Interdiction de pêche sur le fleuve Niger à Markala : La décision impopulaire du préfet de Ségou attise la tension entre les communautés

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Depuis belle lurette, la pêche est pratiquée sur le fleuve Niger à Markala. Les pêcheurs par hameçon qui sont majoritairement des fonctionnaires à la retraite, font la pêche à côté des Bozos sans la moindre incidence. Aujourd’hui, cette cohabitation est devenue tendue et un risque d’affrontement direct plane sur la stabilité sociale à Markala suite à l’instauration par le préfet de Ségou de l’interdiction temporaire des activités de pêche sur une partie du fleuve. La tension autour de la décision appelée ‘’la mise en défens’’ prend de plus en plus de l’ampleur. Ce, entre la jeunesse et le chef d’antenne de pêche.

 

De 2020 à nos jours, les pêcheurs par hameçon se trouvent violentés, verbalement par des injures, intimidations parfois agressions physiques. Des comportements qui n’existaient pas autrefois dans la Cité ouvrière de Markala. Un doigt accusateur est pointé sur Mamadou Bagayogo, chef d’antenne de pêche du service des Eaux et Forêts à Markala.

Selon une source proche du dossier, celui-ci donne des convocations à celui qui se permet d’aller pêcher avec l’hameçon. Un comportement qui prend son essence dans la complicité de M.Bagayogo avec les Bozos selon notre source. Est-ce difficile de le dire ? Mais ce qui est sûr, même si le fleuve était mis en défens, les pêcheurs par hameçon faisaient leur activité. Mais avec l’arrivée de M.Bagayogo, tout a changé et celui-ci  laisse entendre que la mise en défens ne se faisait pas correctement.

« Le jour de la pêche collective, la quantité de poissons n’atteint pas le résultat souhaité », dit M.Bagayogo. Partant de ce constat, l’on a voulu appliquer les textes de la mise en défens de la pêche sur le fleuve depuis 2015. Une première application a été faite en 2019 avec toutes les difficultés du monde. « Certains estiment être discriminés au détriment d’autres. C’est ainsi que l’on a décidé d’interdire toute activité de pêche sur le fleuve », martèle M.Bagayogo.

Selon les explications de Bakaye Tioro, chef des Bozos, une minorité veut accaparer le peu de poissons qui se trouvent dans le fleuve au détriment de la majorité. Les textes interdisent toutes activités de pêche sur le fleuve durant les 4 mois de mise en défens du fleuve de l’activité de pêche.

Cette mesure qui ne concernait que la pêche de grande envergure élargit son champ d’application. Désormais, les pêcheurs à la ligne sont contraints de prendre congé des eaux du fleuve Niger. Les contrevenants s’exposent à des sanctions allant du retrait des équipements jusqu’à l’emprisonnement d’une semaine à 3 mois. Ce n’est nullement les pêcheurs qui démentiront.

En effet, les contrevenants Lassine Traoré, Daouda Kéita et Madou Traoré ont versé chacun la somme de 30000FCFA pour éviter un séjour entre les quatre murs de la gendarmerie suite à une convocation du chef d’antenne de pêche, Mamadou Bagayogo, agent des Eaux et Forêts.

Ceux qui sont interdits d’accès au fleuve laissent entendre le contraire. Ils estiment que M.Bagaoyogo est son équipe nouent une collaboration farouche avec les Bozos. Ce qui l’a poussé à prendre des décisions qui mettent en porte-à-faux la population de Markala.  Pour preuve, malgré l’existence de ce texte qui d’ailleurs était méconnu par les bozos et les pêcheurs par hameçon, les deux parties exerçaient leur activité sans gêne et sans conflit. N’est-il pas préférable de laisser le texte qui divise surtout lorsque l’on sait que sa non-   application ne pose pas de problème ?

Décidément, l’équipe de Bagayogo a préféré diviser pour mieux régner. Une option qui se trouve à la base du conflit entre les communautés qui cohabitaient ensemble depuis longtemps. Pis, M.Bagayogo laisse entendre que ceux qui se révoltent contre l’interdiction de la pêche par hameçon ne disposent pas d’autorisation montrant qu’ils sont pêcheurs. Est-ce une méconnaissance de cette activité ou par ce qu’on cherche à argumenter sa forfaiture ? Telles sont des questions qui taraudent les esprits surtout lorsque l’on sait que la pêche par hameçon est individuelle. Chaque pêcheur par hameçon cherche de quoi approvisionner sa famille en poisson.

Risque d’affrontement

La défense de leur activité contre vents et marrées est l’engagement des pêcheurs par hameçon. Regroupés, les pêcheurs par hameçon affirment avoir acheté des noix de cola pour supplier les Bozos et le chef de village. Ceux-ci ont refusé l’exercice de leur activité sur le fleuve qui se trouve être un droit. Partant de cela, les pêcheurs par hameçon entendent user toutes les voies administratives avant toute utilisation de la force car la pêche par hameçon est un droit et se faisait même avant l’indépendance. « Nous n’accepterons pas que ce droit soit saboté par qui que ce soit. Si les Bozos sont des fils de ce pays, nous ne sommes pas des étrangers ici à Markala. Je suis né et j’ai grandi à Markala. Si la mise en défens du fleuve est une tradition, la pêche par hameçon durant toute l’année est aussi une tradition qui se faisait depuis bien avant l’indépendance. Ce n’est pas aujourd’hui qu’on doit usurper ce droit » renchérit Soumana Sarré, fonctionnaire à la retraite.

« Presque toutes les autorités se trouvent complices, même le chef de village de Kirango » nous confesse une source.   C’est ainsi qu’un appel a été lancé aux autorités administratives pour prendre des mesures avant un éventuel affrontement physique entre les deux protagonistes.  D’ores et déjà, Tinèma Coulibaly chef de quartier de Kirango appelle au calme et à la retenue.

La mesure d’interdiction date du 1er janvier 2022.  Pour une durée 4 mois. Mais le bras de fer entre ces pêcheurs et le Conseil de pêche remonte à 2020. En effet, certains pêcheurs reprochent au Conseil son incapacité de faire respecter sa décision par tous les exploitants du fleuve. Notons que le Conseil de pêche est composé des agents des services des Eaux et Forêts, la mairie, la Sous-préfecture et les représentants des pêcheurs.

Au regard de tout ce qui précède, l’on peut dire, sans risque de se tromper, que la mise en défens de la pêche sur le fleuve ne fait pas l’unanimité. Elle est instaurée par une décision du préfet de Ségou dont l’exécution est attribuée au chef d’antenne de pêche, Mamadou Bagayogo.

Cet agent, qui devient une épine dans le pied de la population, ignore que la pêche à la ligne n’est pas une nouveauté dans cette ville. Elle est vieille de plus d’une cinquantaine d’années.  Interdire cette pratique, qui absorbe d’une manière ou d’une autre le taux de chômage, fait grincer des dents. A cela, il faut ajouter le risque pour le chef d’antenne de se faire piéger par un Conseil de pêche qui ne veut rien entendre sous prétexte que le Niger est son patrimoine.

Le ministre de l’Elevage et de la Pêche doit prendre à bras-le-corps ce dossier pour éviter une tension sociale.  Déjà, certains pêcheurs à la ligne accusent les Somonos d’être à la solde du Conseil de pêche et du chef d’antenne de pêche. Certaines victimes de Mamadou Bagayogo décident de braver la mesure d’interdiction à partir du 30 avril 2022 si les autorités ne prennent pas leur responsabilité.

Bissidi SIMPARA

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