Rentrée solennelle du barreau malien : Me Tounkara appelle au respect du serment

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La rentrée solennelle du Barreau a été une occasion pour les avocats de faire une réflexion sur la valeur du serment. ‘’Faut-il trahir son serment ?’’ La réponse à cette question est sans doute affirmative pour Me Cheick Oumar Tounkara, Secrétaire de la conférence du stage 2015.

La grande famille des avocats du Mali s’est réunie, le jeudi 17 mars 2016, dans la salle de presse du Cicb, pour effectuer la rentrée 2016 du Barreau, sous le thème: «les contrats de partenariat public-privé : facteur de développement économique ». La cérémonie, présidée par le chef de l’Etat, Ibrahim Boubacar Keïta, a enregistré la présence des présidents des institutions de la République, des membres du gouvernement, des membres de la famille judiciaire, des représentants des différents barreaux de l’espace Uemoa et de l’Ohada.

Un procès sur la valeur du serment

Du point de vue de Me Cheick Oumar Tounkara, l’argent semble prendre le déçu sur l’éthique et la  déontologie de la profession d’avocat. « Là où on certifie les fraudes, là où la corruption ou l’abus de pouvoir sont synonymes de fierté et de vanité. Là où les dépositaires du monopole de la plaidoirie, dans leurs attributs de défenseurs, ceux-là mêmes qui ont la lourde responsabilité de contribuer à la manifestation d’une justice, trahissent leurs promesses de bonne foi et sincérité, je jure d’entraver les valeurs de mon serment d’avocat», déplore t-il. En outre, Me Tounkara n’est pas passé par quatre chemins pour rappeler les maux qui minent la magistrature et le barreau. «Je compromettrais l’honneur et la dignité de ma profession parce que certains confrères ont érigé la corruption des magistrats en moyen de défense. Chaque fois qu’on aura gagné un procès par la corruption, on aura à affaiblir le droit. Et la victoire qu’on doit avoir est en faite une défaite. Je ne suis pas en combat contre les magistrats ou contre mes confrères avocats, mais quand même !», regrette Cheick Oumar Tounkara. Voilà entre autres raisons pour lesquelles l’avocat a pensé qu’il faut trahir son serment.

Actualité Oblige. Au cours de la rentrée solennelle du Barreau du Mali, les avocats ont montré leur détermination d’accompagner les autorités politiques du Mali pour lutter contre le terrorisme en étant plus que jamais des avocats sans frontière.

A cette rencontre, les débats étaient largement centrés sur le terrorisme. Après Paris, Bamako, Ouagadougou et Grand Bassam, la rentrée solennelle du Barreau du Mali a été l’occasion pour les avocats de montrer leur inquiétude face à la montée en puissance du terrorisme. Pour le Bâtonnier du Niger, Me Daouda Samna, aussi Président de la conférence des barreaux de l’espace Ohada, il est temps pour les avocats de relever ce défi sans délimitation de frontière. «Le grand mal nous a frappés, nous atteignant tous dans nos chers. Cet argument terroriste et sanglant  a un visage planétaire et il se moque des frontières, des cultures, de la race et même de la religion. C’est donc là les vrais défis qui nous interpellent, avocats de tous ordres, face au terrorisme et trafic de drogue, d’armes et d’êtres humains, vous être volontaires et historiquement condamnés à être plus que jamais des avocats sans frontières», exhorte M. Samna.

En plus du terrorisme, le thème de la rencontre a été développé par Me Hugues de la Forge du barreau de Paris. A l’en croire, le partenariat public-privé (PPP), en plus d’être une collaboration juridique, est aussi une coopération économique dans laquelle le mot partenariat s’applique réellement. Ainsi, Me Hugues de la Forge estime que le PPP a souvent fait l’objet de critiques en Afrique, notamment dans le domaine de l’électricité où il donnerait lieu, aux yeux de certains,      à des arrangements opaques, favorables aux seuls intérêts privés. Pour d’autres, ajoute-t-il, le PPP est source de corruption. «Ces critiques ne doivent pas faire oublier les nombreux avantages qui ressortent de ces projets basés sur le PPP. Au Mali, je pense au projet sucrier de Markala, à la Centrale thermique de Sirakoro», a-t-il affirmé.

Dans son discours, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Mali, Me Seydou Coulibaly, a d’abord levé le voile sur le parcours de l’association qui, rappelle-t-il, existe depuis 1971. « Le métier d’avocat est arrivé chez nous par le biais de la colonisation à partir du 19è siècle. A l’époque, des intellectuels du Soudan français (actuel Mali), n’ayant aucune culture juridique, se sont improvisés avocats pour défendre les droits des indigènes et des pauvres. Et les affaires étaient jugées par la Cour d’appel de Dakar, capitale de l’Afrique occidentale française. Sous la 2è République, une vague de jeunes, avocats sortis des facultés de droit, débarqua au pays dans les années 80 pour servir la justice. Ce sont eux qui ont mis sur les fonts baptismaux la première association des avocats du Mali», se réjouit Me Coulibaly. S’adressant aux siens, il dira que le message des avocats se doit désormais d’être davantage audible et intelligible. « Notre message ne doit être ni effleurissant, même quand tout va bien, ni désespérant même quand tout va mal. Il fut un temps où ce message qui est le notre était craint, mais souhaité, parce qu’il était juste et équidistant. Faisons en sorte que la profession d’avocat soit toujours une profession respectée et indépendante», exhorte le bâtonnier Coulibaly.

Après avoir souligné la pertinence du thème, le président de la République Ibrahim Boubacar Keïta dira que notre pays, qui vient de sortir d’une longue crise, a besoin du partenariat public-privé pour relever le défi du développement économique. Outre les messages de soutien et d’encouragement, le chef de l’Etat n’a pas caché son admiration pour les avocats. Raison pour laquelle il s’est réjoui de leur compagnie et dira que c’est un moment pour apprendre.

Ibrahim M.GUEYE

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