Des citoyens maliens usant des 95 et 96 du Titre X de la Constitution ainsi que les articles 15 et 16 de la loi n°97-001 du 13 janvier 1997 fixant la composition et les règles de fonctionnement de la Haute Cour de Justice ainsi que la procédure suivie devant elle, décident de solliciter les députés qui sont leurs représentants élus, d’user d’une prérogative constitutionnelle que le peuple leur a souverainement confiée qui est de mettre en accusation le Président de la République Ibrahim Boubacar KEITA devant la Haute Cour de Justice pour haute trahison. L’initiative de la Plateforme « Plateforme anté, A bana-Touche pas à ma constitution ! » est une initiative citoyenne, républicaine et constitutionnelle. Analyse.
La haute trahison est une infraction qui résulte de l’article 95 de la Constitution ainsi libellé : « La Haute Cour de Justice est compétente pour juger le Président de la République et les Ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée Nationale pour haute trahison ou en raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’Etat.
La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des 2/3 des députés composant l’Assemblée Nationale. La Haute Cour de Justice est liée par la définition des crimes et délits et par la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits compris dans la poursuite ».
L’article 95 créé en effet trois types d’infractions dont peuvent être coupables le Président de la République et les ministres : la « haute trahison », les « faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions », le « complot contre la sûreté de l’Etat ». Ces trois types d’infractions peuvent se réduire à deux catégories principales : la « haute trahison » d’une part, les crimes et délits d’autre part.
Donc la mise en accusation du Président de la République devant la Haute Cour de Justice peut être engagée sur l’un ou l’autre de ces motifs ou même les deux à la fois.
L’absence de définition de la haute trahison n’est pas l’absence de haute trahison
Si a priori les infractions relevant du code pénal ne soulèvent pas de difficultés particulières d’autant qu’aux termes de la Constitution, elles lient la Haute Cour de Justice ainsi que les peines subséquentes, en revanche il n’en est rien en ce qui concerne le crime de haute trahison qui n’est pas définie de manière expresse.
Cette absence de définition montre bien que la haute trahison est une infraction à caractère politico-pénale. Elle a pour effet de laisser la liberté à l’Assemblée nationale ainsi qu’à la Haute Cour de Justice elle-même de lui donner un contenu.
Ainsi, il appartient à l’Assemblée nationale d’apprécier et de qualifier les faits constitutifs de haute trahison à travers le vote de la mise en accusation du Président de la République à la majorité des 2/3 des députés. Sur la base de cette mise en accusation, c’est la Haute Cour de Justice qui décide par jugement, de la condamnation éventuelle du Président de la République.
L’absence de définition expresse de la haute trahison ne pouvant aucunement signifier l’inapplicabilité de la haute trahison, on peut considérer qu’il y a haute trahison lorsque le Président de la République a commis des actes constitutifs d’un manquement grave aux devoirs de sa charge et au respect de la Constitution, lorsqu’il s’est rendu coupable de violations graves des principes qui régissent la Constitution ou d’atteintes aux intérêts supérieurs de la nation.
La procédure de la « Plateforme anté A bana » plus régulière que celle initiée par IBK lui-même contre le Président ATT
On se souvient de ce 27 décembre 2013 lorsque l’opinion nationale et internationale apprenait avec stupeur et indignation ce communiqué du gouvernement qui ouvrait ainsi : « L’Assemblée nationale, siège de la Haute Cour de Justice, vient d’être saisie par la lettre n°285/PG-CS du 18 décembre 2013, d’une dénonciation des faits susceptibles d’être retenus contre Amadou Toumani Touré, ancien Président de la République pour haute trahison ».
Ce pamphlet, le plus controversé de l’histoire du Mali, égrenait une demi-douzaine de chefs d’accusation retenus contre ATT à qui on reprochait entre autres, d’avoir facilité la pénétration et l’installation des forces étrangères sur le territoire national… ; avoir participé à une entreprise de démoralisation de l’armée caractérisée… ; avoir détruit ou détérioré volontairement un outil de défense nationale ; avoir laissé détruire, soustraire ou enlever, en tout ou partie, des objets, matériels, documents ou renseignements ; et s’être opposé à la circulation du matériel de guerre.
Inutile d’insister outre mesure sur le caractère ridicule de ces chefs d’accusation retenus contre le Président ATT, maladroitement rangés au titre de la haute trahison, mais qui relevaient en fait au regard de l’article 95 de la Constitution, de la catégorie des crimes et délits tirés du Code pénal. Comme affirmé dans ce communiqué, on était naturellement en droit de s’attendre à l’énumération de faits retenus uniquement au titre de la haute trahison. Cette attente était d’autant plus légitime que l’article 95 de la Constitution fait bien la différence entre la haute trahison et les faits qualifiés de crimes et délit : « La Haute Cour de Justice est compétente pour juger le Président de la République …pour haute trahison ou en raison des faits qualifiés de crimes ou délits…». Plutôt que d’énumérer comme annoncé, des faits de haute trahison, c’est à une exhibition d’infractions pénales qu’on a eu droit, c’est à dire des faits prévus et réprimés par le code pénal (articles 33 al 2 ,34 al 2; 34 al 3, 34 al 3-c, 34 al 3-d ,39 al 2). Si la haute trahison en tant que notion d’ordre politique non légalement définie peut se doubler d’infractions pénales, elle ne peut se réduire à ces seules infractions, au risque de mépriser la distinction opérée par l’article 95 de la Constitution.
Ce n’est d’ailleurs pas la seule irrégularité qui entachait la procédure de haute trahison initiée par le Président IBK contre le Président ATT. Irrégulière dans le fond, la procédure du Président IBK qui visait ATT l’était également dans la forme au regard de la Constitution.
Elle résultait de l’intrusion inconstitutionnelle du gouvernement qui en était à l’origine et de la Cour suprême qui a initié la lettre n°285/PG-CS du 18 décembre 2013 à l’origine des poursuites du Président ATT. Le gouvernement lui ayant demandé que des poursuites pour haute trahison soient engagées contre ATT, le parquet de la Cour suprême qui avait ainsi sollicité la Haute Cour de Justice à travers l’Assemblée nationale en vue d’engager lesdites poursuites.
Cependant, il ne découle nullement pas de la logique de l’article 95 que la procédure de mise en accusation du Président de la République soit d’initiative gouvernementale. Au contraire, l’article 95 précise bien que la mise en accusation devant la Haute cour de justice est faite par l’Assemblée nationale. La Constitution ne dit pas que l’Assemblée nationale doit être préalablement saisie par le gouvernement afin de statuer en quelque sorte sur son injonction ou celle de la Cour suprême.
Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement ? Imagine-t-on un instant l’exécutif constitué essentiellement du Président devenir en même temps son initiateur ! C’est totalement anachronique et constitutionnellement bancal. IBK a fini par l’apprendre à ses dépens lorsque son opération matériellement et formellement inconstitutionnelle de mise en accusation du Président ATT démissionnaire de surcroit au moment des faits, s’est totalement dégonflée comme on pouvait s’y attendre.
Quelles conséquences pour le Président IBK ?
Sans se prononcer sur le sort qui sera réservé à l’initiative qu’entend engager la « « Plateforme anté A bana » contre le Président IBK lui-même, on peut d’ores et déjà afficher la certitude sur sa régularité constitutionnelle. Des citoyens maliens usant des 95 et 96 du Titre X de la Constitution ainsi que les articles 15 et 16 de la loi n°97-001 du 13 janvier 1997 fixant la composition et les règles de fonctionnement de la Haute Cour de Justice ainsi que la procédure suivie devant elle, décident de solliciter les députés qui sont leurs représentants élus, d’user d’une prérogative constitutionnelle que le peuple leur a souverainement confiée qui est de mettre en accusation le Président de la République Ibrahim Boubacar KEITA devant la Haute Cour de Justice pour haute trahison. L’initiative de la Plateforme est une initiative citoyenne, républicaine et constitutionnelle.
Il appartiendra au Président de l’Assemblée nationale auquel la sollicitation devrait être adressée, de saisir les députés de la question. Ces derniers doivent voter à la majorité des 2/3 une résolution de mise en accusation du Président de la République pour haute trahison avec ipso facto comme effet la levée d’immunité du Président de la République Ibrahim Boubacar KEITA. La Haute Cour de Justice va ainsi décider à la majorité absolue des voix de la culpabilité du Président de la République Ibrahim Boubacar KEITA et de la peine qui lui sera applicable. La culpabilité éventuelle du Président de la République et sa condamnation entraîneront sa démission d’office de ses fonctions.
Dr Brahima FOMBA
Chargé de Cours à Université des Sciences
Juridiques et Politiques de Bamako(USJP)
Un prof d’université n’est pas un prof de la pagaille. Loin s’en faut .les Hayatistes n’ont ils pas du chemin devant eux?
Pour la République
C’est là qu’ on constate que la démocratie africaine ou malienne n’est pas encore mûre.
Comment imaginer le président de l’ assemblée nationale beau père du fils préféré du président IBRAHIM BOUBACAR KEITA,qui sait qu’il n’est là que grâce à la famille présidentielle,engager une procédure contre le président de la république ?
C’est là aussi qu’ on s’aperçoit que la population n’a comme seul recours la rue pour pousser le président à changer de trajectoire ou à démissionner,nos parlements étant des chambres d’enregistrement.
Le président et ses thuriféraires qui clament haut et fort que la loi même si elle est dure,elle doit être appliquée doivent essayer d’appliquer cette maxime sur eux,s’ils espèrent être crédibles aux yeux du peuple.
La procédure engagée par le mouvement ANTÈ A BANNA est parfaitement conforme à la constitution en vigueur.
Que les thuriféraires se défendent sur le terrain du droit au lieu de faire pression au président de l’ assemblée nationale à refuser de recevoir les représentants du mouvement ou à empêcher la marche initiée à s’exécuter.
Cette initiative du mouvement,partagée par un nombre élevé d’associations et de partis politiques ,est une énorme pavée lancée dans le marigot du régime IBRAHIM BOUBACAR KEITA.
La preuve aussi de l’échec de sa présidence.
Comments are closed.