Le Marché Rose de Bamako communément appelé le Grand marché est l’une des destinations les plus prisées en ce moment où les préparatifs de la Fête de Tabaski et de la rentrée des classes battent leur plein. Ce marché grouille de monde à la grande satisfaction des promoteurs de parking privé. Les Bamakois et même des étrangers y affluent. L’effervescence est à son comble. Les allées habituellement encombrées, sont carrément obstruées (voir article de F Napho dans cette même page).
De peur de se retrouver bloqués dans les embouteillages, nombre de visiteurs du marché préfèrent faire leurs courses à moto. Une aubaine pour les gérants de parking qui ont doublé les frais de stationnement compte tenu de l’affluence. Cette pratique ne date pas d’aujourd’hui. A l’approche de chaque grande fête, les gérants des parkings remettent ça. Mais cette année, il semble qu’ils soient allés un peu trop loin.
D’habitude, ce sont les gérants de parking qui courent vers les clients. Mais depuis quelques jours, la donne a changé. Ce sont plutôt les clients qui supplient les gérants de trouver une place pour leurs engins. Avec une grosse sueur qui perle sur son front, Mamadou a accueilli notre équipe de reportage. « Quel est le prix du parking ? », avons nous demandé. « Deux cent francs ! Pas un kopeck de moins !», répond le jeune homme. A la question de savoir les raisons qui motivent cette hausse soudaine et vertigineuse des frais de stationnement, le jeune répond avec un ton narquois : « Il y a eu cette hausse du prix parce qu’on est à la recherche de notre prix de mouton et de basin ».
Non loin, son collègue attribuera cette augmentation à une recrudescence du banditisme, en expliquant que c’est une période faste pour les voleurs qui élargissent leur rang en de pareille circonstance. « Pour éviter les cas de vol, nous sommes obligés d’augmenter le nombre de personnel et du coup le prix du parking », a-il-précisé, avant de soutenir qu’il paie également de l’argent aux forces de l’ordre en ces moments d’abondance. Une allégation vigoureusement démentie par les policiers. « Nous n’avons rien à voir avec la gestion des parkings », a tranché un policier de la compagnie de circulation routière (CCR).
Devant l’Assemblée nationale, se trouve un parking. Ici, le prix aurait également doublé. Mais le chef du parking n’admet pas cette hausse. « Mon prix reste le même », se contente-t-il de dire. Surpris par cette affirmation, un motocycliste qui était venu récupérer son engin portera la contradiction avec véhémence.
Au niveau de la Sotelma-Malitel, le constat est le même. Yaya Diarra est gérant du parking installé ici. Il explique cette inflation des frais par d’importantes pertes que lui et ses collègues auraient subies dans le passé. « Le marché accueille trop de monde en cette veille de fête. Pendant que certains viennent pour des achats, d’autres s’adonnent au vol. A la moindre occasion. Pour les éviter, nous augmentons le nombre de gardiens. De trois en temps ordinaire, nous sommes à sept gardiens aujourd’hui. C’est pourquoi nous doublons le prix pour pouvoir payer ce personnel » a-t-il expliqué.
En face de l’Institut national des arts, se trouve un autre parking. Là également, les frais de stationnement ont doublé et les mêmes motifs sont invoqués qu’ailleurs pour justifier la hausse. « Dans le passé, notre patron a été arrêté à deux reprises à cause de vols de motos dans notre parking. Par mesure de prudence, on a augmenté le nombre de gardien et du coup le prix a grimpé », a assuré un gérant. Un argument battu en brèche par son patron qui a assuré que le nombre de ses employés n’a pas augmenté. « J’ai doublé le prix sans véritablement le vouloir. C’est par solidarité avec les autres propriétaires de parking que je l’ai fait », a-t-il dit, avant d’ajouter qu’il n’est pas le seul dans cette situation.
I.S vient de se garer devant la Sotelma. Le jeune homme ne décolère pas contre l’augmentation des frais de parking. « Rien ne peut justifier cette augmentation. Le marché a toujours été rempli de voleurs. Seulement, les gens ici ont tendance à profiter de n’importe quelle occasion pour faire des grands profits. J’ai toujours été un client d’ici. Ce n’est pas parce qu’il y a une forte affluence dans la perspective de la fête qu’ils doivent se permettre de se comporter comme ça », s’indigne le jeune homme en colère.
« Si les gens cautionnent les prix actuels, il y a de fortes chances qu’ils ne reviennent pas à leur niveau normal même après la fête », s’inquiète pour sa une jeune femme, elle aussi venue confier sa moto au parking.
Quant au parking pour les véhicules, les frais de parking n’ont pas changé. Ils varient entre 200 et 250 Fcfa. Seydou est un gérant de parking auto. Il reconnaît qu’il envie les promoteurs de parking pour motos. « En ce moment peu de gens viennent au marché en voiture à cause des embouteillages. D’autres préfèrent emprunter les transports en commun. Du coup on n’a pas assez de clients », constate l’homme.
Aminata Dindi Sissoko