Merci et hommages au professeur respectable et respecté Édouard Lambert à qui nous empruntons l’expression «gouvernement des juges», soixante-neuf (69) ans après sa mort. Suite à l’Accord de paix, une révision constitutionnelle s’impose ipso facto. Des pans entiers de notre Constitution seront retouchés. Nos sages, puisqu’ils sont désignés ainsi, de la Cour constitutionnelle, veulent s’engouffrer dans la brèche pour conquérir des parcelles de pouvoir. Des serviteurs dignes de l’État ne cherchent jamais à tirer la couverture à eux. C’est la couverture qui va à eux. Normalement. Mais au Mali, où se situe la norme ?
Des pseudos spécialistes de droit sont invités au banquet, instrumentalisés, pour les besoins de la cause. Le caniveau est tout trouvé : colloque international. Puisqu’ils (nos spécialistes) ont la science infuse et diffuse, l’inconséquence justifiera l’absurdité. L’essentiel est ignoré disons occulté. On prend l’exemple sur la sous-région tout en lorgnant le pays de l’oncle Sam, si ce n’est la France de René Capitant.
La nécessité d’avoir une culture juridique, politique et historique
Mme Manassa Danioko, la présidente de notre haute institution, la Cour constitutionnelle, ignore-t-elle que, quand une juridiction, notamment constitutionnelle, veut accroître ses pouvoirs, elle conquiert au préalable la bataille des opinions par la force de ses décisions et de ses argumentaires juridiques ? C’est vraiment triste pour une Cour constitutionnelle de vouloir profiter des crises du Nord pour ramasser plus de compétences. Mais, que voulez-vous ? C’est cela aussi le Mali.
Mme Manassa doit savoir qu’en France, à partir de 1958, fut créé le Conseil constitutionnel, équivalent de notre Cour constitutionnelle. De 1958 à 1974, seuls les présidents de la République, du Sénat, de l’Assemblée nationale et le Premier ministre pouvaient saisir le Conseil constitutionnel. Pour mémoire, la respectabilité du Conseil constitutionnel en France fut acquise par sa décision de constitutionnalisation de la liberté d’association en 1971 sur saisine du président du Sénat. Par la suite, la saisine du Conseil constitutionnel a été élargie à 60 députés ou à 60 sénateurs sans panachage à partir de 1974.
Aujourd’hui, pour défendre les libertés et droits fondamentaux, la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) a été introduite en droit français. Il s’agit pour un justifiable de contester la constitutionnalité par voie incidente d’une disposition de valeur législative. Le but est de rendre sans objet cette disposition de valeur législative en passant par le filtre du procès et de l’une des hautes juridictions (administrative ou judiciaire) qui peut demander au Conseil constitutionnel une décision de conformité à la Constitution de la norme à valeur législative.
Par exemple, si les juges de la Cour suprême des USA ont tant de pouvoir, ce que primo, ils sont particulièrement bien formés. Nul doute. Secundo, ils sont profondément honnêtes. Tertio, ils sont farouchement patriotes. Certes, ils divergent depuis toujours par leur idéologie, conservatrice ou progressiste. Mais fondamentalement, ils inspirent confiance. La première conquête des juges de la Cour suprême des USA demeure l’affaire Marbury/ Madison. Ça ne s’invente pas. Mais, cela est une autre histoire.
S’attaquer aux vrais problèmes
Mme Manassa Danioko, au lieu de demander plus de pouvoirs pour votre institution, de jouer à ce syndicalisme sans paternité, vous devez vous battre contre des maux qui gangrènent notre justice tant administrative que judiciaire. Vous, l’ancienne magistrate. Il a été dit par une voix plus autorisée et nous le répétons ici que : «La justice malienne est indépendante de tout, sauf de l’argent sale». Qu’avez-vous entrepris contre ce constat ? Surtout que sur les 9 membres de la Cour constitutionnelle, 8 sont ou ont été des magistrats de carrière. C’est incontestable.
Le fait que les citoyens n’aient pas confiance en notre justice explique l’application de l’article 320 du Code de procédure pénale accélérée. C’est-à-dire, le brûlé vif. La justice de la rue. Jadis 300 Fcfa le prix d’un demi-litre d’essence et 20 Fcfa, prix d’une boîte d’allumettes. Qu’avez-vous entrepris pour y remédier, vous Mme Manassa Danioko, et vos 7 autres collègues tous magistrats de carrière? Rien.
Le ministre des Domaines s’est plaint qu’en 4 mois chrono, ses actes administratifs d’annulation de titres fonciers sont traités de la première instance à la Cour suprême. Surtout l’État perd pratiquement tous ses procès. Quand d’autres dossiers sans enjeux financiers traînent depuis une éternité devant les juridictions de premier degré. Qu’avez-vous entrepris contre ? Rien. Un colloque aurait été le minimum.
L’État du Mali est spolié. Qu’avez-vous suggéré ? Rien, absolument rien. Qu’avez-vous entrepris pour ôter nos juges du processus de recrutement des nouveaux juges ? Rien. Résolument rien. Et pourtant, Mme Danioko, vous pouvez aider à la bonne gouvernance. Lutter contre l’impunité et la corruption. Par exemple au lieu de rester oisifs dans vos bureaux, pourquoi ne pas initier une rencontre sur la corruption et l’impunité, tueuses du patriotisme au Mali ?
Garder les pieds sur terre
Le Mali, notre nation, n’a que faire des envolées lyriques d’un professeur de droit. Faisons foi au titre de professeur indépendamment de l’espace. Si cela suffisait, il (notre prof.) aurait pu sortir par la force du droit son Burundi de l’enfer. De grâce. Mme Manassa Danioko, qu’est-ce qui peut garantir demain que l’élargissement de vos pouvoirs sera la panacée alors que vous venez déjà presque tous de l’institution judiciaire ? Puisque les spéculateurs fonciers, tapis à l’Assemblée nationale ou non en tout cas riches, gagnent presque tous leurs procès à la Cour suprême. Demain, ces mêmes spéculateurs fonciers, pour ne citer que ceux-ci, feront annuler toutes les lois qui les déplaisent à la Cour constitutionnelle. On a tout compris.
L’auto-saisine de notre Cour constitutionnelle serait une catastrophe dans le Mali d’aujourd’hui, où des disparitions d’armes de guerre dans les magasins de l’armée se disputent à la vente impunie de la viande d’âne. S’autosaisir nécessite un peu plus de vertus intrinsèques. Hélas par défaut.
Système pourri
Dans un système pourri, de corruption généralisée, d’amour-propre rampant, vouloir donner trop de pouvoir à notre juridiction constitutionnelle, c’est créer les bases d’une rupture brutale de la légalité constitutionnelle. Le chaos devenant l’espoir.
En sciences politiques, l’on apprend aux apprentis étudiants de deuxième année que toute réforme constitutionnelle doit être analysée à l’aune de l’État. Réformer la Constitution n’est pas un jeu d’amour-propre. Le Mali, très honnêtement, est bien à terre avant la génération AEEM. Nous avons cessé de réfléchir et de penser depuis des lustres.
Non Mme Manassa, pour l’avenir de vos petits-enfants et de vos arrières, arrières petits-enfants, il ne vous faut pas plus de pouvoirs. Mais, plus de justice, plus d’équité plus de patriotisme. Mme Manassa, l’avocate générale que vous fûtes lors du procès Crimes de sang de Moussa Traoré, pour l’histoire et pour la postérité, ne pêchez pas en eaux troubles. L’inventaire de l’histoire se fera wallahi (au nom de Dieu) sans états d’âme. Les Djibril Diallo, 25 ans après, ont déjà sorti leur tête de l’eau. Pas leurs rejetons mais eux-mêmes. Mme Danioko, gardez l’essentiel.
IBK, assis au fameux colloque, ignorant ou ne comprenant rien aux enjeux du moment, se vante d’être entouré d’éminents juristes à Koulouba. L’éminence pour IBK, c’est quoi ? Pitié. Ah oui, on peut être président, mais de par sa faiblesse morale faire Pitié. Le Mali est décidément très mal barré. Mettre 14 ans après le bac pour valider un DEA, ça laisse des traces.
Boubacar SOW
boubacarsow@hotmail.fr
( Toute mes excuses c’est la suite de mon commentaire qui se trouve ci-dessous)
Elle a eu deux (2) mandants au Conseil Supérieur de la Magistrature (1979-1988). Membre de la Cour Constitutionnelle (2008-2015) et Président de ladite institution (2015).
M. Sow que voulez-vous apprendre à ce magistrat « sac à dos » sur la justice malienne en particulier et sur les maux qui gangrènent la société en général ? Certainement rien
M. Sow, en réfléchissant comme vous, je dirai que Mme Manassa Danioko ne demande que des attributions légales (auto-saisine, saisine par le citoyen lambda, les moyens matériel et financier) lui permettant de lutter efficacement contre les fléaux que vous venez de dénoncer.
Après, bonne lecture de cette troisième conclusion, Quel choix faites-vous entre donner les moyens à Mme Manassa Danioko pour combattre les maux que nous dénonçons tous et laisser les fléaux nous submergés ? Vous choisirez certainement la première hypothèse.
Pour terminer mon propos, M. Boubacar Sow, je vous conseille de descendre toujours dans l’arène comme tout journaliste digne de ce nom avant de vous mettre à parler de votre sujet. Sinon, vous ne pouvez pas vous empêchez de produire de tel article.
Je profite aussi de l’occasion pour inviter la Justice Malienne, les politiques à prendre dans le code pénal un article qui sanctionnerait lourdement les outrages et violences contre les magistrats dans lesquels se reconnaît volontiers le juge constitutionnel.
M. Sow, je vous ai lu, j’ai essayé de vous comprendre et je suis arrivé à trois (3) conclusions :
La première, j’ai senti que vous n’étiez pas au rendez- vous du savoir. Même si vous y étiez de corps mais pas d’esprit.
Ma raison est toute simple, vous traitez la leçon inaugurale enseignée par M. Gérard Niyungeko d’exposé poétique. Je ne vous condamne pas, l’homme ne peut aller au-delà de sa compréhension.
Par contre, à partir de l’analyse de Niyungeko, ceux qui y étaient de corps et d’esprit, ont d’une part cerné la définition du concept : consolidation de l’Etat de droit. Personnellement, j’ai retenu que pour qu’il ait consolidation de l’Etat de droit, il faut que les dirigeants (gouvernants) se soumettent à l’Autorité de la Loi. Il faut également que le citoyen ait une culture de défendre ses droits.
Et d’autre part, ils ont connu les méandres du statut du juge constitutionnel à savoir :
-Le profil du juge constitutionnel : le juge constitutionnel selon Gérard, se trouve entre science (compétences) et conscience (objectivité) ;
-Les obligations du juge constitutionnel : obligation de réserve, l’indépendance du juge, la neutralité, l’impartialité de l’office des juges ;
-Les droits du juge constitutionnel : avantages matériel et financier : c’est un droit qui met le juge constitutionnel à l’abri des besoins de la vie quotidienne. M. Sow, l’honnêteté du juge Américain dont vous enviez n’est-il pas l’émanation de ce droit ? A ce droit s’ajoute le droit du citoyen, le droit à la protection, etc.) ;
-Les interdictions : les fonctions de juge constitutionnel sont incompatibles avec toute fonction publique, politique, administrative ou toute activité privée ou professionnelle ;
-Etc.
La deuxième, c’est que vous ne semblez pas avoir une connaissance approfondie de votre Cour Constitutionnelle.
Quand, on a une certaine connaissance de la Cour Constitutionnelle, on ne s’en prend pas à Mme Manassa Danioko mais on s’en prend plutôt à l’Institution. Dites-moi pourquoi M. Sow ?
Mme Manassa Danioko est nommée au même titre que les autres conseillers et à partir du même décret pris en Conseil des Ministres. C’est à la suite d’un vote en interne entre les conseillers qu’elle a été nommée Président de l’institution. Toutes les activités menées et tous les actes posés sont partagés par l’ensemble des neuf (9) conseillers de la Cour.
La dernière, vous semblez ignorer le chemin qui mène à la satisfaction des aspirations et des exigences communes à nous tous.
M. Boubacar Sow, vous demandez à Mme Manassa Danioko de s’attaquer aux vrais problèmes de notre pays que sont : l’impunité et la corruption, spoliation des terres, etc.
M. Sow, vraiment la liste n’est pas exhaustive, seulement je tiens à vous rappeler que Mme Manassa Danioko est entrée dans le corps des magistrats en 1970, certainement, plusieurs d’entre nous n’étaient pas encore nés. Elle commença sa carrière en qualité de juge d’instruction à Ségou (1971). Elle fut substitut du Procureur de la République pendant 6 ans. Avocat général près de la cour pendant 2 ans, elle fut Conseiller à la Cour Spéciale de sûreté de l’Etat pendant 5 ans, Président du tribunal de 1ère instance de Bamako pendant 2 ans, Directrice Nationale de l’Administration Judiciaire.
Mme Manassa Danioko a été aussi Procureur Général près de la cour d’appel de Bamako pendant 4 ans, Procureur près la Cour Suprême(1995).
*
L’article est bien redige,Mr Sow maitrise la langue francaise,il n’y a pas a dire.Mais s’en prendre ainsi a Mme Danioko me parait excessif.Une fois qu’on a dit qu’il serait inopportun de renforcer les pouvoirs de la cour consttutionelle on en a fini.Pas besoin d’insulter tout le monde sur son passage…
très bien dit
formidable SOW
Bien dit M. SOW. En effet, nous avons tout simplement besoin de justice, de plus de justice
au Mali très peu de gens finissent dignes
manassa suit la même trajectoire
très honnêtement voici une analyse digne d’être lue
sow voit juste
mais à quoi une analyse de ce genre dans un pays sans avenir
pure vérité
bravo sow
Une analyse socio-juridico-historico-politique très bien fondée
Et pourtant le journaliste a raison.
S’attaquer à manassa au Mali quel culot ?
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