Procès Karim Keïta contre Adama Dramé */ Le juge pressé de débattre le fond, les avocats de la défense boycottent l’audience */ Le délibéré prévu pour le 20 juin prochain

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Après l’audience de consignation tenue le 30 mai dernier, la deuxième journée dans l’affaire opposant l’honorable Karim Keïta au journaliste Adama Dramé, poursuivi pour « diffamation » a eu lieu hier mercredi 14 juin 2017 au tribunal de grande instance de la commune III du district de Bamako. L’audience d’hier a débuté à 9h 10 minutes en présence des avocats de la défense pour ne prendre fin qu’aux environs de 16heures. Le prévenu Adama Dramé a déploré le fait que la justice n’ouvre pas une information sur les dénonciations faites par les journalistes, sur la menace contre les journalistes et sur la disparition des journalistes. Le délibéré est prévu pour le mardi 20 juin 2017 dans l’enceinte du même tribunal.

Pour la circonstance, plusieurs journalistes et organisation de défense de la presse étaient présents pour soutenir le confrère Adama Dramé, directeur de publication du journal le Sphinx. Parmi eux, on peut citer, Dramane Aliou Koné, Alexy Kalembry de la Maison de la presse, Bassidiki Touré de l’ASSEP (Association des Editeurs de la Presse Ecrite Privée du Mali), Fakara Faïnké de l’UNAJOM (Union nationale des journalistes du Mali), Madou Diarra de Maliweb, le chroniqueur Ras Bath, Cheickna Hamala Sylla du journal l’Aube et bien d’autres. Commencé aux environs de 9 h 10 minutes, une première « empoignade » a eu lieu entre les avocats de la défense et ceux de la partie civile.

Place à la lecture de la citation directe par le président de la cour. Dans les exceptions soulevées par les avocats de la défense, Me Cheick Oumar Konaré a fait savoir qu’il ne peut pas y avoir deux citations dans une seule affaire (une citation avec mention du ministère public et l’autre sans mention). A l’en croire, la citation est nulle au regard de l’article 61 de la loi portant régime de presse et délit de presse au Mali. A cet effet, il a invité le juge à annuler l’ensemble des poursuites initiées contre son client Adama Dramé. Me Abdourhamane Touré abonde également dans le même sens tout en demandant la nullité de la citation. Il a invité le parquet à ouvrir une information car, les personnes et les biens impliqués dans cette affaire sont publics.

Qu’est ce qui fait courir le juge ?

Me Alassane Diop de la défense a souhaité la nullité de la citation pour forclusion du délai franc de 20 jours. Selon lui, son client a été cité le 21 avril pour comparaitre le 30 mai dernier, or, dit-il, il devrait l’être le 12 mai. Aux dires des avocats de la partie civile, ceux de la défense font du dilatoire pour que leur client ne soit pas jugé. Ainsi, la partie civile aussi bien que le parquet ont demandé à la cour de rejeter les exceptions soulevées par la défense qui, selon eux, ne sont pas fondées. Après ce débat, le juge a souhaité joindre les exceptions au fond.

Il n’en fallait pas plus pour provoquer la colère des avocats de la défense qui ont fait savoir au juge que cela nuirait les intérêts de leur client. La défense a d’ailleurs été suivie par le parquet sur ce chapitre qui a demandé au juge de statuer d’abord sur les exceptions avant le fond. Mais le juge a joué le forcing en joignant les exceptions au fond. Face à cet état de fait, les trois avocats de la défense ont boycotté le reste de l’audience tout en quittant le prétoire. Acculé, le juge a été obligé de suspendre pour une heure de temps.

Mais qu’à cela ne tienne, les avocats de la défense ne reviendront pas. Et leur client, le journaliste Adama Dramé refusa de répondre voire même de parler jusqu’aux ultimes secondes de l’audience. Faute d’avoir de répondant et de manque de débat contradictoire, les avocats de la partie civile se sont livrés à des verbiages ; Me Kalifa Yaro s’en est pris à la presse, la traitant de « menteuse et corruptible ».

Selon Me Mamadou Gaoussou Diarra, le journaliste Adama Dramé a affirmé dans sa parution incriminée N°637 du 14 au 20 avril que l’hôtel ‘’Les hirondelles’’ a été acheté par Karim Keïta. Avant de signaler que l’auteur de l’article n’a pas fait de recoupement. Pour lui, Dramé veut amener le citoyen à se révolter contre Karim et contre le régime. A cet effet, il requiert une condamnation à payer un montant raisonnable. Pour Me Boubèye Maïga, Dramé a commis un délit de diffamation.

Le parquet requiert 3 mois d’emprisonnement avec sursis contre Dramé

Dans son réquisitoire, le ministère public a fait savoir que les avocats de la défense donnent l’impression que la loi a été violée or ce n’est pas le cas. Ils ont, dit-il, lâché Dramé parce qu’ils n’avaient pas d’argument. « Monsieur le président, je vous ai demandé de ne pas joindre les exceptions au fond tout simplement pour ne pas offrir le lux à aucune des parties de se débiner », a-t-il dit.

Avant d’ajouter que c’est la partie civile qui doit prouver la véracité des faits et le prévenu a l’obligation de justifier les faits. Il a demandé au juge de protéger la presse qui est au cœur de la démocratie. « Je veux une presse qui annonce et qui dénonce mais pas une presse qui prononce et qui renonce », a déclaré le parquet. En outre, il a demandé au juge de retenir le prévenu Adama Dramé dans les liens de l’accusation de délit de diffamation pour n’avoir pas pu apporter la preuve que Karim Keïta est propriétaire de l’hôtel Hirondelle.

De ce fait, le ministère public a invité le juge à condamner Adama Dramé à une peine de 3 mois d’emprisonnement avec sursis et une amende de 100 000 FCFA. Selon le parquet, les 4 milliards de FCFA prononcés par la partie civile en guise de dédommagement sont trop élevé, à cet effet, il a souhaité à ce que ce montant soit ramené à une juste proportion.

Ainsi, le juge, dans son allocution, a fait savoir que le délibéré est prévu pour le mardi 20 juin 2017 dans l’enceinte du même tribunal. Dans ses derniers mots, le prévenu Adama Dramé a déploré le fait que la justice n’ouvre pas une information sur les dénonciations faites par les journalistes, sur la menace contre les journalistes et sur la disparition des journalistes.

Pour rappel, le directeur de publication du journal le Sphinx, Adama Dramé a publié un article au mois d’avril dernier qui fait état de l’achat des Hirondelles de Bamako par l’honorable Karim Keïta, fils du président IBK, à hauteur de 4 milliards de FCFA. D’après le journal, « les Hirondelles, rebaptisé hôtel Sefeto, vient d’être acheté par le nouveau nabab de Bamako, Karim Keita, à 4 milliards de F CFA ! ». Furieux de cet article et se sentant lésé, le fils du président de la République porta plainte contre le propriétaire du journal le Sphinx pour diffamation. Le verdict est donc attendu le 20 juin prochain. Affaire à suivre !

Aguibou Sogodogo

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