L’Institut national de formation judiciaire a servi de cadre, le mardi 03 septembre 2019, pour la tenue de la conférence des chefs de parquets, avec comme thème central: «Le Ministère public face au défi du délitement et de l’effondrement de l’autorité publique : perspectives et responsables ». La cérémonie d’ouverture de cette conférence s’est déroulée sous la présidence du ministre de la Justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Malick Coulibaly et en présence du Directeur national des affaires judiciaires et du sceau, Mohamed MaouloudNajim ainsi que le représentant du Projet justice Mali (USAID-MJP).
Selon le Directeur national des affaires judiciaires et du sceau, Mohamed MaouloudNajim, l’organisation d’une conférence des magistrats du parquet est toujours à la fois une occasion de rencontre, mais également d’échanges sur des sujets de préoccupation partagée. Pour lui, c’est le lieu idéal pour les magistrats du parquet des différents degrés de juridictions, de jeter un œil critique sur leurs pratiques, d’identifier leurs difficultés, de proposer des solutions, de partager les bonnes pratiques, d’harmoniser leurs procédures, de pérenniser la tenue de la conférence du parquet pour s’auto-évaluer périodiquement. A ses dires, le choix du thème n’est pas un fait du hasard, car la mise en cause de l’autorité de l’État a atteint des niveaux intolérables : l’incivisme sur les routes, dans les Administrations et les écoles en ville comme dans les campagnes, les spéculations en tous genres, notamment foncières, la fuite de responsabilité, la gabegie et la dilapidation des biens publics, l’apologie du gain facile à tous les prix, la montée en puissance de la violence et de l’insécurité et pour couronner le tout la propagation des groupes armés, des associations et autres milices armées défiant au quotidien les lois de la République, en toute impunité, laissant le champ libre à l’extension irrésistible du terrorisme. «Vaste programme certes, mais qu’il nous revient impérativement de réussir pour sauver encore, pendant qu’il est temps, la République et restaurer son autorité », insiste-t-il.
Pour le représentant du Projet justice Mali (USAID-MJP), il a expliqué dans son observation que le délitement et l’effondrement de l’autorité publique pourraient s’expliquer à partir de deux raisons majeures que sont d’une part l’inefficacité de l’action publique en termes de la précarité des conditions assurant la performance de la poursuite, et d’autres part cette méfiance et défiance toujours observée entre les populations et la justice qui soulève le problème de la confiance et par conséquent de la légitimation de l’action publique.
Pour sa part, le ministre de la Justice et des droits de l’homme, garde des sceaux, Malick Coulibaly a rappelé, dans son discours d’ouverture, que le Président de la République, Ibrahim Boubacar Keita ne cesse de répéter cette assertion : « nul n’est au-dessus des lois », selon le ministre cette assertion est le viatique des magistrats et leur vade mecum. « Les maliens doivent sentir la loi partout où ils se trouvent. Ils doivent en même temps être protégés avec leurs biens », énoncera-t-il. Ainis, le ministre indiquera que se trouvant à le croisée des chemins, la justice malienne est aujourd’hui attendue par tous, elle doit restaurer l’autorité de l’Etat et consacrer les droits des citoyens. Par ailleurs, le ministre Coulibaly soulignera que la reconquête de l’autorité publique qui est devenue une question existentielle pour notre pays ne sera pas acquise au bout du fusil ou à coups de matraques. De son point vue, elle se fera par un réarmement moral et intellectuel, à travers notre capacité collective à nous remettre en cause et à vaincre sans relâche les habitudes qui se sont insidieusement installées depuis tant d’années. Il s’agit, selon toujours le ministre, de déplacer nos objectifs et nos buts, de remodeler nos comportements et notre conduite sur d’autres valeurs et de donner la priorité à l’éthique et à l’intérêt général. Cet aspect est fondamental car l’autorité de l’Etat est avant tout une autorité morale, dira-t-il. « Or, cette autorité morale, surtout en ce qui concerne la Justice, ne peut s’adosser que sur des comportements éthiques et déontologiques suffisamment bien assis », soutiendra-t-il. Je voudrai donc qu’ensemble, estime le ministre, nous portions un regard lucide et critique sur l’état de notre société et sur nos attitudes sans complaisance, ni parti pris. En outre, il a annoncé aux magistrats que l’Etat doit mettre les moyens en place, améliorer leurs conditions de vie et de travail, assurer leur sécurité. Et de rassurer que les efforts sont déjà en cours dans ce sens à travers l’élaboration de la loi d’orientation et de programmation pour le secteur de la justice.
M.L. KONE