Profitant de l”interview qu”il a accordée à notre confrère "Jeune Afrique" dans son édition n° 2418 du 13 au 19 mai 2007, sur l”élection de Nicolas Sarkozy comme président de la République française, le président du Mali, Amadou Toumani Touré a rectifié le tir à propos de l”immigration des Maliens vers l”Europe notamment la France.
"Je n”ai jamais pris le billet de qui que ce soit pour qu”il se retrouve ici en France". Cette petite phrase lâchée par le président Amadou Toumani Touré en France, il y a quelques mois, à la faveur de l”installation de l”Office de Radiodiffusion Télévision du Mali (ORTM) sur la bande KU permettant aux Maliens de la diaspora de capter la chaîne nationale, avait provoqué un tollé général chez nos compatriotes de l”extérieur ainsi que chez leurs parents vivant ici parmi nous. Cette bourde du président ATT qui n”est pas tombée dans des oreilles de sourd, a été comprise par les Maliens de l”extérieur et leurs parents résidant au pays comme une fuite de responsabilité de la part du président de la République. Depuis lors, ils nourrissaient une certaine aversion vis-à-vis du chef de l”Etat.
Selon des sources concordantes, les propos de ATT ont engendré un drame social dans la région de Kayes où le taux de l”immigration est très forte, car les enfants qui sont tentés d”embrasser l”aventure ne bénéficient plus de l”aide de leurs parents. Conséquence : ils sont des laissés pour compte, livrés au vagabondage (alcool, drogue et prostitution) avec son corollaire d”effondrement des liens sociaux.
Ayant certainement eu écho du tort causé par ses propos, le président ATT a saisi l”opportunité qui lui a été offerte par notre confrère "Jeune Afrique" dans son édition n° 2418 du 13 au 19 mai 2007 de rectifier le tir à la faveur d”une interview sur l”élection de Nicolas Sarkozy, "la bête noire des immigrés". A la question de savoir s”il ne craint pas des reconduites massives des sans-papiers maliens à la frontière, ATT répond à notre confrère de RFI, Christophe Boisbouvier qui a recueilli ses propos pour "Jeune Afrique" en ces termes : "Pour le moment, non, vraiment non. Sans doute Monsieur Sarkozy a-t-il donné son avis, sans détour, sur les problèmes de migration, mais il a insisté sur un mot : "concerté". Et il a bien précisé que la réponse était le co-développement. La migration n”est pas seulement un problème, pour un pays comme le Mali, c”est aussi une chance. Il va donc falloir s”asseoir et parler. Cette concertation qu”il propose me paraît une bonne approche. Moi, j”ai une préoccupation, c”est la défense de mes compatriotes".
Et comme pour prouver à suffisance son engagement dans ce combat, ATT se glorifie d”avoir été le premier à mettre en place un ministère des Maliens de l”extérieur. "Je m”efforce d”être réaliste. Lorsque mes compatriotes ont raison, très bien. Lorsqu”ils ont des problèmes, je les défends autant que je peux. Et tant que le dialogue tient, tout va bien" a soutenu le Général-Président.
Sachant bien qu”il n”y a pas un accord de réadmission des sans-papiers maliens de France, ATT fonde son espoir de voir un climat apaisé entre le Mali et la France à propos de l”immigration sur le co-développement prôné par Nicolas Sarkozy. Son "nous allons faire plus" lors de son dernier passage à Bamako en mai 2006, est pris par ATT pour de l”argent content en ces temps-ci.
Pour le président du Mali, il faut tenir compte de deux facteurs pour ne pas tomber dans le pessimisme de voir drainer dans les charters, les Africains en général et les Maliens en particulier avec Nicolas Sarkozy comme président de la République française. Le premier, selon lui, est que Sarkozy était à un poste "très exposé" à savoir le ministère de l”Intérieur au moment de ses prises de position "assez radicales" sur la question de l”immigration. "Aujourd”hui, il est président de la République, son rôle est forcément différent" affirme -t-il. Avant d”ajouter que la France a des relations particulières avec le continent africain et qu”il est sûr que Nicolas Sarkozy en tiendra compte. "En tant que chef d”Etat, il doit être un rassembleur. Je suis convaincu qu”il n”aura pas le même comportement, qu”il ne prendra pas les mêmes décisions que lorsqu”il était ministre de l”Intérieur".
Le second facteur pour avoir confiance en Sarkozy, selon ATT, réside dans son premier message qu”il a adressé au peuple français et au monde entier en tant que président. "C”était un discours humain et ouvert. Il a évoqué notre continent et nos soucis les plus essentiels. Il a replacé l”Afrique dans le débat. Nous ne pouvons que nous en réjouir" a indiqué le président malien.
Il ne reste qu”à laisser le temps au temps pour voir si Nicolas Sarkozy va changer sa politique sur l”épineuse question de l”immigration.
En tout cas, quant à ATT, il a rectifié le tir sur la question qui le mettait à mal avec son peuple surtout la diaspora.
Alassane DIARRA
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