Pour rappel Manassa Danioko est la cinquième Présidente de la 8e Institution de la République du Mali. Elle a succédé à ce poste à Abdoulaye Dicko, Abdrahame Baba Touré, Salif Kanouté et Amadi Tamba Camara. Véritable Amazone de la lutte pour l’égalité et la justice, Mme Manassa Danioko est désormais la femme sur qui repose la bonne marche de l’une des institutions les plus importantes de la Démocratie malienne. Arrêtons-nous un peu sur le rôle de la Cour constitutionnelle. Son rôle principal est de veiller sur la constitutionnalité des lois organiques avant leur promulgation ainsi que les règlements intérieurs de l’Assemblée Nationale, du Haut Conseil des collectivités Territoriales et du Conseil Economique Social et Culturel avant leur application. En plus de ce rôle elle statue sur les conflits d’attributions entre les institutions de l’Etat et la régularité des élections présidentielles et législatives et sur les opérations référendaires dont elle proclame les résultats. Aussi, cette Institution mérite-t-elle une attention particulière ? Magistrat de classe exceptionnelle et doyen de corps, Mme Manassa Danioko est née le 10 janvier 1945 à Kadiolo. La vie professionnelle de cette dame de fer n’aura pas été un long fleuve tranquille, elle a même connu une traversée du désert et un passage a vide, suspendue puis radiée suite à une ordonnance en référé en 1988.
Réhabilitée quelques mois avant le soulèvement populaire du 26 Mars qui sonna le glas du régime de GMT, Mme Manassa a été Procureure Générale près la Cour d’Appel de Bamako de 1991 à 1995. Mais ce qui aura retenu l’attention du public malien c’est qu’elle fut le Procureur Général au procès crimes de sang des anciens dignitaires du régime autoritaire du Général Moussa Traoré. Surtout son réquisitoire de plus de 4 heures d’horloge au cours duquel elle a dépeint les 23 ans de cruauté, d’assassinats, de gabegie de népotisme et de corruption généralisée de l’UDPM, ex parti unique. Surnommée la dame de fer par ses admirateurs, Mme Manassa est le symbole du courage de la Femme africaine, longtemps réduite à ses tâches ménagères et assujettie aux dures réalités socioculturelles. Par cette nomination, Mme Manassa Danioko fait désormais partie du cercle restreint des femmes célèbres du Mali. Mme la Présidente et les 8 autres membres de la Cour constitutionnelle ont entre leurs mains le destin de la Démocratie malienne car les bilans des précédentes équipes ne sont guère reluisants. Le manque de courage face à certains tripatouillages de la Constitution au renversement de tendance au cours des élections présidentielles et législatives. La Cour constitutionnelle est devenue une sorte de faiseur de roi. Elle se donne souvent le rôle de décider à la place des urnes en faisant souvent d’un troisième un premier par-ci ou privant totalement des candidats de leur victoire par-là.
Le Président de la République, en portant son choix sur Mme Manassa Danioko a voulu rectifier un pan important de l’Histoire récente de notre pays. L’on se rappelle encore le 04 Septembre lors de son investiture au CICB, Il a qualifié le « Général Moussa Traoré, le Président Moussa Traoré de grand Républicain ». Ce qualificatif avait provoqué l’ire de tous les démocrates et républicains qui se sont battus des années durant, d’abord clandestinement, puis à visage découvert pour le pluralisme et la démocratie.
Celle qu’on a connue défenseur de la République saura-t-elle rééditer son exploit du procès GMT en renvoyant les Accords d’Alger à une seconde lecture pour vice d’inconstitutionnalité ? Ou bien laissera t-elle ces Accords passer comme une lettre à la poste. Dans tous les cas de figure, les Accords d’Alger ne seront pas signés par le Mali sans l’avis motivé de la Cour constitutionnelle. C’est finalement elle qui tranchera le débat de la constitutionnalité ou non des Accords. Wait and See.
Youssouf Sissoko