- A- Aspect social et médical:
L’albinisme continue dêtre profondément mal compris, aussi bien sur le plan social que médical. Lapparence physique des personnes souffrant dalbinisme est souvent lobjet de croyances et de mythes erronés découlant de la superstition, ce qui favorise leur marginalisation et leur exclusion sociale, qui, à leur tour, donnent lieu à toutes sortes de stigmatisations et de discriminations :
- Les femmes qui donnent naissance à des enfants atteints dalbinisme sont souvent répudiées par leurs maris et leurs familles, qui ignorent que les deux parents doivent être porteurs du gène pour le transmettre à leurs enfants. Par ailleurs, les enfants souffrant dalbinisme sont souvent abandonnés par leurs parents ou, plus rarement, victimes dinfanticide, à cause de lapparence de leur peau, des déficiences dont ils souffrent parfois en raison de leur maladie, et de la croyance selon laquelle ils porteraient malheur.
- Les préjugés fortement ancrés auxquels sont confrontés dans le monde entier les personnes souffrant dalbinisme les empêchent davoir accès à des soins de santé adaptés, aux services sociaux, à une protection juridique et à la réparation en cas de violation de leurs droits.
- Les formes de discrimination auxquelles doivent faire face les personnes atteintes dalbinisme sont interdépendantes. Leur droit à léducation, par exemple, est affecté par leur déficience visuelle, qui les contraint parfois à abandonner lécole. Un niveau déducation faible peut à son tour déboucher sur le chômage et entraver leur droit à un niveau de vie approprié, les reléguant ainsi souvent à la pauvreté.
En vertu du droit de ne pas être victime de discrimination, les États sont tenus dadopter des stratégies densemble pour veiller à ce que les personnes souffrant dalbinisme bénéficient de la même protection au titre de la loi et dans la pratique.
La pire expression de la discrimination à lencontre des personnes vivant avec lalbinisme est leur déshumanisation, qui est à lorigine des terribles agressions physiques dont elles sont victimes. Comme on les prend parfois pour des êtres magiques ou des esprits, on les mutile, quand on ne les tue pas pour utiliser des parties de leur corps dans des rituels de sorcellerie. Ces agressions font de nombreuses victimes ; celles qui survivent ainsi que leurs familles subissent de graves traumatismes.
Les personnes atteintes dalbinisme méritent quon protège leur droit à la vie et à la sécurité, ainsi que leur droit de ne pas être soumis à la torture et aux mauvais traitements. Les campagnes déducation et de sensibilisation peuvent contribuer à la lutte contre la superstition et la stigmatisation associées à lalbinisme.
Des centaines dagressions rituelles commises à lencontre de personnes souffrant dalbinisme, en particulier des enfants, ont été signalées dans différents pays, alors que de nombreux autres cas ne sont souvent ni documentés, ni signalés en raison de lostracisme dont souffrent les victimes et leurs familles, ainsi que de la nature secrète de la sorcellerie. Souvent, cette violence na pour écho que le silence et lindifférence de la société, et ne donne que rarement lieu à des enquêtes ou à des poursuites judiciaires contre les auteurs.
Limpunité dont jouissent les auteurs de massacres et dagressions commis à lencontre de personnes atteintes dalbinisme est inquiétante. Même lorsque des enquêtes et des poursuites judiciaires sont entreprises, les condamnations restent rares. Les victimes se heurtent à des difficultés considérables lorsquelles engagent une procédure en justice, car elles craignent de nouvelles représailles ou une stigmatisation accrue. En labsence dun accès efficace et abordable à la justice, les personnes souffrant dalbinisme ne peuvent pas faire valoir leurs droits ni sopposer aux violations des droits de lhomme dont elles sont victimes.
Lobligation faite à lÉtat de criminaliser, dexaminer et de poursuivre les auteurs de tels crimes est dautant plus indispensable que les personnes atteintes dalbinisme sont vulnérables. Si les États sengageaient dans ce sens, les survivants et leurs familles pourraient avoir accès à des recours, des réparations et une réhabilitation, notamment à des soins médicaux et psychologiques.
- B- Aspect juridico-institutionnel
Jusquà récemment, les mécanismes internationaux et régionaux de défense des droits de lhomme navaient répondu que de manière sporadique aux besoins des personnes vivant avec lalbinisme. Depuis juin 2013, en raison de la recrudescence des agressions commises à leur encontre, ces organes ont davantage centré leur attention sur les personnes atteintes dalbinisme.
En 2013 et 2014, le Conseil des droits de lHomme des Nations unies et la Commission africaine des droits de lhomme et des peuples ont adopté des résolutions (les résolutions 23/13, 24/33, 26/10 du Conseil des droits de lHomme et la résolution 263 de la Commission africaine) qui réclamaient la prévention des agressions et de la discrimination à lencontre des personnes atteintes dalbinisme. Le 18 décembre 2014, lAssemblée générale adoptait la résolution 69/170, proclamant, à compter de 2015, le 13 juin Journée mondiale de sensibilisation à lalbinisme.
Par ailleurs, en réponse à lappel lancé par des organisations de la société civile recommandant de considérer les personnes souffrant dalbinisme comme un groupe à part entière ayant des besoins spécifiques nécessitant une attention particulière, le Conseil des droits de lhomme des Nations Unies a adopté le 26 mars 2015 la résolution 28/L.10 instituant le mandat dexpert indépendant sur la question des droits fondamentaux des personnes atteintes dalbinisme.
Ce nouveau mandat important contribuera à faire entendre la voix des personnes atteintes dalbinisme et à les protéger grâce à une meilleure sensibilisation, à la présentation au Conseil des droits de lhomme dun rapport annuel portant sur des préoccupations spécifiques, et à la prestation de services de conseil et dassistance technique aux États membres, afin que ces derniers puissent mettre en uvre des mesures spécifiques en faveur de la protection sur leur territoire des personnes atteintes dalbinisme.
Cest dans le cadre de la mise en uvre des recommandations du Conseil des droits de lHomme que la division des droits de lHomme de la Minusma en tant que Représentation du Haut-commissariat des Nations unies aux droits de lhomme au Mali organise chaque année depuis 2015 la célébration de la journée en collaboration avec les organisations de défense et de promotion des droits des personnes atteintes dalbinisme notamment SOS Albinos, la fondation Salif Keita, et avec laccompagnement des autorités nationales dont le Ministère des affaires religieuses et du culte et le ministère en charge du développement social et de la solidarité. Elle uvre également pour laccompagnement des organisations de promotion et de défense des droits des personnes atteintes dalbinisme