L’ancien Premier ministre Dr. Boubou Cissé et plusieurs personnes sont accusés de tentative de déstabilisation des institutions. Une enquête est ouverte au niveau du tribunal de grande de la Commune III. Le collectif des avocats de la défense en charge dudit dossier était face à la presse le week-end passé pour lever le voile. Ils étaient une dizaine d’avocats, dont l’ancien Bâtonnier Me Kassoum Tapo, deux avocats venus de Paris, Me Eric Moutet et Marcel Ceccaldi, Abdrahamane Mamata Touré, Me Zana Koné.
Dans un réquisitoire qui a fuité sur les réseaux, le parquet reprochait au Premier ministre Dr. Boubou Cissé d’être à la tête d’une entreprise de déstabilisation de la transition avec comme principaux acteurs, le chroniqueur Ras Bath, Sékou Traoré Secrétaire général de la Présidence, Vital Robert Diop, PDG de PMU et autres.
A s’en tenir à ce réquisitoire, les accusés se seraient rencontrés à des heures tardives de la nuit, à certains endroits, avec certaines personnalités dont un marabout «puissant». Le tout, dans l’intelligence de porter un coup à la transition en place. Ras Bath, selon le même document, aurait pour rôle en tant que chroniqueur, de pousser les gens contre le régime en place en dénigrant les acteurs. Vital Diop de payer Ras Bath dans cette dynamique entre autres. Toutes ces informations ont été récoltées par la direction générale de la Sécurité d’Etat (DGSE) suite à des dénonciations. «Boubou Cissé aurait orchestré tout ce jeu dans le but de venir au pouvoir», tente de faire croire le procureur de la République près le tribunal de la de grande instance Commune III dans le réquisitoire.
D’un revers de main, l’ancien ministre de la Justice, des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux et Bâtonnier Me Tapo a qualifié de vide la procédure et en violation flagrante de tous les principes du Droit de procédure pénale. L’intervention de la Sécurité d’Etat dans le dossier et l’arrestation de plusieurs personnes dans des conditions non conformes et des violations des droits reconnus à tout individu poursuivi au Mali. A en croire les avocats, les conditions de détention ne sont pas réunies pour cause d’absence de preuve, d’absurdité du dossier. Cette affaire doit purement et simplement être classée, pense la défense.
Un à un tous les avocats ont eu droit à la parole pour donner leurs avis juridiques sur le dossier. Ils sont tous unanimes pour dire que cette procédure vise tout simplement à empêcher le Premier ministre de se présenter aux prochaines élections. «Boubou Cissé a juste tort d’avoir un destin de président», a évoqué Me Abdrahamane Mamata Touré. Pour bouder tout le dossier, Me Zana Koné estime que la Sécurité d’Etat est en plus en mesure de découvrir un coup d’Etat plus qu’un juge d’instruction. Tel n’a pas été le cas avec leurs clients, dit-il, car ces derniers ont passé plusieurs jours dans les geôles de la SE. «C’est un procès politique», décria-t-il. Ils veulent juste garder ces gens avant la tenue des prochaines élections car Boubou ferait peur à certains acteurs de la transition pour le fait d’être un potentiel candidat, a conclu le jeune avocat à la Cour, Me Zana Koné.
Koureichy Cissé
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Me Zana Kone du collectif des avocats de boubou et co-accusés :
«C’est un procès politique» !
Dans l’affaire Dr. Boubou Cissé et co-accusés, Me Zana Koné estime que ce procès est politique. Entretien…
Mali Tribune : Pensez-vous qu’il existerait des objectifs politiques inavoués dans ce dossier?
Me Zana Koné : Ce n’est pas ce que je pense qui est important, mais ce qui est et ce qui est visible et constatable de tout le monde qui est important. En évidence, un dossier qui tourne autour de l’élection présidentielle, un dossier qui tourne autour des intentions d’un potentiel candidat naturellement n’a qu’un seul dessein. Politique. On nous dit qu’il y aurait M. Boubou Cissé qui aurait nourri des ambitions politiques. Pour ce faire qu’il aurait recruté des gens autour de lui pour l’aider à accéder au pouvoir. Naturellement c’est politique.
Mali Tribune : Qui serait derrière ces poursuites judiciaires?
Me Z. K. : Dans les faits, sur le plan judiciaire, c’est le procureur qui a initié mais dans notre cas, c’est la Sécurité d’Etat qui a enlevé nos clients. Donc il se trouve que nous sommes dans une cabale politique qui commence en amont. Les poursuites judiciaires vont commencer à partir du procureur et tout ce qui s’est passé avant est dans le non-droit en ce moment.
Mali Tribune : Mais qui peut-être derrière cette cabale politique ? Les autorités politiques de la transition ou une autre personne?
Me Z. K. : Il me serait impossible aujourd’hui de pouvoir imaginer comme eux (les poursuivis) également, qui est derrière ces poursuites. Je sais quand même que c’est politique. Cela saute aux yeux. Maintenant qui est derrière ? Cela est difficile à dire. Nous sommes dans une situation singulière qui n’est pas normale et on ne peut savoir exactement de qui viennent les coups. Il est impossible aujourd’hui de le dire. Je ne sais pas qui est jaloux de qui ? Qui veut empêcher qui d’être candidat à l’élection présidentielle prochaine.
Mali Tribune : Quels peuvent être les objectifs de ces cabales ?
Me Z. K. : De ce qui ressort du procès-verbal abusivement qualifié d’enquêtes préliminaires, ce sont des objectifs politiques. On dit que Boubou Cissé nourrit des ambitions politiques. Il veut être candidat alors il veut déstabiliser les institutions du pays. Comme nous, nous n’avons vu dans le dossier qui laisse entendre que Boubou serait dans un complot avec les autres qui sont placés sous mandat de dépôt, il nous est loisible de penser que c’est bien Boubou la cible. Il n’y a aucun élément dans le dossier qui laisse penser sérieusement qu’il y a un complot.
Mali Tribune : Donc l’objectif serait de détruire Boubou politiquement pour l’empêcher d’être candidat à l’élection présidentielle prochainement ?
Me Z. K. : Ils sont les seuls à vous dévoiler l’objectif réel. Ce que nous savons à partir du dossier et qui peut être déduit du dossier, Boubou semble être un problème.
Mali Tribune : Donc on peut dire que Boubou fait déjà peur à certaines personnes ?
Me Z. K. : Est-ce que Boubou fait peur ou pas ? C’est ceux qui éprouvent ces sentiments et ces émotions qui peuvent l’exprimer. Ce que je sais, c’est qu’ils estiment que oui, Boubou veut déstabiliser les institutions à travers ces jeunes qui sont détenus en prison.
Mali Tribune : Si on était en procédure judiciaire, on a un peu l’idée de l’issue du dossier, la sentence et le nombre d’année au pire. Mais là, c’est politique. Quelle issue peut-on espérer dans cette affaire ? Un étouffement ou un emprisonnement ?
Me Z. K. : Nous souhaitons tous une issue heureuse. Si les arrestations doivent continuer sur ces bases-là, personne n’est à l’abri au Mali. Nous avons tous intérêt à ce que cette cabale cesse. Ce qui est visé n’est pas le cas seulement de nos clients, mais c’est la liberté pour tout le monde. La liberté pour tout le monde d’opiner, de participer à quelque réunion que ce soit sans que cela soit considéré comme une tentative de déstabilisation du pays. C’est un procès politique ! Il nous est difficile de dire avec certitude jusqu’où ira ce procès. Ce dont je peux être certain, de mon point de vue, est qu’il n’y aura pas de procès. Je pense que ceux qui sont à la manœuvre ont juste besoin de temps. Le temps peut-être que les élections soient organisées ou que l’on soit à quelques mois des élections. Je pense que cette affaire n’arrivera pas à la Cour d’assises. Parce qu’il n’y a aucun élément qui permet de le faire.
Propos recueillis par
Koureichy Cissé