Justice et lutte contre la délinquance financière : Pourquoi plaider pour « l’indulgence » ?

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Quand de hauts magistrats viennent à appeler les justiciables à « une indulgence et à la compréhension » par rapport à la bonne distribution de la justice, on se perd en conjectures.

L’assertion selon laquelle « tout ce qui se conçoit aisément, s’énonce clairement » implique qu’en matière de communication, rien n’est fortuit. Surtout quand le besoin de s’expliquer vient à s’imposer sur le fonctionnement de certains services stratégiques de l’Etat à l’instar de la justice ou des Forces armées. Cela voudra-t-il dire que ces domaines régaliens de l’Etat fonctionnent mal ? Pas forcément ! Ils devraient peut-être faire l’objet de réajustements…

En effet, dans une récente interview accordée à  l’ORTM, le Procureur Général près la Cour suprême, Mamadou Timbo s’est prononcé sur certains dossiers brûlants de l’heure, qui défraie la chronique au sein de l’opinion et dans la presse. Et le haut magistrat de citer le cas des dossiers de l’achat de l’avion présidentiel, de l’affaire dite des équipements militaires, du dossier Paramount, de l’affaire Sécuriport, dans laquelle deux anciens ministres sont placés sous mandats de dépôt, donc en détention préventive et d’autres suspects placés sous contrôle judiciaire (semi-liberté).

Le chef du ministère public au niveau de la Cour suprême a expliqué comment des cas de dénonciations adressées  au ministre de la Justice aient pu déclencher l’action des poursuites, commençant par la phase de l’enquête policière en passant par celle des investigations du juge d’instruction pouvant conduire à des mandats de dépôt, dans le « strict respect des droits de la personne humaine », consacrés par la Constitution. Et de souligner qu’en matière pénale, toutes les interventions des magistrats doivent respecter absolument la loi, notamment le Code pénal et le Code de procédure pénale ; en tenant compte, erga omnès, du principe sacro-saint de la présomption d’innocence.

C’est cette explication qui a suscité la question de la journaliste sur l’incompréhensible lenteur de la machine judiciaire. Car, a-t-elle relevé, comment protéger les droits du suspect (dont la culpabilité n’est pas établie) si le magistrat peut le garder en détention préventive sur trois ans au plus ? Une question qui a fort embarrassé le Procureur Général Mamadou Timbo, qui s’est appesanti sur les impératifs de « la recherche de la vérité » et celle d’une justice efficace. Et de laisser entendre qu’il faut faire en sorte qu’il n’y ait pas de doute dans l’établissement des faits constitutifs de l’infraction. Car, s’il y a un doute, relève-t-il, « il profite à l’accusé », et l’on aura pas la manifestation de la vérité et l’Etat, dans les cas d’espèce perdra d’énormes ressources financières censées détournées.. Ce qui oblige les magistrats à prendre le temps pour des enquêtes détaillées pour rechercher les indices, les traces des violations de la loi. Or, dira-t-il, les suspects sont des intellectuels qui peuvent tout mettre en oeuvre pour faire disparaitre les éléments de preuve… « En Europe, des affaires similaires impliquant des ministres peuvent s’étaler sur dix ans. Nous faisons un effort pour une saine distribution de la justice en faisant un parfait équilibrage entre l’intérêt général et celui des justiciables. Il faut donc, a-t-il indiqué, que les gens comprennent que le travail de la justice n’est pas aisé ; elle a besoin de la patience et de la disponibilité de tous pour son efficacité.

Et le haut magistrat d’appeler les Maliens à « l’indulgence vis-à-vis du fonctionnement plutôt lent de l’appareil judiciaire ». Sauf qu’il apparaît curieux que le juge plaide pour une indulgence, alors que sa clémence se fait désirer, surtout en matière de délinquance financière présumée.

Boubou SIDIBE/maliweb.net

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