Dramane Diarra, nouveau procureur de la commune IV: «Au moins 90% du projet n’a pas connu de changement»

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Dramane Diarra, président du Réseau Apem
Dramane Diarra, procureur de la Commune IV

Après avoir été nommé procureur du tribunal de grande instance de la commune IV, le juge Dramane Diarra donne ses impressions sur le conseil supérieur de la magistrature, tenu le jeudi 23 mars 2017. Pour lui, la proposition faite par le ministre de la Justice, Mamadou Ismaël Konate, a été la moins contestée de ces dernières années. «Au moins 90% du projet n’a pas connu de changement».

Une session du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) vient de se tenir. Quels en sont les premiers enseignements ?

Suivant les dispositions de l’article 28 de la loi N°02-054/ du 16 décembre 2002 portant statut de la magistrature : «Toutes nominations aux fonctions judiciaires sont faites par décret du Président de la République en réunion du Conseil Supérieur de la Magistrature.» Il faut ajouter, en passant, que le Conseil Supérieur de la Magistrature, dont le Président est le Président de la République, est constitué de 23 membres dont 13 membres (plus de la majorité absolue) sont des Magistrats élus par leurs pairs. Les 10 autres étant des membres de droit dont l’essentiel aussi provient du monde judiciaire : Le président de la Cour Suprême, le Procureur Général près ladite cour, certains Directeurs de services centraux du Ministère de la Justice, le Ministre de la Justice en tant que Vice-président. Ainsi, le premier enseignement à tirer de ce travail du Conseil Supérieur de la Magistrature, est que les Magistrats sont nommés aux différentes fonctions judiciaires par décret du Président de la République, sur proposition du Ministre de la Justice, après (délibération) du Conseil Supérieur de la Magistrature. Donc après avis, généralement motivés, d’autres Magistrats, majoritairement. Cette session du CSM a concerné une centaine de Magistrats, et d’après les informations qui sont parvenues de la réunion, qui a duré environ six (06) heures d’horloge, au moins 90% du projet n’a pas connu de changement. À ce niveau, deux constats s’imposent : 1-Il y a eu de vrais débats autour des propositions, eu égard au temps consacré à la session. 2-Les choix du Ministre étaient objectifs dans leur écrasante majorité.

Par ailleurs, cette session du CSM est la première depuis l’arrivée de Maître Mamadou Ismaïla Konaté à la tête du Département en charge de la Justice. Ainsi, un des enseignements, de cette session, est forcément la dynamique nouvelle qu’il entend insuffler à la Justice de notre pays, ce qui passe forcément par le renouvellement du personnel Magistrat. En exemple des trois cours d’appel du pays, seul le premier président de la cour d’appel de Bamako est resté. Sinon, les premiers présidents et procureurs généraux de Kayes et Mopti  ainsi que le procureur général de Bamako ont été remplacés. En outre, il y avait de plus en plus de postes judiciaires vacants, président ou procureur même souvent, au niveau de certaines juridictions. Par conséquent, il était impérieux de les remplacer. Voici, à mon sens, les quelques enseignements à retenir de la tenue de cette session du CSM du 23 mars 2017.

Cette session intervient après une grève illimitée que les Magistrats avaient observée entre janvier et février 2017. Certains ont soutenu qu’il y aurait des sanctions contre des Magistrats jusqu’aux-boutistes. Qu’en est-il exactement ?

Je ne sais pas le contenu que ces magistrats dont vous parlez entendent par jusqu’aux-boutistes. Ce qui est sûr, c’est que beaucoup de syndicalistes, eux qui ont porté la lutte syndicale, ont eu plutôt des promotions. Je ne vais pas loin, je cite quelques cas du SAM, mon syndicat : Mamoudou Kassogué, Fatoumata Lalla Diallo, Kankou Sangaré, Ousmane Samaké et moi-même, tous membres du Comité Directeur du SAM, respectivement promus : premier Substitut au TGI de la Commune III, Président du TGI de Koutiala, Président du TGI de Ségou, Procureur près le TGI de Kita, et Procureur près le TGI de la Commune IV de Bamako, en guise d’illustration. Et ces cas ne sont pas isolés.

À partir de là, vous conviendrez avec moi, que cette affirmation de «certains Magistrats», comme vous le dites, n’est qu’une affabulation.  Par contre, s’il s’agit de la véhémence dans les revendications, je fus, sans fausse modestie, de ceux qui étaient à la pointe de cette lutte pendant une année entière qu’a duré le processus. Ce n’est pas vous de la presse qui direz le contraire. En résumé, les nominations dernières de Magistrats font partie des moins contestées depuis un certain temps. Enfin, les syndicats de Magistrats sortent affaiblis de cette grève illimitée, à cause de dissensions inventées et inopportunes, qui n’auraient jamais dû survenir à un moment aussi charnière de la lutte syndicale. Nous comptons remonter la pente sans passion, et avec beaucoup de patience et de dextérité.

Comment se porte aujourd’hui la famille judicaire incarnée par les Magistrats ?

Ce serait démagogique de dire que la famille judiciaire se porte bien, au moment où presque tous les syndicats du monde judiciaire sont dans des négociations avec le gouvernement ou dans des mouvements de grèves. Cependant, nous pensons que ces revendications tendent à l’amélioration de la qualité et de l’efficacité du service public de la justice. En cela, nous estimons que ces efforts (revendications syndicales, nominations) pourront constituer un tremplin pour l’amorce d’une justice au service du peuple, au nom duquel elle est rendue. Mais rien n’est acquis d’avance. Il faut plus de constance, d’abnégation, de conscience de la dégradation avancée de notre système de justice, de remise ne cause individuelle et collective pour faire avancer les choses.

Source: L’ESPERANCE

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