Le silence radio du gouvernement suite au dépôt du cahier de doléances du 4 mai 2014, en passant par l’Affaire Idrissa Hamidou Touré, la réforme de la justice version Bathily, sont autant de raisons qui courroucent le Sylima contre l’actuel ministre de la Justice, Mohamed Al Bathily. À la faveur d’une conférence de presse, le président du Syndicat libre de la magistrature, Adama Yoro Sidibé, entouré de plusieurs membres de son bureau, était jeudi dernier face à la presse à la Maison de la Presse du Mali.
Le Sylima n’y va pas par quatre chemins, il fustige l’imposture et la démagogie du ministre de la Justice. Lequel, selon ce syndicat, «n’est ni un ministre compétent, ni un partenaire loyal». Les raisons.
Pourquoi Bathily n’est pas un ministre compétent, respectueux des textes ?
Selon le président du Sylima, «Bathily n’a fait montre, à travers les actes qu’il a posés depuis qu’il est ministre de la Justice, d’être cet excellent juriste qu’il est réputé être». Mille exemples attestent cela, aux dires du président Diarra. Il cite, entre autres, le cas des décisions impulsives «qu’il a eu à prendre à l’encontre de leur collègue, substitut du Procureur en commune IV et qui ont été fort heureusement annulées par la Cour suprême». Sur ce dossier, estime-t-il, au plan procédural ainsi bien qu’au plan du fond de l’affaire, «beaucoup d’impairs ont été commis. Dans sa hâte d’en découdre avec le collègue, le respect de la forme n’était pas son souci. Visiblement, Bathily ne savait pas qu’il ne pouvait pas prendre de décision contre le magistrat sans aviser au préalable le Conseil supérieur de la magistrature».
Alors questions : est-ce par ignorance ? Est-ce par mépris des règles ? En tout cas, pour le président du Sylima, le projet de nomination et mutation des magistrats a été l’occasion de confirmer le peu de respect que Bathily a des nos textes. D’autant que, d’après lui, «Bathily a fait figurer sur un projet de mutation des magistrats siégeant au Conseil supérieur de la magistrature alors que la loi interdit cela, c’est à l’évidence un impair». Aussi, sur le même projet, poursuivra-t-il, on peut voir des magistrats promus sans respect des conditions de grades requis. «On voit également sur le même projet de décret qu’il propose la nomination des chefs de services centraux de l’administration, leurs adjoints et autres collaborateurs, alors que ces nominations sont du ressort du décret du Président de la République pris en Conseil des ministres, ou de l’arrêté du ministre de la Justice qu’est Bathily et non du Conseil supérieur de la magistrature», a déclaré Adama Yoro Diarra.
«Bathily n’est pas un partenaire loyal»
À en croire le président du Sylima, l’exercice favori de Bathily, et dans lequel il excelle, c’est «se déchaîner en cabales et intrigues contre les magistrats, la magistrature et les membres de la famille judicaire. Se croyant en position de force dans une conjoncture favorable, il gagne en assurance et en aplomb. Au plus haut de son élan et de son influence, il ignore superbement qu’on se doit de ne pas céder à certaines impulsions médiocres.»
Quid de la réforme de la justice version Bathily ? Selon le conférencier, les membres de la famille judicaire resteront unis en dépit des manœuvres de Bathily de vouloir les opposer. Car, en effet, la commission d’experts que Bathily a mise sur place à cette fin ne comprend que des avocats, à l’exclusion de toute autre composante de la famille judicaire. «Certes, les avocats désignés sont illustres ! Mais il s’agit hélas d’avocats dont on dit qu’ils sont assez proches du ministre de la Justice. On craint que les travaux qui sont menés dans un tel contexte aient un parfum de travaux dirigés», s’est indigné le président du Sylima.
Sur le fond, les syndicats estiment qu’une évaluation du niveau d’application des divers textes de droit positif et de mise en œuvre des dispositifs déjà existants est plus appropriée que de s’encombrer encore d’une réforme de plus.
Alhousseini TOURE