Infos ou intox ? La saison des migrants

0

Le gouvernement malien a déjà fixé les dates des prochaines élections générales 2012.  Et dans la perspective de la présidentielle, les cérémonies de signature d’alliances et de plateformes électoralistes ou politiques sont devenues monnaies courantes. Et, surtout, elles sont hautement médiatisées et changent la presse de la tragédie du nord. A cette occasion donc, le menu fretin a jeté son dévolu sur les gros poissons (à moins que ce ne soit le contraire). Lesquels sont peu, si l’on en croit les observateurs. Il y a bien sûr Dioncounda Traoré qui boxe pour la première fois dans cette catégorie, candidat du parti qui compte le plus d’élus à tous les niveaux, et qui contrôle le plus de collectivités décentralisées (mairies, conseils de cercle, assemblées régionales). Puis, il y a également Soumaïla Cissé, finaliste malheureux de 2002 et dont le parti, l’Urd, a pris un poids certain depuis sa création; les spécialistes le classent en deuxième position derrière son géniteur Adema-Pasj. Ensuite, il y a Ibrahim Boubacar Kéita, arrivé en troisième position de la présidentielle de 2002 qu’il aurait gagnée, selon ses militants, si des tripatouillages ne l’avaient pas mis à l’écart. Son parti, le Rpm, a beaucoup dépéri depuis ce ratage et ne compte plus que les fidèles parmi les fidèles. Pour compléter le quatuor de tête, il y a Modibo Sidibé. Candidat indépendant, plusieurs fois ministre, l’ancien chef de  gouvernement a été rejoint par plusieurs cadres et responsables de partis politiques, et pas des moindres, venus l’aider à succéder à son désormais ancien mentor, Amadou Toumani Touré.

A ce quatuor le plus souvent cité par les observateurs partisans, les sondeurs commandités, les journalistes militants et autres pronostiqueurs intéressés, on peut adjoindre quelques candidats qui pourraient créer la surprise et faire sensation. Notamment Housséni Amion Guindo de la Codem et Soumana Sako qui portera les couleurs de la Cnas. Si le premier compte sur le soutien de quatorze autres partis unis pour la République (Pur), le second entend compter sur ses propres forces.

Mais rien n’est perdu car la saison des migrations n’est pas encore terminée; et dans les prochains jours et semaines, les candidats seront très certainement courtisés et même rejoints par des transfuges et pèlerins politiques qui, offre de services en main, monnayeront leur adhésion, convaincus de pouvoir peser dans la balance électorale.
En occultant certains faits: l’adhésion d’un parti politique à un candidat quelconque est avant tout l’œuvre des états-majors partisans. Il n’est pas sûr que ceux-ci aient eu besoin de consulter leurs bases respectives avant de se décider. Aussi, il est tout à fait sûr que nombreux seront les militants à ne pas suivre les mots d’ordre et consignes de vote. L’élection présidentielle se joue également au faciès, à la tête du client, à ses alliances au niveau local, à la portée réelle de ses promesses électorales, à la quantité de thé, sucre, riz, seaux,  savon, nattes, ballons, t-shirts et autres colifichets. En 2002 et 2007, ATT a été élu parce qu’il avait raconté le plus de bobards.

De plus, il a été élu en grande partie par les militants de l’Adema qui avait son propre candidat.
Un des entremetteurs de cette union adultérine est Soumeylou Boubèye Maïga. Le vice-président de l’Adema «serait en voie de déposer sa candidature» à la prochaine élection présidentielle, annonce L’Indépendant (06 mars). Le quotidien craint ainsi le retour des démons de la division dans la Ruche. De fait, les démons de la division ont toujours possédé les «Abeilles ». En 1994, un membre fondateur du Pasj, Mamadou Lamine Traoré, écœuré, quitte pour fonder le Miria. Six ans plus tard, en 2000, c’est Ibrahim Boubacar Kéita, tout autant remonté contre ses camarades et déçu de ne pas être considéré comme le candidat naturel à la succession d’Alpha Oumar Konaré, qui claque la porte.

En 2002, trahi par les siens, Soumaïla Cissé s’éloigne de tant de félonie et de coups bas. Récemment, dans un discours préventif et prémonitoire, le président candidat de l’Adema a rappelé ses regrettables épisodes de la vie de son parti. En oubliant (volontairement ?) qu’à la faveur de cette élection présidentielle de 2012, un certain Zoumana Mory Coulibaly et d’autres cadres de l’Adema ont préféré aller paître dans les pâturages abondants et verdoyants de Modibo Sidibé, et que le parti ne manquera pas de ressentir ces défections. Il aurait également «oublié» de mentionner que Soumeylou Boubèye Maïga ne fait jamais rien comme le veut la direction de son parti. Pour preuve, en 2002, son parti investit officiellement Soumaïla Cissé sorti vainqueur des primaires, Soumeylou Boubèye Maïga bat campagne et vote pour ATT. En 2007, sa direction lui demande de battre campagne et de voter pour ATT, il refuse et vote pour lui-même.
Que fera-t-il en 2012 ? Ce qu’il a toujours fait, pardi ! En homme politique responsable, averti, avisé et lucide, il ne roulera jamais que pour ses intérêts et ne sortira jamais de son rôle. Sans jamais cesser d’assumer, comme il l’a toujours fait, la conséquence de ses actes. Et personne ne mangera son piment dans sa bouche.
Cheick TANDINA

Commentaires via Facebook :