Grève des magistrats à compter du 29 novembre 2022 : Test de feu pour le pouvoir de la transition

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La grève de cinq jours ouvrables du Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et du Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA), à compter du 29 Novembre 2022 à 07H30 min, est un véritable test de feu pour la Transition. Entrer en bras de fer avec les magistrats serait suicidaire pour les autorités de la Transition.

Dans une correspondance adressée au Ministre du Travail de la Fonction Publique et du Dialogue Social, le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) annoncent  un mouvement commun d’arrêt de travail dans toutes les juridictions de la République du Mali, à compter du 29 Novembre 2022 à 07H30 min pour une durée de 5 jours ouvrables reconductibles en cas de besoin.

Dans ladite correspondance dont l’objet est : « Mémorandum de Préavis de grève », le SAM et le SYLIMA calquent leur mouvement sur leurs statuts et en application des dispositions de la loi N° 87-47 AN/RM du 10/08/1987 relatives à l’exercice du droit de grève dans les services publics.

Motifs évoqués

Tout part de l’adoption en conseil des Ministres en sa séance du 02 Novembre 2022, du projet de loi portant modification de la loi 2016 – 046 du 23 Septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle. Ledit projet de loi vise à modifier l’âge de départ à la retraite des membres de la Cour Suprême en violation, d’une part, de l’article 82 de la constitution du 25 février 1992 qui dispose que : « le conseil supérieur de la Magistrature veille sur la gestion de la carrière des magistrats et donne son avis sur toute question concernant l’indépendance de la magistrature » de la loi N°02-054 portant statut de la magistrature, en ce qu’il  ne ressort nulle part que l’avis du Conseil Supérieur de la magistrature et celui de la Cour Constitutionnelle ont été requis, tous deux consacrés par les lois organiques.

Suivant leur jargon, considérant que les magistrats formant le même corps doivent bénéficier des mêmes avantages et traitements résultant de leur statut, principe d’équité et de justice contenu dans les arrêts rendus par la Cour Suprême relativement aux affaires contre le département de la fonction publique et qui lui ont été soumises ;

Que l’adoption dudit projet de loi signifierait et équivaudrait à donner aux membres de la Cour Suprême un statut particulier d’agents de l’Etat à vie et non des magistrats dès lors que le statut de la magistrature n’est pas modifié encore moins  la constitution ou la loi portant l’organisation judiciaire en République du Mali qui stipulent que « la justice est rendue par les cours et tribunaux » ;

Que la Cour suprême est donc une juridiction avant d’être une institution. A ce titre, pour y être nommé et continuer à rendre des décisions de justice conformément à la loi sur le statut de la Magistrature, il faut être non seulement magistrat, mais surtout un magistrat en activité, bien que d’autres catégories de fonctionnaires y sont également nommés et évoluent conformément à leur statut ;

Qu’au-delà de 65 ans, consacrés par leur statut, les magistrats membres de la Cour suprême, en continuant à y siéger, rendront des décisions administratives et non juridictionnelles ;

Qu’il est encore plus grave de conditionner le renouvellement du mandat des membres de la Cour suprême à l’avis du conseil supérieur de la Magistrature, même si cet avis doit être conforme, au mépris des dispositions légales et règlementaires ;

D’autre part, des principes et valeurs qui ont conduit le Gouvernement et les syndicats, y compris les Unions syndicales, à porter les âges de départ à la retraite à 65 ans et dont bénéficient les magistrats depuis 10 ans uniformisant ainsi pour l’ensemble des fonctionnaires de la catégorie A des autres corps au prix de laborieuses négociations syndicales ;

Considérant que ledit projet de loi par son caractère sélectif et négativement discriminatoire constituerait un précédent fâcheux et crée plus de problèmes et de discordes qu’il n’en résolve, en violant le principe d’égalité des citoyens devant les lois de la République ;

Considérant que la loi organique n’est pas la voix appropriée pour changer l’âge de départ à la retraite des membres du corps unifié des magistrats mépris de leur statut ;

Considérant que les organisations syndicales des magistrats en l’occurrence le SAM et SYLIMA, au demeurant, n’ont pas été associées, ni consultées dans le processus d’adoption dudit projet de loi incriminé alors que de coutume il en est autrement pour tous les projets de textes intéressant le secteur de la justice, particulièrement celui des magistrats ; Que le ministère de la justice doit proposer un plan de carrière juste, clair et homogène des magistrats ;

Considérant que le dialogue social est un gage pour l’apaisement du climat social au Mali conformément aux pertinentes recommandations générales de la conférence sociale dans le domaine du travail en date du 22 octobre 2022.

Réclamations

Au regard de ces motifs, les deux syndicats réclament « l’abandon de tout processus d’adoption du projet de loi portant modification de la loi 2016 – 046 du 23 Septembre 2016 portant loi organique fixant l’organisation, les règles de fonctionnement de la Cour Suprême et la procédure suivie devant elle », « la relecture de la loi N°02-054 portant statut de la Magistrature », et « l’adoption des projets de décret  portant plan de carrière des magistrats et celui fixant classement des juridictions ».

Baptême de feu

Face à ces exigences des magistrats, les autorités de la transition ont le choix entre céder et aller au bras de fer. Cette dernière option est suicidaire quand on sait que tout pouvoir qui engage un bras de fer avec les magistrats s’en sort très difficilement.

L’on se rappelle  la grève de trois mois des magistrats en 2018. Il a fallu que le Président d’alors, IBK (RIP), tende la main aux magistrats pour que la grève soit suspendue. Le président de la transition, colonel Assimi Goïta, a du pain sur la planche.

DCA

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