Dans notre parution du 26 février 2021, nous nous interrogions sur le lexique juridique qui ferait la très bonne lecture de la décision de rabattement du délibéré avec une nouvelle composition de la Cour dans l’affaire dite désormais de “déstabilisation de l’Etat” ? Il s’agit bien sûr de ceux qui estimaient que cette décision n’impacte en rien le contenu des débats lors de l’audience du 16 février dernier où l’avocat général avait plaidé pour l’annulation pure et simple de la procédure, et ceux qui pensaient que cette décision remettait les compteurs à zéro en permettant à l’accusation de reprendre la main après la “débâcle” lors de la première audience.
Avec le délibéré de la nouvelle composition de la Chambre d’accusation, nous pouvons dire sans risque de nous tromper que le courant qui pensait que le rabattement ne change fondamentalement rien dans les débats de fond lors de l’audience du 16 février a fait la très bonne lecture.Ainsi, dans sa sagacité, la nouvelle Chambre d’accusation a prononcé la nullité de la procédure et ordonné la remise en liberté des personnalités détenues dans cette affaire dite de “déstabilisation de l’Etat”. “Les bons comptes font les bons amis”, dit-on. Avec ce délibéré, plusieurs observateurs avaient pensé à un moment donné que cette histoire constituerait certainement un vieux souvenir entre les deux parties qui allaient définitivement enterrer la hache de guerre. Mais, contre toute attente, à travers les ondes de la chaine nationale, le procureur général près de la Cour d’appel de Bamako, Idrissa Arizo Maïga, a annoncé l’opposition du parquet à la décision de la Chambre d’accusation. En termes clairs, le parquet s’est pourvu en cassation ouvrant ainsi les pages d’un très long feuilleton judiciaire dont seul l’Architecte de l’Univers sait l’issue.
Dans ce cas, le dossier sera renvoyé devant la Chambre criminelle de la Cour suprême qui statuera sur le délibéré. En effet, celle-ci a plusieurs options. Elle peut confirmer la décision de la Chambre d’accusation et l’affaire est définitivement classée, sous réserve que le parquet ne fasse pas une demande en révision ou encore elle peut annuler cette décision de la Chambre d’accusation.
Dans ce cas figure, le dossier sera renvoyé à la Cour d’appel. Mais, cette fois-ci, ce sont de nouveaux juges qui statueront. Aussi, à ne pas écarter la possibilité, pour la Cour suprême, de renvoyer le dossier à la première instance pour les débats de fond.
A cette étape de la procédure, rien n’est moins sûr, mais les prochains jours nous édifieront sur l’issue réelle de cette procédure aux relents purement politiques.
Boubacar Païtao