Le début de la semaine dernière, ils étaient 152 migrants maliens, dont 12 femmes et 7 enfants, qui ont été rapatriés de la Libye où ils étaient allés chercher fortune dans le pays de l’ex Guide libyen Mouammar Kadhafi. Malheureusement pour eux, leurs rêves se sont brisés en chemin, telles des vagues, sur les côtes libyennes, et l’aventure s’est achevée par un retour, dit-on, volontaire au pays natal.
Un retour à la limite « forcé » qui a été rendu possible grâce à l’appui de l’Organisation internationale de la Migration (OIM) qui a mis les moyens à la disposition de nos compatriotes qui se sont résolus de rentrer au bercail tant la situation était intenable pour eux à cause des brimades, des persécutions ou encore des violences qu’ils subissaient dans ce pays d’accueil.
Mais cette arrivée en masse s’avère, tout compte fait, comme une délivrance pour ces aventuriers qui n’ont trouvé que l’enfer, souffrance, violence et humiliation dans ce qu’ils considéraient comme un eldorado. Mais, avec le recul, ces rapatriés peuvent s’estimer heureux d’avoir pu regagner le bercail sains et saufs, quand on sait le sort peu enviable qui est celui de nombreux migrants maliens et d’autres nationalités africaines dont certains finissent par perdre la vie dans les sables brulants du désert ou dans les eaux tumultueuses de la Méditerranée. Sans oublier les tracasseries en tous genres, les rackets, les exactions et autres déchéances qu’ils vivent sur ces chemins de calvaire qu’ils ont empruntés pour leur plus grand malheur.
Bien souvent, la réalité est plus cruelle qu’ils ne l’imaginaient, et ils ne réalisent malheureusement cela que lorsqu’ils se retrouvent au milieu de la traversée.
Cela dit, ce n’est pas la première fois que des Maliens sont rapatriés du pays de Mouammar Kadhafi.
L’on se rappelle qu’en décembre 2016, 159 de nos compatriotes avaient été tirés de ce qui était devenu pour eux un enfer, par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) qui les avait conduit par vol affrété jusqu’à Bamako.
Parmi eux se trouvaient plusieurs mineurs, dont trois non accompagnés, ainsi que des malades. Une quarantaine d’entre eux était détenue dans les prisons libyennes.
Plus près de nous, en mars 2017, la même organisation, qui est aussi à l’initiative de la précédente l’opération, avait réussi, en collaboration avec le ministère en charge des Maliens de l’extérieur, à extirper et convoyer dans la capitale, 163 autres de nos compatriotes qui étaient arrivés dans le dénuement total. C’est dire si de plus en plus de Maliens s’engagent sur les chemins de l’exil, à la recherche d’un mieux-être. Mais il faudrait que nos frères « candidats » à l’immigration comprennent une fois pour toutes que la Libye n’est pas et n’est plus un eldorado, et qu’ils évitent d’aller se jeter dans la gueule du loup. D’autant plus que le pays du défunt guide libyen est actuellement déchiré, ravagé par la guerre entre factions rivales armées qui se disputent le pouvoir, depuis la chute du Guide de la Jamahiriya. Il est donc inutile d’aller tenter le diable dans son antre, à moins de nourrir des intentions suicidaires. Conscientes et convaincues que tous ces exemples tristes et dramatiques risquent de ne pas être suffisants pour décourager d’autres candidats à l’immigration. C’est pourquoi, il y a lieu pour nos autorités de médiatiser davantage de telles opérations de rapatriement, à travers des témoignages poignants, émouvants et bouleversants de revenants, pour aider la jeunesse malienne à prendre suffisamment conscience des dangers qu’elle encourt en se lançant sur le chemin de l’immigration clandestine. Au-delà, cela pose la lancinante question du chômage et de l’employabilité des jeunes. Car c’est malheureux de le dire, la politique de l’emploi, en Afrique, ne sert pas toujours les intérêts de la jeunesse. C’est un défi qui se pose à tous les gouvernants, parce que c’est aussi et surtout à cause de cela que bien des jeunes, en désespoir de cause, se laissent tenter par ce genre d’aventures. Il appartient donc à nos gouvernants (beaucoup de choses ont été faites sous le président IBK avec son programme de 200 000 emplois) de relever ce défi, en trouvant des solutions innovantes pour retenir les bras valides au pays.
Toutefois, la jeunesse malienne se doit aussi d’être un peu plus imaginative et entreprenante dans sa quête d’un mieux-être. Car quand on regarde un peu les sommes d’argent qui sont englouties dans ces voyages périlleux, et qui, au finish, ne font qu’enrichir des passeurs véreux, l’on se rend compte que dans bien des cas, cela aurait pu suffire à entreprendre des activités génératrices de revenus au pays. Toutes choses qui auraient pu permettre à certains de ces candidats à l’immigration de se faire une place, si petite soit-elle, au soleil, en s’évitant bien des désillusions. Il ne faut donc pas minimiser ce qu’on a chez soi. Il faut plutôt chercher à mieux exploiter le potentiel qui sommeille en nous.
En tout état de cause, il est impératif que l’on en arrive à une prise de conscience de la jeunesse, et que les mentalités changent. Car si autrefois, aller à l’aventure pouvait être synonyme de perspective de fortune, aujourd’hui, le secteur, eu égard à l’ampleur du phénomène, semble en revanche être saturé et même en voie d’obstruction. En témoignent les nombreuses tragédies qui en découlent et qui sont pratiquement devenues le lot quotidien de ces âmes en errance, dans le monde entier. Quoi qu’il en soit, il est temps de procéder à une véritable introspection et de prendre le taureau par les cornes, car le phénomène de plus en plus grandissant de la migration traduit un véritable malaise social. Il appartient aux politiques d’y trouver solution, mais il revient aussi aux citoyens d’éviter de se mettre dans des situations difficiles où ils perdent quelquefois toute leur dignité. En tout cas, il est bien connu, l’adage selon lequel « on n’est jamais mieux que chez soi ». Et ce ne sont pas ces rapatriés maliens de Libye qui diront le contraire ; eux qui jurent désormais, la main sur le cœur, qu’on ne les reprendra plus jamais sur ces routes de l’enfer. Pourvu que cela serve de leçon.
Par Mohamed D. DIAWARA