Femmes, Jeunes et stabilité au Mali : Quelles interactions ?

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Au Mali, les femmes et les jeunes sont parmi les groupes les plus vulnérables. L’insécurité, les conflits armés et les difficultés économiques ont davantage aggravé leurs vulnérabilités. Violence, pauvreté, déplacement interne, discriminations sont leur lot quotidien.

 “Un jour de marché, des individus armés ont fait irruption dans notre village. Ils ont capturé mon père et l’ont tué. Nous avons pris la fuite pour nous réfugier à Djenné. Je ne dormais plus, je ne faisais plus confiance. J’ai reçu le soutien d’agents du projet Echo et d’une animatrice pour être moins anxieux. Maintenant je n’y pense plus quand je dors”, explique Hamadi, 12 ans et ressortissant de Djenné.

Selon un bilan produit par l’ONG Save the Children, “plus de 900 000 enfants au centre du Mali sont exposés à l’incertitude de la vie, aux risques d’abus, d’enlèvement, de travaux forcés, de mariage précoce ou de recrutement par des groupes des armés”.

Depuis juillet 2020, un programme d’éducation en situation d’urgence et pour la protection des enfants ainsi que la santé mentale et le soutien psychosocial a été lancé par Save the Children au Mali.

“Les jeunes et les femmes ont souvent des besoins spécifiques en matière de protection, d’accès aux soins de santé, d’éducation, d’emploi et de soutien psychosocial en période de crise. Il est important que les interventions humanitaires et de développement prennent en compte ces besoins spécifiques et veillent à ce que les jeunes et les femmes ne soient pas laissés pour compte”, rappelle le Comité international de la Croix-Rouge dans son rapport sur ses 75 ans d’existence.

Pour le CICR, malgré leurs vulnérabilités, les jeunes et les femmes peuvent également jouer un rôle crucial dans le renforcement de la résilience des communautés en période de crise. Leur participation active à la prise de décisions, à la mise en œuvre de solutions innovantes et à la mobilisation communautaire peut contribuer à renforcer la stabilité et la capacité de réponse face à la crise.

“Nous sommes encore exposés à l’exploitation, à la violence sexiste et à d’autres formes d’abus. Notre hantise est au niveau de comment protéger nos enfants. Il ne se passe pas de jours sans risque de viol, d’assassinat”, explique une habitante de Gao.

Pour Mme Sanogo Rita Diarra, leader communautaire, très engagée et membre de nombreuses organisations de jeunes et de femmes, “il faut que les associations s’investissent pour les jeunes et les femmes. Nous, nous nous battons pour les impliquer, mais, surtout pour les protéger. Les femmes et les jeunes restent dans les villages. Ils sont témoins et victimes de beaucoup de violences. Il est évident qu’un jour, on verra des cas de démences liées à ces violences. Surtout que chez nous, il n’y a aucune prise en charge psychologique”.

Pour elle, à Mopti, son combat aujourd’hui, est de faire en sorte que les femmes et les enfants sortent des situations de vulnérabilités à long terme. “Le mieux est de motiver les femmes elles-mêmes dans la gestion de ces crises”, dit-elle.

Pour Paul Ismaël Boro, président du parti Rassemblement des Maliens (Rama), “il faut sensibiliser les autorités coutumières pour qu’ils acceptent de mettre les femmes et les jeunes à l’abri de certaines violences ; sensibiliser l’Etat à son devoir régalien de protection des personnes les plus vulnérables”. Il faut, à son avis, former les membres des associations féminines pour répondre aux attentes des victimes et témoins de violence. “Pour les femmes et les enfants, aujourd’hui, il est important de construire des réseaux solides d’alerte précoce, de prise en charge des victimes, de faire attention aux victimes”.

Pour Coumba Bah, activiste et féministe, il faut une politique et une stratégie nationale de prise en charge. Oui, aujourd’hui, après 12 ans de crises, il y a beaucoup de victimes, beaucoup de personnes traumatisées. Il est temps que les pouvoirs publics prennent des mesures pour protéger les victimes des crises ou les entourer”.

La Constitution du Mali affirme que “Tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la région, la couleur, la langue, la race, l’ethnie, le sexe, la religion ou l’opinion politique est prohibée” (article 1er). Elle affirme dans ces articles 2 et 3 que la personne humaine est sacrée et inviolable. Tout individu a droit à la vie, à la liberté, à la sécurité et à l’intégrité de sa personne. L’Etat assure la protection de l’enfant contre le trafic de personnes et les infractions assimilées et contre l’enrôlement dans les groupes extrémistes violents.

 

Aminata Yattara

Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les droits humains au Mali et NED

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