Chaque journée internationale représente une occasion d’informer le public sur des thèmes liés à des enjeux majeurs comme les droits fondamentaux, le développement durable ou la santé. Ces journées sont aussi l’occasion pour le système des Nations Unies, les pouvoir publics et la société civile, d’organiser des activités de sensibilisation et de mobiliser des ressources. Et non des activités contrôlées par des politiciens cagoulards infiltrés dans la société civile pour transformer cette journée en une opportunité de propagande, voire de campagne électoraliste, par des largesses calculées, comme des cérémonies de dons de pagnes du 8 mars qui relèvent beaucoup plus du voyeurisme.
Des femmes agglutinées sous des tentes dressées sous le vent et la poussière, bravant la chaleur pour attendre leur tour de recevoir leurs pagnes d’un prétendu bienfaiteur, cela n’augure rien d”encourageant, eu égard au sens véritable de la Journée internationale consacrée ainsi aux femmes assistées et exposées comme des abeilles autour d’une ruche, pour la seule aura d’un homme. Cette image, pourtant une triste réalité quotidienne, c’est encore présentée le weekend dernier – et de façon maladroitement prononcée- dans un quartier de la commune IV de Bamako. Pourtant ces pagnes, provenant d’un don non innocent, sont destinés à fêter la Journée internationale de la Femme au thème combien évocateur : “Leadership féminin, pour un futur égalitaire dans le monde de la Covid-19”. Quel paradoxe !
Le généreux donateur qui a permis d’évacuer la montagne d’ordures qui assombrissait le décor des environs du cimetière de Lafiabougou, en insistant pour que son nom ne soit dévoilé, comme l’a précisé Mme le ministre de l’Environnement et de l’Assainissement, donne ainsi une leçon à tous les “thogo gnini” qui mobilisent une armada de télévisions, de journaux et de radios pour des dons dont la valeur, parfois, est de loin très inférieure aux charges de communication et d’organisation de l’événement. Que cherchent-ils alors !
Les motivations de ces politicards, couverts de cagoule de la société civile, sont à chercher ailleurs et les prochaines joutes électorales en diront assez long sur les raisons véritables de prétendues largesses enregistrées çà et là, avec un renfort de publicité.
C’est dire qu’il y a encore du chemin à faire pour que les femmes prennent conscience du sens véritable de la Journée internationale qui leur est consacrée. Journée qui, d’année en année, jalonne leurs combats pour le respect de leur dignité et de leurs droits. Les femmes doivent donc refuser de se laisser embrigader dans l’aspect festif du 8 mars, piégées par des dons de pagnes qui puent la manipulation à mille lieux.
Rappelons que la Journée internationale de la femme est née d’un mouvement syndical pour devenir un événement annuel reconnu par les Nations unies (Onu). En effet, en 1908, 15 000 femmes ont défilé dans la ville de New York pour réclamer des heures de travail plus courtes, de meilleurs salaires et le droit de vote. C’est le Parti socialiste américain qui a déclaré la première Journée nationale de la femme, un an plus tard.
Précisons que l’idée de rendre cette journée internationale, célébrée actuellement dans le monde entier le 8 mars, est venue d’une femme allemande appelée Clara Zetkin. Elle a suggéré l’idée en 1910, lors d’une conférence internationale des femmes travailleuses à Copenhague. Cent (100) femmes de 17 pays, présentes ce jour-là, ont accepté sa proposition à l’unanimité.
La Journée de la Femme a été célébrée pour la première fois en 1911, en Autriche, au Danemark, en Allemagne et en Suisse. Le centenaire a été célébré en 2011, donc en ce 8 mars 2021, nous célébrons la 110e Journée internationale de la femme.
Mais c’est en 1975 que les Nations unies ont commencé à célébrer officiellement cette journée en choisissant la date du 8 mars. Précisons qu’en défendant l’idée d’une Journée internationale de la Femme, Clara n’avait pas avancé de date fixe. Le premier thème adopté par les Nations unies (en 1996) était “Célébrer le passé, planifier l’avenir”.
C’est donc suite à un combat héroïque que les femmes ont décroché cette journée internationale qui doit être, pour elles, l’occasion d’affirmer leurs ambitions de se soustraire du masochisme trop pesant, dans lequel elles restent embrigadées. Mais se bousculer pour être filmées et montrées à la face du monde en train de recevoir des pagnes du 8 mars d’un ” généreux ” donateur, ne contribue pas à l’affirmation de cette ambition de conquête de leurs droits dont les plus élémentaires restent bafoués par ceux-là même qui les utilisent encore comme des escaliers, voire un ascenseur, pour assouvir leurs désirs de réussite politicienne.
C’est bon pour les femmes de retenir que par leur mobilisation elles peuvent engranger des victoires car la date du 8 mars le rappelle aisément. Dans l’ancienne Urss, elle a été officialisée pour la première fois, en 1917, en pleine première guerre mondiale, lorsque les femmes ont déclenché un grand mouvement de protestation. Quatre jours plus tard, les autorités ont abdiqué et leur ont accordé le droit de vote, alors qu’au départ, elles ne réclamaient que “du pain et la paix”.
Amadou Bamba NIANG
C’est ça le rôle du journaliste , réveiller le peuple !
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