Sur instruction du Premier ministre Moussa Mara, la direction régionale de la Police du District a, le 29 septembre dernier, mené avec succès une opération de déguerpissement des détaillants qui encombraient les allées et couloirs des halles de Bamako. Cette opération avait pour but de pousser ces occupants anarchiques à libérer les passages dans ce marché construit à coups de milliards par l’Etat pour occuper les magasins qui leur ont été attribués sans frais. Manifestement cet effort déployé par les autorités du pays pour faire enfin des Halles Félix Houphouët Boigny de Bamako un marché digne de ce nom comme l’ont souhaité ses concepteurs n’est pas du goût des pêcheurs en eau trouble, à savoir des responsables de la mairie du District à travers, notamment l’Administrateur des marchés de la mairie de la commune VI, Ibrahim Samaké.
L’intéressé, soutenu semble-t-il par sa hiérarchie s’apprêterait à installer un container au profit d’une opératrice économique (dont nous tairons le nom pour l’instant) là où la police a fait déguerpir quelques jours plus tôt de pauvres hères qui gagnaient à peine le prix des condiments.
Naturellement cet acte flagrant à la limite de l’injustice voire de la crapulerie n’a pas manqué de susciter l’indignation, la colère et la révolte de nombreux usagers des Halles, notamment des déguerpis et de M. Biré Diarra, propriétaire et gérant des Etablissements Diarra. Ces derniers ont porté le 3 octobre l’affaire devant le Tribunal de première instance de la Commune VI. Tenues également au courant, les autorités policières attendent de pied ferme les intéressés se réservant le droit d’intervenir le cas échéant.
La plainte au tribunal de première instance
Cette pièce d’huissier a permis à Biré Diarra de porter plainte le 3 octobre au Tribunal de première instance de Bamako contre les sieurs Samaké et les personnes pour lesquelles il a ordonné l’installation d’un container de 40 pieds. Mais auparavant, M. Samaké était venu auprès de M. Diarra pour qu’il accepte l’installation dudit container celui-ci a évidemment refusé en argumentant d’abord sur le caractère illicite de l’acte, ensuite sur le fait qu’il est hors de question d’accepter que d’autres personnes, apparemment riches puissent, du jour au lendemain, venir reprendre la place de pauvres personnes que l’on a fait légalement déguerpir. Mieux, M. Diarra interpella M. Sanogo, l’Administrateur des marchés de la commune VI et supérieur hiérarchique de Samaké, pour lui dire qu’il est hors de question d’installer un container en lieu et place des déguerpis qui avaient leurs kiosques. A sa grande satisfaction, l’Administrateur des marchés de la commune VI lui avait indiqué que l’ordre ne venait pas de lui.
Souleymane Ouattara, un déguerpi de l’opération policière du 29 septembre témoigne :
“Je suis la situation de très près, car j’avais deux kiosques sur le lieu convoité. La police nous a déguerpis parce que nous étions installés au regard des toilettes et nous barrions le passage piéton. Aussi, je n’admettrais pour rien au monde que moi j’accepte de me désinstaller en obéissant aux injonctions du Gouvernement et que d’autres viennent reprendre ma place. Je me battrais sur le plan légal. Le cas échéant, le ferais tout, même par la force, pour l’empêcher. D’ailleurs Bintou Traoré qui est dans la même situation que moi, sommes déjà intervenus sur Radio Nièta… ”
Mme Fanta Dembélé, première vice-présidente de la fédération des commerçants contribuables des Halles de Bamako
“Comme tous les membres de ma fédération, je suis foncièrement opposée à l’implantation de ce container en lieu et place des kiosques que la décision gouvernementale a fait désinstaller le 29 septembre. Parmi les propriétaires, dont les kiosques ont été démolis, il n’y a que des chefs de famille qui ont tout perdu. Faut-il désinstaller des pauvres types pour réinstaller des gens qui ont les moyens ? Nous ne serons jamais d’accord. Nous sommes en tout cas prêts à nous battre et nous allons le faire par des moyens de droit. Jusqu’à preuve du contraire, nous pensons que nul n’est au-dessus de la loi au Mali. C’est pourquoi, nous allons voir si de simples citoyens peuvent empiéter sur une décision gouvernementale. Donc, nous sommes confiants aux autorités et nous nous fions au bon Dieu !… “.
A.B.HAIDARA