Des solutions de rechange existent mais nécessitent un accompagnement vigoureux de l’état.
L’habitude est une seconde nature, dit-on. Le sachet plastique présente de nombreux avantages. Il est léger, flexible, solide, imperméable, imprimable, recyclable, réutilisable. Mais c’est aussi un produit issu d’une matière dérivée du pétrole (la polyéthylène) que le consommateur se procure à coût faible. Le sachet plastique est entré dans l’habitude de consommation des Maliens. Le client d’une pharmacie, la ménagère qui fait ses courses au marché, l’acheteur chez un étalagiste emportent désormais leur article dans un sachet plastique. Les sachets d’eau en plastique vendus à 25 et 50 Fcfa+, sont à la portée de la bourse du citoyen moyen. Ils sont produits par une multitude d’entreprises familiales. En effet, il existe une gamme très variée d’emballages plastiques qui inonde le marché. Le plus connu est le fameux sachet noir dans lequel est livré le moindre article vendu. La nuisance est visible partout. Les rues et les dépotoirs d’ordures de nos villes reçoivent des tonnes de matières plastiques chaque jour. Le sachet plastique est facile d’accès et se prête à plusieurs usages. Mais il représente un grand danger pour l’homme et son environnement. D’abord à cause de sa longue durée de vie (400 ans au minimum) pour se dégrader, le plastic pollue le sol. Il empêche l’infiltration de l’eau dans les surfaces de culture où il séjourne. Il constitue une menace pour l’activité agricole. En milieu rural, il est à la base de la mort de beaucoup d’animaux, qui l’avalent mélangé à l’herbe qu’ils broutent dans les prés ou au cours de leur errance sur les dépotoirs d’ordures. Face à ce fléau, le gouvernement a entrepris plusieurs actions de sensibilisation à travers la Direction nationale du contrôle des pollutions et des nuisances (DNACPN). Mais, compte tenu de l’âpreté de la tâche, les pouvoirs publics ont décidé de prendre le taureau par les cornes. Désormais une loi interdit, purement et simplement, l’utilisation des sachets plastiques. L’entrée en vigueur de cette loi est prévue en 2013. D’ici là, quelles sont les mesures prises pour suppléer l’absence des sachets plastiques ? Comment préparer la reconversion des entreprises productrices des sachets et quelles sont les mesures d’accompagnement de l’application de la loi ?
Les responsables de la DNACPN et les principaux acteurs répondent à ces questions. L’alternative Oxo. Se-lon Abdoulaye Traoré, chef de division suivi environnemental et contrôle des pollutions et nuisances (DNACPN) des solutions alternatives existent. L’essentiel des sachets plastiques sur le marché provient de l’importation. La production nationale est assurée par quelques entreprises locales et ne représente qu’une infirme partie du volume consommé. Dans ce contexte, les industries locales doivent adopter une solution intermédiaire, c’est- à -dire la production de sachets biodégradables. En effet, le sachet plastique oxo biodégradable est fabriqué en polyéthylène (granulé) contenant un additif appelé ( d2w) le rendant oxo biodégradable. L’oxy biodégradation signifie la dégradation résultant d’une oxydation et d’une modification moléculaire de manière simultanée ou successive. Ainsi, tout sachet plastique ou emballage à base d’additif oxo biodégradable, doit porter la mention « Oxo biodégradable » et doit porter le nom ou le logo du fournisseur. Il doit être préalablement homologué auprès de la DNACPN. Les sachets concernés par cette mesure sont, les sachets d’eau, les sachets de super marchés, les plastiques de film noir avec une interdiction totale du noir, les plastics emballages de pressing, les plastics noirs paillage pour l’agriculture et les sacs poubelles noirs. Le plastique eco-compatible est une solution à forte valeur ajoutée. Il se dégrade complètement entre 6 mois et 5 ans, après la durée de vie prédéterminée du produit.
En l’abandonnant dans la nature, la dégradation peut se faire en quelques mois, en fonction des conditions d’exposition, explique le spécialiste. La technologie permet également une utilisation responsable du plastique en réduisant son impact sur l’environnement. Les produits d2w peuvent être recyclés et réutilisés durant la période de vie programmée. Ils se dégradent en se transformant en eau, gaz carbonique et en biomasse. Le processus s’effectue en présence d’oxygène sur ou dans le sol, aussi bien la nuit que le jour au soleil ou à l’ombre selon une échelle de temps programmable. Les avantages d’un emballage utilisant la technologie d2w sont nombreux. Il se dégrade selon une période de vie prédéterminée. Il est aussi résistant qu’un plastique traditionnel, utilise les mêmes machines de production, sans modification, pour un surcoût mineur et est certifié pour tout contact alimentaire. Les produits d2w peuvent être recyclés ou fabriqués à partir de matériau recyclé. Ils ne se fragmentent pas simplement, mais se biodégradent en co2, eau et biomasse sans toxicité pour l’environnement.
Reconversion totale. Au Mali, la société industrielle d’emballage et de conditionnement (SIECO), a déjà pris le devant dans l’emploi de cette technologie. Pionnière depuis une dizaine dans la fabrication d’emballages plastiques elle fournit bon nombres d’entreprises usagers de sachets plastiques (pharmacies, supermarchés, etc.). « Depuis l’annonce de la mesure, nous avons pris des dispositions pour nous conformer aux nouvelles normes », confie Mona Fakhry, directrice générale de SIECO. Son entreprise produit aujourd’hui des sachets biodégradables au bout de 18 mois seulement. Une grande fierté pour cette dame qui déclare pouvoir mieux faire avec l’appui de l’Etat. Malgré les efforts consentis, Mme Fakhry émet des inquiétudes quant à la reconversion totale de son entreprise vers le remplacement total des sachets plastiques par d’autres matières entièrement biodégradables sans additif. Cela impliquerait de nouveaux investissements en terme d’équipements très couteux, a indiqué l’industrielle. Par ailleurs, plus de 80% des sachets plastiques utilisés au Mali sont importés. La production nationale représente moins de 20%. La responsable de SIECO estime qu’il faut dans ce contexte un accompagnement substantiel de l’Etat en terme de contrôle relatif à l’identification et la certification des sachets biodégradables, pour protéger les producteurs nationaux de sachets biodégradables contre la concurrence déloyale. Il faut aussi mettre en place une structure de contrôle composée des services des douanes, du commerce et de la concurrence et de la direction générale de la protection civile, a reconnu Abdoulaye Traoré. Ce noyau sera chargé d’identifier, de vérifier et de contrôler la qualité des sachets importés ou produits sur place.
Les autorités accompagneront les producteurs nationaux de sachets plastiques. L’appui de l’Etat ne leur fera pas défaut, a promis Félix Dackouo, premier responsable de la DNACPN. En concertation avec le ministère des Finances, il sera envisagé une possible exonération des produits importés entrant dans la fabrication du plastic biodégradable. En plus d’autres facilités seront accordées aux producteurs. Des campagnes d’information et de sensibilisation des populations à l’usage du sachet biodégradable seront intensifiées, envisage le directeur de la DNACPN. Cependant, l’option finale est d’aller vers une reconversion totale. Les sachets plastiques pourraient être remplacés par les instruments traditionnels tels que les sacs en coton, les paniers à base de sisal ou de fibre de dah, dont notre pays est un grand producteur, préconise Abdoulaye Traoré. Cette solution est tout bénéfice pour le pays. Elle permettra à l’artisanat de s’affirmer en exposant tout son savoir faire. L’agriculture y gagnerait avec un accroissement de la production des cultures qui serviront de matière première. L’emploi rural et industriel connaîtra un essor considérable. Le tout impulsera une croissance économique considérable qui protège l’environnement.
***********
Sécheresse : LA SOLUTION DE L’EAU SOLIDE
Sergio Rico, ingénieur chimiste mexicain, est l’inventeur de la pluie solide, un procédé très simple qui pourrait révolutionner l’agriculture. Cette technologie relève de l’irrigation agricole. Elle consiste à optimiser l’usage de l’eau de pluie. Depuis une dizaine d’années, le Mexique subit des sécheresses terribles dans le nord du pays. Sergio Rico, sensible aux problèmes de pauvreté, de famine et de migration, a cherché comment mieux utiliser les faibles pluies qui tombent malgré tout sur ces zones arides. “En travaillant sur la récupération de l’eau de pluie, déclare Sergio Rico au Point.fr, nous avons trouvé le moyen de la solidifier pour lui donner une autre valeur. Je me suis inspiré des couches pour bébés qui permettent d’absorber un liquide dans un minimum d’espace, et c’est à partir de là que j’ai eu l’idée de transformer l’eau de pluie en la gardant sous forme moléculaire dans un acrylate très absorbant dont la caractéristique est d’emmagasiner jusqu’à 500 fois son poids en eau sans en modifier la structure chimique.” L’eau de pluie, captée des toits, est canalisée vers un réservoir dans lequel il suffit de verser une dose de 1,5 gramme de polyacrylate de potassium pour 1 litre d’eau.
En 15 minutes, on assiste au processus de solidification de l’eau. Se produisent alors une ionisation et une précipitation qui permettent aux molécules d’eau de se coller aux polymères, ce qui donne de l’eau en grains, à l’état solide. Avec ce procédé, plus besoin de pompes, de tuyaux, d’énergie électrique, de camions-citernes pour transporter le liquide. L’eau solidifiée peut se mettre dans des sacs en plastique que l’on peut stocker facilement jusqu’à en avoir besoin. Le polyacrylate de potassium permet de gélifier les liquides et de les réhydrater autant de fois que l’on veut pendant huit à dix ans. C’est une sorte de poudre blanche qui ressemble à du sucre. Pour le mélange, le chimiste mexicain, qui connaît bien son pays, utilise comme unité de mesure la capsule de n’importe quelle bouteille de boisson gazeuse, car il sait que les paysans des hameaux ou des petits villages auxquels s’adresse en priorité cette technologie ne possèdent pas une balance précise permettant de peser 1,60 gramme de polyacrylate. Une capsule pleine à ras bord est, par exemple, la dose nécessaire pour solidifier l’eau que réclament trois plants de tomates. Pour un champ de maïs, un sac de 25 kilos permet d’irriguer environ 1 hectare. Pour démontrer la fiabilité de son invention, Sergio Rico a comparé dans l’État du Sonora, où le thermomètre monte facilement au-dessus de 45 degrés, deux systèmes d’irrigation. Avec le système traditionnel, où le paysan attend la saison des pluies pour arroser son champ, le rendement est de 600 kilos de maïs pour un hectare. Dans le champ d’à côté, la même culture avec de la pluie solide a permis une récolte de 10 tonnes par hectare ! Ce système d’irrigation, à la différence des autres comme l’arrosage par aspersion ou le goutte-à-goutte, est le seul qui emploie de l’eau à l’état solide. Les résultats sont incroyables, car la racine des plantes est maintenue humide pendant plusieurs mois et se réhydrate chaque fois qu’il y a une ondée ou un petit arrosage.
La plante n’a, d’autre part, aucun stress, car elle sait qu’elle peut compter sur l’exacte quantité d’eau qui lui est nécessaire sans qu’il y ait de déperdition, car l’eau solide ne s’infiltre pas dans la terre ni ne s’évapore. Sur son bureau, Sergio Rico nous montre une magnifique plante verte qui n’a pas été arrosée depuis 176 jours. Sergio Rico améliore sa technique depuis cinq ans. Il a déposé un brevet dans le monde entier sous le nom de “Silos de Agua”. Sa technique est déjà employée avec succès en Inde pour les cultures de fruits, de cacahuètes, de coton, de blé et palmes. Avec un système traditionnel, ces cultures requièrent une irrigation de 80 litres d’eau par semaine, avec l’utilisation de l’eau solide, il ne faut que 50 litres tous les 3 mois. Un même succès en Colombie, en Équateur, en Espagne et au Portugal où son procédé est utilisé pour les cultures en serres ou dans les programmes de reforestation. “Les agriculteurs, qui connaissent les coûts de production, sont les plus intéressés, car ils voient immédiatement les économies d’eau qu’ils vont faire avec notre produit.” Silos de Agua est très bon marché puisque le sac de 25 kilos pour un hectare ne coûte que 400 euros et dure 10 ans. Autre avantage, l’eau solide se transporte facilement, ce qui est très pratique pour les lieux difficiles d’accès, que ce soit à dos de mule ou en hélicoptère. Les grandes sociétés agricoles mexicaines commencent à s’habituer à cette nouvelle technologie et ont de plus en plus souvent un stock d’eau solide au cas où les pluies cesseraient avant la récolte. C’est également un produit idéal pour arrêter les incendies. En déposant à même le sol des sacs d’eau solide, les feux rencontrent une masse d’humidité qui ne s’évapore pas, ils s’éteignent d’eux-mêmes sans mettre en danger la vie des pompiers. Le rêve de Sergio Rico serait bien sûr de convaincre le ministre de l’Agriculture du Mexique de lancer une campagne d’information et d’assistance technique pour permettre aux zones les plus touchées par le changement climatique d’optimiser l’usage de l’eau de pluie. Il aimerait voir sa technologie au service des paysans mexicains les plus démunis. Pour l’heure, il ne recueille que des applaudissements, des diplômes et de bonnes paroles. Nominé pour le Prix mondial de l’eau en 2011 par le Stockholm International Water Institute, Silos de Agua espère bien remporter la palme en 2012. Ce serait alors le coup de pouce nécessaire pour une application mondiale.
Cheick Amadou Dia
Merci Cheick Amadou Dia pour ces deux très bons articles (sur une seule page !).
Pour ajouter aux alternatives concernant les sacs plastiques :
1° il faut rester vigilant sur la notion de biodégradabilité : les oxo-biodégradable contiennent un additif chimique (qui permet de casser la chaîne moléculaire au bout de 2 ou 3 années)… qui ne fait pas l’unanimité de la communauté scientifique. Les vrais bioplastiques accaparent des terres cultivables, et ce n’est pas vraiment le moment, surtout au Mali… bref c’est pas facile !
2° il ne faut pas oublier tout ce qui a été consommé ces dernières années et qui va rester dans la nature au moins 400 ans : ce sont des milliers de tonnes et c’est un fléau pour nos enfants, même si nous arrêtions aujourd’hui les sacs-plastiques ! Il faut là-aussi investir dans des solutions, comme celles expérimentées au Tchad, au Niger, et au Mali à Moti … et un nouveau projet est en cours pour Ségou … mais il faut le faire à bien plus grande échelle : ces solutions consistent à ramasser tous ces milliards de sacs-plastiques et à les compresser ou les enfermer dans des pavés, qui peuvent être utilisés pour paver les rues. Voir des reportages sur ces expériences ici : http://mali-pense.net/-No-Manani-.html
Souhaitons-nous bonne chance !
Comments are closed.