Histoire d’une grande magouille : Rebondissement dans un scandale « enterré »

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Les magouilles qui ont entouré le chantier de construction de « Les Halles » de Bamako ne finissent pas de révéler des secrets plus effarants les uns que les autres. Après Ibrahima N’Diaye et Yacouba Diallo, le patron de la Société Ivoirienne de Concept et de Gestion, Mohamed Saidi a été victime d’un autre escroc plus redoutable que les précités : Maître Madina Dème Coulibaly, Notaire de son état. Histoire d’une rocambolesque magouille.

Halles Houphouét Boigny de Bamako

Dans le cadre du marché de la construction des « halles Houphouet Boigny », la société SICG, dirigée par M. Saïdi Mohamed, entre en affaire avec le Cabinet de Maitre Madina Dème Coulibaly. Il s’agissait d’accomplir les formalités juridiques pour le compte de la société SICG Mali.
En effet, la SICG est une société à Responsabilité Limitée dont le capital social s’élève à deux millions de FCFA ayant son siège à Hamdallaye ACI 2000.
C’est donc dans l’établissement des différents actes et l’accomplissement de ses missions en tant que conseil et secrétaire juridique que Maitre Madina Dème aurait commis des indélicatesses criardes, que les avocats de Saïdi ont qualifié de faux en écriture, de faux et usage de faux et d’escroquerie.
Les Faits
Nous sommes en décembre et le 11 de l’année 2001.
Maitre Madina Dème adresse une réquisition au chef du bureau de la conservation de la propriété et des droits fonciers sur « l’état des droits réels grevant le titre foncier n° 22227 du district de Bamako.
Déférant à cette réquisition, celui-ci a répondu par la négative, tout en indiquant que le titre foncier en question est libre de toutes charges et se prête bien à l’inscription des droits réels immobiliers.
A cette date, un contrat de bail à construction avait été conclu entre la Mairie du District de Bamako prise en la personne du Maire à l’époque, Ibrahim N’Diaye et la société Ivoirienne de concept et de gestion. C’était le 27 avril 2000.
Dans ledit contrat, en son article 6 dispose : « En application des dispositions de l’article 28 de la loi n°99-040 du 10 août régissant la promotion immobilière, le présent bail à construction confère au Preneur un droit réel immobilier sur les constructions édifiées par lui, pendant la durée du bail. Ces droits peuvent être librement hypothéqués par le preneur ».
Ainsi donc, ces droits réels immobiliers devraient sans aucune réserve, faire l’objet d’inscription auprès des services compétents.
Or, jusqu’au 09 avril 2008, le cabinet Maître Madina Dème, n’avait inscrit aucun droit découlant dudit bail, préalablement.
Supercherie donc. Ces droits appartenant à la société de M. Saïdi  n’ont jamais été ni inscrits ni immatriculés jusqu’à la date du 07 juin où Maitre Benaba Segoba découvre le hic.
Pourtant, deux conventions de prêts ont été établies par le même cabinet Dème entre la SICG-Habitat et la Banque de l’habitat du Mali portant respectivement sur les sommes de cinq milliards deux cent soixante deux millions cinq cent trente quatre mille quatre cent quatorze (5262534414) FCFA ; et sept milliards cinq cent millions (75 00 000 000) FCFA.
Ces conventions, dans leurs dispositions relatives aux garanties, prescrivent des inscriptions hypothécaires au profit de la BHM-SA sur les droits réels des fonds bâtis (appartement à la S.I.C.G /Mali) toujours relativement au titre foncier n°22 227 du district de Bamako.
Ainsi, et tel que l’on pouvait s’y attendre, deux certificats d’inscription devaient régulièrement être établis au profit de la BHM-SA par Maître Madina DEME COULIBALY pour garantir les prêts ainsi consentis par cette banque. Et ce fut d’ailleurs le cas.
Cependant, le hic  c’est que les actes en question se sont plus tard révélé irréguliers d’autant plus que les droits réels (c’est-à-dire les droits réels sur les fonds bâtis appartenant à la SICG /Côte d’Ivoire) sur lesquels ils devaient porter, n’avaient jamais fait l’objet d’une quelconque inscription préalablement et n’ont jamais pu faire l’objet d’une quelconque cession de SICG /Cote d’Ivoire à SICG/Mali, ce qui aurait du être le cas.
De ce fait, ces actes comportent par voie de conséquence, des énonciations fausses parce que n’ayant jamais existées.
Le premier certificat avec , à l’entête la mention«  Ministère des Finances et  du commerce» en date du 3 Juin 2004 est relatif à l’inscription d’une hypothèque sur les droits réels  des fonds bâtis du TF  22 227 du District de Bamako pour garantir un prêt portant sur la somme de cinq  milliards deux cent soixante deux millions cinq cent trente quatre mille quatre cent quatorze  (5 .262.534.414) francs CFA.
Quant au second certificat d’inscription avec, à l’entête «  Ministère des domaines de l’Etat et de Affaires Foncières  il est relatif à l’inscription d’une hypothèque sur les droits réels des fonds  bâtis sur le TF n° 22 227, en date du 10 juin 2004 pour garantir un prêt de la BHM/SA d’un montant de Deux Milliards Deux Cent trente sept Millions trente soixante cinq Mille cinq cent quatre vingt six(2.237.465.586) francs CFA.
En claire donc, la fausseté découle du fait que la plaignante n’a jamais signé une convention relative au montant de deux milliards deux cent trente sept millions quatre cent soixante cinq  Mille cinq cent quatre vingt six (2.237.465.586) francs CFA.
Et d’ailleurs à ce propos, Maître Madina DEME n’a pas hésité à affirmer dans sa correspondance en date du 18 mai 2007 que « l’administration domaniale a procédé à l’inscription requise et délivrée des certificats y afférents, toute chose qui vous ont permis d’obtenir de la BHM/SA un prêt de 75 milliards de Francs CFA remboursable sur vingt quatre mois avec un taux de 1% ».
Or, est-il besoin d’indiquer qu’en matière d’hypothèque conventionnelle, il ne saurait y avoir d’inscription en absence de convention de compte courant signé des deux parties, selon les spécialistes du droit.
Il est également important de souligner que les supports des deux certificats, inscrits à la même période, le sont sur des documents d’origine différente ; l’un à entête du Ministre des Finances et l’autre celui des Domaines de l’Etat et des affaires foncières.
Dès lors et compte tenu de toute ces remarques, le doute inévitable et légitime s’installe par rapport à la moralité même de ces actes dont Maître DEME est unique auteur.
Pire encore, ces inscriptions , contrairement à leur contenu (hypothèque n’affecte en rien au titre appartenant à l’Etat) sont certainement faite sur le TF n°22 227 puisque, encore à cette date, ni Maître Madina DEME, ni aucun autre notaire n’avait inscrit les droits réels de la SICG/Côte d’Ivoire conférés par le bail à construction en son article 6 et l’article 28 de la loi n°99-040 du 10 août 1999 régissant la promotion immobilière, sachant que depuis sa réquisition du 11 décembre 2001 aucune charge ne grevait le dit titre.

Un état de fait confirmé par une correspondance du chef du bureau des domaines et du cadastre du district de Bamako, sous référence n°0000234 du 26 avril 2007 en ces termes :
« … mais l’inscription du droit réel sur la parcelle de terrain objet du TF 22 227 de district de Bamako a été établi au profit de la Mairie du District.
C’est donc seulement le 07juin 2007, après que SICG Mali se soit rendu compte de l’existence de l’immatriculation, que les droits réels sur les fonds bâtis de SICG/Côte d’Ivoire ont fait l’objet d’une inscription sur le titre foncier 22 227 du district de Bamako à la diligence cette fois ci, d’un autre notaire en l’occurrence Maître SOGOBA Benaba.
C’est donc à la suite de cela que la SICG/Mali, s’est rendue compte des supercheries de celle contre qui elle a porté plainte à travers de célèbres avocats dont Me Jacques Verges, Jean Charles Tchikaya et d’autres maliens.
L’ensemble de ces insuffisances d’ordres juridiques est attesté par une première réquisition du 17juin 2007 de Maître SOGOBA, par laquelle il a sollicité du conservateur, «  tous les renseignements sur l’authenticité et la conformité du titre foncier n°22 227 du district de Bamako et les charges le grevant »
Pour toute réponse, il a été informé que c’est seulement à cette date que les droits réels viennent d’être inscrits : « … 07 juin 2007 : bail à construction pour un montant de 9 700 000 000 francs CFA. »
Une deuxième réquisition du 08 juin 2007 de Maître SOGOBA a sollicité du même conservateur l’octroi de « tous les renseignements sur le titre foncier n°22 227 inséré au livre foncier du district de Bamako »
La même réponse lui a été fournie à savoir : « le 07 juin 2007 : bail à construction pour un montant 9 700 000 000 francs CFA ».
Aux termes de l’article 102 de la loi n°01-079 du 29 août 2001 portant du code pénal en République du Mali : « constitue le crime de faux, toute altération de la vérité de nature à porter préjudice à autrui et commise dans un écrit avec intention coupable :
–    Soit en dénaturant la substance ou les circonstances d’un acte ;
–    Soit en n’y écrivant des conventions autres que celles tracées ou dictées par les Parties… »
Ainsi donc, compte tenu de l’exposé des faits ci-dessus spécifiés il s’avère que les inscriptions établies par Maître DEME tombent sous le coup de la loi pénale dès lors qu’elles dénaturent fondamentalement, les circonstances dans lesquelles certains actes sont intervenus mais également elles écrivent des conventions autres que celles tracées ou dictées par les Parties en cause.
A titre illustratif, l’inscription relative à la garantie de la somme de 237 465 586 de francs CFA ne repose sur aucune convention, elle ne figure que sur le seul certificat y afférent.
En outre Maître DEME COULIBALY a fait supporter à des droits réels non inscrits, non immatriculés, non identifiés, des hypothèques au profit de la BHM SA et ceci est confirmé par la sommation-interpellative en date du 18 juin 2007 faite à la diligence de Maître Kaba KEÏTA, huissier de justice à Bamako au chef du bureau des domaines et du cadastre du district de Bamako dont la secrétaire a répondu en ces termes :
« 1- bail à construction inscrit le 07 juin 2007 dont le certificat a été remis à Maître Benaba SOGOBA pour le compte de le SICG ;
2- hypothèque de 5 262 534 414 francs CFA inscrite le 03 juin 2004 suivant l’acte notarié de Maître Madina DEME sur les droits réels des fonds bâtis.
Hypothèque de 2 237 486 586 francs CFA inscrite le 10 juin 2004 suivant acte notarié de Maître Madina DEME notaire sur les droits réels des fonds bâtis du TF 22 227 .»
La première réquisition faite par les soins de Maître Madina DEME le 11 décembre 2001 ne pouvait avoir d’autre finalité que de se renseigner sur la situation réelle du titre foncier 22 227 du district de Bamako pour pouvoir agir en toute connaissance de cause.
Or, Maître Madina DEME savait bien que le bail à construction emporte des droits réels immobiliers au profit du preneur uniquement,  SICG/Côte d’Ivoire et, pour leurs consolidations et pour des cessions éventuelles, ils devraient faire l’objet d’une inscription et immatriculation préalablement, conformément à l’article 119 de l’acte uniforme de l’OHADA portant sur les suretés.
Et de cette remarque d’ordre légal, il importe donc de constater qu’une hypothèque en la matière, ne peut être inscrite sur des droits qui ne sont pas en eux-mêmes ni inscrits, ni même cédés à des tiers.
Etant donné que les certificats d’inscription des 03 et 10 juin 2004 dont a fait état Maître Madina DEME COULIBALY et conférant des hypothèques à la BHM-SA sur les droits réels appartenant prétendument à la SICG/Mali, ne sont autres que de faux documents.
Il l’est d’autant plus qu’aucune hypothèque ne peut, en aucune façon, être supportée par un droit réel qui n’est pas encore « né ».
L’origine de propriété des droits réels à SICG/Mali n’étant pas établie en juin 2004.
Dès lors, il s’avère donc curieux de leur faire supporter des inscriptions hypothécaires alors même que les droits réels ne pouvaient appartenir à la SICG/Mali sans une cession préalable de la part de SICG/Côte d’Ivoire et seulement après inscription de ceux-ci sur le LIVRE FONCIER DU DISTRICT DE BAMAKO.
Maître Madina DEME ne pouvait par ailleurs ignorer, que les hypothèques qu’elle a faites inscrire ne pouvaient porter que sur la partie non cédée et clairement définie de droits réels concédés à la SICG/Mali par la SICG/Côte d’Ivoire en vertu du bail à construction.
Or, ces certificats d’inscription d’hypothèque transmis par Me Madina DEME ne mentionnent aucune trace de cession de droits réels à des acquéreurs malgré une commercialisation avérée d’espaces pour 14 milliards.
C’est donc à cause de ces faux documents grossoyés par Maître Madina DEME que la BHM-SA a pu tenter des exécutions forcées contre la SICG/Mali et en outre en faire cas dans plusieurs procédures judiciaires.
De tout ce qui précède, les dispositions des articles 103 et 104 du Code Pénal qui prévoit et punissent le crime de faux et usage de faux s’appliquent au cas d’espèce, nous explique un expert en droit.
L’affaire portée devant les tribunaux, avait été « enterrée » par certains magistrats pour des raisons non encore élucidées.
Afin de rentrer dans ses droits, le patron de la SICG, M. Saidi Jamal, selon nos sources aurait saisi le nouveau ministre de la justice Malick Coulibaly, connu pour son professionnalisme et son intégrité morale.
Dans nos prochaines éditions, nous expliquerons les aspects escroquerie de cette rocambolesque affaire.
A suivre
Abdoulaye Niangaly

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