Maliens rapatriés et abandonnés à leur sort

0

Depuis 20 jours, des Maliens rapatriés de la Libye et de la Côte d’Ivoire vivent au Parc des expositions de Bamako, route de l’aéroport. Comment sont-ils logés ? Comment sont-ils- nourris et soignés ? Pour avoir une réponse à ces questions, nous avons décidé de faire un tour au Parc des expositions. A notre arrivée, nous avons trouvé des rapatriés souriants. Nous nous sommes réjouis, les croyant dans de bonnes conditions de vie. Très vite, nous nous rendrons compte que cette joie apparente était plutôt due à la chute de Laurent Gbagbo.

En vérité, les rapatriés de Libye semblaient soulagés de voir un journaliste à qui se confier. Selon eux, depuis leur arrivée au Parc des expositions, ils sont abandonnés à leur sort. Un porte-parole des rapatriés, monsieur Oyé Ag Amedoun, nous dira que depuis leur arrivée, ils se débrouillent pour se nourrir à leurs propres frais. Il n’y a aucun médecin pour s’occuper des malades. Selon notre interlocuteur, tout le monde s’entasse sous des tentes où il fait très chaud et où on dort à même le sol. A la question de savoir s’ils n’avaient pas reçu les nattes que nous avons tous vues à la télé, monsieur Oyé répond qu’un véhicule rempli de nattes et de cartons de savons s’est présenté dans la cour du Parc mais n’a servi à rien: “Ils nous ont remis une natte pour 6 personnes; ensuite, ils sont repartis avec le gros des nattes et des savons.”.

Au moment où nous échangions avec Oyé, notre attention fut attirée par un attroupement. C’est le président du Haut Conseil des Collectivités, Oumarou Ag Ibrahim, qui venait faire un don de 500 000 FCFA aux rapatriés qui, aussitôt, se mirent à partager l’argent entre eux. “Depuis notre arrivée, nous vivons grâce aux dons que nous font de bonnes volontés; de ‘l’Etat, nous ne recevons rien!”, se désole le rapatrié Bamba Amadou. Ce dernier affirme que lui et ses compagnons ont été mieux traités par la Croix-Rouge Tunisienne, lors de leur transit dans ce pays, que dans leur propre patrie:” En Tunisie, chacun avait un matelas, une tente, de quoi manger, un médecin”.

Sur les murs du Parc, nous avons lu cette inscription: “Nous voulons nos bagages ou rien!”. Les rapatriés nous expliqueront avoir voyagé avec leurs bagages jusqu’en Tunisie. A l’embarquement pour le Mali, ils ont enregistré leurs bagages. Arrivés en Bamako, ils seront surpris de voir les bagages manquer à l’appel. “Nous sommes là depuis un mois, nous n’avons pas reçu nos bagages et les responsables du ministère des Maliens de l’extérieur ne sont plus revenu nous voir après nous avoir promis de nous rendre nos effets”, déclare un rapatrié qui soutient, les larmes aux yeux, que tous les biens qu’il a pu sortir de Libye se trouvent dans ses valises disparues.

Les rapatriés de Côte d’Ivoire, après leur petite fête spontanée liée à l’annonce de la chute du président Gbagbo, sont venus nous exprimer leur colère: manque de toilettes, de médecins, de nourriture… Madame Ongoiba, une sexagénaire qui a perdu son mari pendant la guerre ivoirienne et que nous avons croisée en compagnie de ses huit enfants, déclare vivre dans la plus grande précarité.“Face au manque de médecins, nous faisons de l’automédication; j’ai acheté un produit pour les yeux de ma fille avec les vendeurs de médicaments de la rue: sa maladie s’est aggravée.”, se lamente l’infortunée vieille dame qui en appelle à la solidarité nationale. Mais dans tout cela, que fait donc l’Etat du Mali ?

Abdoulaye Guindo

Commentaires via Facebook :