Forum de Bamako : l’Afrique entre chaos et émergence

0

« L’Afrique entre chaos et émergence », est le thème de la 16ème édition du Forum de Bamako. Si certains conférenciers ont écarté la notion de chaos, d’autres ont affirmé que l’Afrique est beaucoup plus proche du chaos que de l’émergence. Pour aller vers l’émergence, l’ambassadeur de France au Mali, Gilles Huberson et le Président de la Fondation Forum de Bamako, Abdoullah Coulibaly ont privilégié la croissance et le développement, alors que le Premier ministre, Modibo Kéita, a insisté sur la paix et la sécurité. Quant à l’ambassadeur de l’Union européenne au Mali, Alain Holleville, il a indiqué : « Parlons donc peut-être de métamorphose et d’innovation pour caractériser ce passage du chaos à l’émergence. »

Alain Holleville a précisé : « Parcourir la liste des intervenants et des thèmes prévus constitue une invitation à la curiosité et à la modestie. Je ne me proposerai donc certainement pas ici, en quelques instants, de chercher à traiter de tel ou tel des grands axes (sécurité, démographie, mobilité, ressources naturelles, intégration régionale, formation, jeunesse, place de la femme) du thème de cette année. Peut-être que le passage, la passerelle entre le chaos (vide, confusion, désordre) et l’émergence (apparition ou surgissement plus ou moins soudain) pourrait résider quelque part autour du concept de métamorphose, en gardant d’ailleurs à l’esprit, pour être optimiste et mobilisateur, que le premier sens (religieux ) du mot chaos est le vide ou la confusion existant « avant » la création et qu’il y a bien ensuite création pour qui y croit et le veut , création dont vous tous ici serez comme les maieuticiens. Parlons donc peut-être de métamorphose et d’innovation pour caractériser ce passage du chaos à l’émergence. »

 

Enjeux sécuritaires dans l’espace sahélo-saharien

 

Le professeur N’Dioro N’Diaye a traité le thème « Enjeux sécuritaires dans l’espace sahélo-saharien ». Elle a soutenu que le Sahel est devenu au fil des années un sanctuaire au potentiel crisogène  incommensurable. La chute du raïs libyen, a-t-elle ajouté, a accentué la fragilité de cette région. Elle a dispersé dans le désert des milliers d’hommes rompus aux tâches martiales et disposant d’un imposant arsenal de guerre.

Mme N’Dioro N’Diaye a indiqué : « Ce contexte singulier combiné à un nomadisme protéiforme dans le Sahel : écartelé entre brigands, extrémistes religieux, et migrants traditionnels en quête d’horizons plus cléments, a réactivé les vieilles velléités indépendantistes des Touaregs… La conjonction de ces trois types de migrants aux agendas forts antagonistes est symptomatique de toute la complexité de l’approche sécuritaire au Sahel.

La migration (autant l’émigration que l’immigration) demeure un facteur de risque dans le Sahel. Le conflit malien, outre une lointaine manifestation de sentiments régionalistes, est irrigué par une vague de migrants d’origine malienne ou étrangère (algérienne) qui y ont importé une idéologie salafiste. Iyad Ag Ghaly, et surtout Abdelmalek Droukdel, Mokhtar Belmokhtar, tous deux transfuges du Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat (GSPC) sont les symboles de cette infiltration des routes migratoires sahéliennes par les djihadistes.

Une pauvreté endémique accentuée par la crise  libyenne a poussé beaucoup de citoyens sahéliens  à fuir leurs pays, des milliers d’individus ont grossi, moins  par conviction que par survie, les rangs des troupes islamistes. »

La lutte contre le terrorisme, a-t-elle expliqué, doit s’inscrire ainsi dans une perspective de complémentarité. Pour N’Dioro N’Diaye, le renforcement de la stratégie nationale tant sur le plan sécuritaire, juridique que socioéconomique ne sera efficace que si elle s’inscrit dans un cadre régional coordonné qui prendra en compte les différentes stratégies des pays concernés. L’intensification de la coopération et la mise en place de mécanismes de concertation entre ses partenaires multilatéraux apparaît comme une priorité, a-t-elle ajouté.  Elle a déclaré que les menaces qui pèsent lourdement sur la stabilité de la zone sahélo-saharienne peuvent bien être maitrisées si  les pays en question sont animés de la volonté réelle et la détermination claire. Il est temps pour ces pays, a-t-elle souligné, de dépasser le stade de la coopération théorique  et inégalitaire pour  planifier et conduire ensemble des actions concrètes qui puissent convaincre. L’implication de l’ensemble des acteurs concernés est la condition sine qua non d’une réussite durable.

B.D.

Commentaires via Facebook :