La salle de 1000 places de la Cour suprême a servi de cadre à l’audience solennelle de la rentrée des cours et tribunaux 2019-2020 ce lundi 18 novembre sous le thème “le rôle de la Cour suprême en matière de lutte contre les infractions financières et budgétaires´´. L´évènement était placé sous la présidence du président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, président du Conseil supérieur de la magistrature, en présence des membres du gouvernement, des chefs d´institutions et beaucoup d’autres représentations nationales et internationales. Cette rentrée judiciaire a aussi été marquée par la prestation de serment des nouveaux membres de la Cour suprême. Cette rentrée est faite sans la présence des deux plus grands syndicats de la magistrature, en l´occurrence le Syndicat libre de la magistrature (Sylima) et le Syndicat autonome de la magistrature (SAM).
Selon le Bâtonnier, Me Alassane Sangaré, le thème de cette année est sans doute aussi intéressant et même contextuellement très important. Ce choix, à son avis, répond essentiellement au souci de permettre à l´appareil judiciaire d´apporter sa contribution à l´édification d´une nation apaisée et prospère, inspirant la confiance du peuple et des investisseurs nationaux et internationaux dont le financement contribue beaucoup au développement économique. Le Bâtonnier estime que la vraie lutte contre les infractions financières et budgétaires relève plus des juridictions inférieures que de la Cour suprême. Ce qui s´explique par la création des pôles judiciaires spécialisés à cet effet. Il a par ailleurs dénoncé la prolifération des structures de contrôle financier dont les missions sont mal définies. Toute chose qui, de son avis, serait à la base même des infractions financières et budgétaires. Ces structures sont entre autres le Bureau du vérificateur général ; le Contrôle des services publics ; l´Inspection des finances ; la Cellule d´appui aux structures de contrôle de l´administration et l´Office national de lutte contre l´enrichissement illicite.
Me Sangaré estime que la majorité de ses concitoyens n´ont pas confiance en leur justice et même avec désappointement très souvent, des magistrats chargés de rendre la justice n´ont eux-mêmes pas confiance en la justice. Selon lui, l´une des raisons du caractère violent des revendications de toute sorte réside dans l´incapacité du système judiciaire à donner de bonnes solutions aux problèmes posés. Il estime que l´accès à la justice au Mali est très difficile pour le citoyen malien, les raisons qui caractérisent cette problématique sont d´ordre géographique, économique, social et culturel. Selon lui, l´appareil judiciaire malien compte moins de 600 magistrats ; moins de 500 avocats ; moins de 60 juridictions répartis entre environ 18 millions d´habitants sur plus de 1 million de kilomètres carrés de superficie.
<<Si la justice s´enrhume, c’est tout le corps social qui tousse>>, a indiqué le président de la Cour suprême, Nouhoum Tapily, au début de son intervention. Selon lui, l´année judiciaire qui s´achève a été marquée par d´importants mouvements de nomination et d´affectation de personnel magistrat. Ces mesures participent de la vitalité de notre justice, dans l´exaltante œuvre de construction nationale. Selon le président de la Cour suprême, le choix du thème de cette année judiciaire n´est pas fortuit ; il s´inscrit en droite ligne des sujets reflétant les préoccupations des populations. La Cour suprême joue un rôle clé dans la lutte contre la mauvaise gestion des ressources publiques à travers notamment la section des comptes, dans une matière appelée, la discipline financière et budgétaire.
- Tapily estime que, pour relever les défis, deux séries de mesures sont nécessaires. La première a trait à la section des comptes, juridictions financières chargées d´instruire et de juger les infractions financières et budgétaires. En attentant son érection en cour des comptes, il convient de renforcer ses moyens humains, matériels et financiers.
En effet, en plus de son rôle de jugement des comptes des comptables publics de deniers et de matière et de son rôle non juridictionnel de contrôle et de vérification. Elle doit désormais faire face aux saisines en matière d´infractions financières et budgétaires.
Le président de la République Ibrahim Boubacar Keïta, président du Conseil supérieur de la magistrature, a indiqué que le thème de la rentrée judiciaire 2109-2020, à l´instar des thèmes des précédentes rentrées judiciaires, reflète l´une des préoccupations majeures de nos populations et des pouvoirs publics. Il estime que la lutte contre la corruption qu’il a instruite depuis plusieurs années n´est ni un vain mot ni un slogan de campagne. Elle demeure toujours d´actualité. Il s´agit d´une lutte permanente qui revêt diverses formes et concerne plusieurs acteurs. Selon le président IBK, la lutte contre les infractions financières et budgétaires est une fonction juridictionnelle de la cour suprême à travers la section des comptes ou plus exactement sa Chambre de discipline financière et budgétaire. L´ensemble des efforts de l´Etat reposent sur nos finances publiques, sans lesquelles aucun développement n´est possible. Les structures de contrôle, de vérification, de jugement doivent donc jouer leur partition dans la lutte contre les infractions financières et budgétaires. Le président de la République réaffirme son soutien à la justice malienne pour cette cause. « Il ne s´agit nullement d´une lutte dirigée contre une catégorie de personnes, mais d´agents dont les responsabilités pour fautes de gestion seront établies », a-t-il indiqué.
Adama TRAORE