afrique : “Oui. Je le considère comme un frère. J’ai rencontré Michel Tomi par l’intermédiaire du défunt Omar Bongo Ondimba, dont il était très proche. C’était ici, à Bamako, en 1995. Bongo était venu nous rendre visite et Tomi l’accompagnait. J’étais alors Premier ministre. Depuis lors, Michel Tomi est resté mon ami. Mais jamais, au grand jamais, il n’a été question d’argent entre nous. Je ne suis d’ailleurs dans aucune affaire, avec qui que ce soit. La famille Tomi et la mienne se fréquentent, c’est vrai. Il m’a toujours témoigné amitié et fraternité. Tous les chefs d’Etat qui le connaissent m’en disent du bien, et ses activités dans le domaine des jeux n’ont, que je sache, rien d’illégal. Ce qu’il a pu faire auprès de tel ou tel homme politique en France ne me concerne pas, d’autant qu’il a, je crois, payé pour cela. Rien en tout cas ne justifie que je le renie. Je suis un homme d’honneur”.
A la question de savoir si Michel Tomi a réglé la note de ses séjours à Paris avant et après l’élection, IBK a été catégorique. “Faux. Je détiens les factures qui le prouvent”. Pour les soins médicaux à Marseille, il répond d’un coup sec : “faux”. Et explique : “Je suis allé à Marseille à mes frais, en avion privé loué. Puis de l’aéroport directement à l’hôpital Clairval, pour une infiltration. C’est la police française qui est venue m’accueillir au pied de l’avion et qui m’a escorté au retour. A moins d’imaginer que les policiers marseillais et le professeur Ange Vincentelli, qui m’a soigné, sont des hommes de Tomi, dire que j’ai été ‘pris en main’ par ces derniers est tout simplement grotesque”.
Les charges contre l’homme d’affaires français tombant, l’honneur du président Kéita est lavé. Si au début de son premier quinquennat, cette affaire a durement entaché son image, aujourd’hui, IBK vient d’être blanchi par la justice française. Selon plusieurs observateurs de la scène politique internationale, ce “non-lieu” prononcé en faveur de Michel Tomi qui a eu maille à partir avec la justice de son pays, doit édifier l’opinion sur les réelles motivations des détracteurs d’un homme d’Etat qui n’a que le seul Mali dans son agenda. Tous savent à présent qu’il fut sur la base de simples suppositions savamment inventées pour casser son élan d’unification du peuple du Mali.
Plus regrettable, cette affaire a tous les attributs d’un règlement de compte entre Michel Tomi et Manuel Valls. “On m’a jeté en pâture ! Je devais gêner quelque part, mais il y a un juste retour des choses. Il y a toujours un bon Dieu(…) Manuel Valls se voyait déjà président de la République et il a pris ombrage de mes liens avec le président du Mali et celui du Gabon”, confiait l’homme d’affaires dont la famille a quitté la France pour Dubaï.
Aly Kéita