Fana-Ségou-Markala : L’AMO séduit en dépit de quelques écueils

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Canam
Canam

Les 23 et 24 avril, l’Association des éditeurs de  presse privée (Assep), en partenariat avec la Canam, a organisé une caravane qui a sillonné les villes de Fana, Ségou et Markala, en 4ème région administrative du Mali. L’objectif de cette caravane était de permettre aux hommes de médias de s’enquérir des conditions de fonctionnement du mécanisme de l’AMO et recueillir les difficultés éventuelles qui devront normalement servir de boussole à la Canam, structure chargée de la mise en œuvre de l’AMO. Pour y parvenir, la vingtaine de caravaniers s’est fait le devoir, à chaque étape, d’échanger sans tabou avec les acteurs sur le terrain, notamment les adhérents, les responsables des pharmacies partenaires du mécanisme, ceux des structures sanitaires ainsi que les points focaux de l’AMO.

Fana: Situation globalement satisfaisante

Cette ville située à quelques 120 km de Bamako, sur la RN6, fut la première étape de la caravane. Nous sommes dans la matinée du jeudi 23 avril. La pharmacie officine Djènèba Maguiragua est conventionnée  depuis à peine un mois, mais son gérant, Dr  Abdoulaye Sylla, affiche déjà son optimisme. Dans l’attente de son premier payement,  notre interlocuteur avoue que tout se passe très bien dans l’ensemble. «Les ordonnances sont bien remplies, nous avons été bien formés et nous n’avons pas eu de problème depuis que nous avons adhéré à ce mécanisme», apprécie-t-il, tout en révélant que 3 sur 10 des clients de sa pharmacie sont affiliés à l’AMO. Il n’en souffre pas encore, mais le Dr Sylla affirme que le retard dans le paiement des factures, qu’une autre pharmacie de la ville connaitrait aussi, a une incidence sur leurs commandes avec les grossistes. Au sujet de la non-disponibilité de certains produits à laquelle des pharmacies font souvent face, Dr Abdoulaye dit avoir jusque-là trouvé la solution à cette équation. «Soit le client paie la commande à quelques 30% et nous passons la commande des médicaments qu’il n’a pas trouvés chez nous et on lui demande de repasser le lendemain, soit, si le produit n’est pas disponible, on peut le remplacer par un équivalent qu’on écrit entre parenthèses sur la fiche de soin et on met le coût dudit produit», explique-t-il.

Si l’on en croit   Dr Tégué Guindo, médecin-chef adjoint du Centre de santé de référence de Fana, l’AMO fonctionne bien, du moins pour  ce qui concerne sa structure. «Nous avons tous les médicaments disponibles dans notre pharmacie et la fréquentation commence à s’augmenter», souligne-t-il. Seul bémol qu’il note, c’est le retard accusé dans le paiement des factures au niveau de l’Institut national de prévoyance sociale (Inps) qui, aux dires du médecin, serait en train de prendre des dispositions pour faire face à cette situation. Toutefois, Traoré Maïmounata Yattara, une assurée que les caravaniers ont  rencontrée dans la cour du CSRéf, a un regard différent. Cette ménagère, déplacée de Gao, affirme avoir adhéré à l’AMO il y a environ 4 ans. La non-disponibilité de certains produits, aux dires de la bonne dame, obligerait des assurés à les acheter aux prix normaux dans les pharmacies non affiliées à l’AMO. D’où sa suggestion à ce qu’on approvisionne davantage celles qui sont conventionnées.

Si, pour sa part, Salif Traoré, point focal AMO, avoue qu’il y eut des réticences au départ, la situation, dit-il, est désormais tout autre. «Nous avons reçu, à un moment donné, plus de 200 demandes de non-adhésion au niveau de l’éducation, mais, aujourd’hui, nous constatons que beaucoup de ces enseignants sont en train de ré-adhérer», fait-il savoir, soulignant au passage l’impatience de certains par rapport à l’acquisition des cartes de membre, notamment pour les cas de ré-adhésion.

A Ségou, les chiffres parlent d’eux-mêmes

La capitale de la 4ème région administrative fut la deuxième étape de ce périple, dans l’après-midi du jeudi. Là-bas, les responsables de l’hôpital Nianankoro Fomba n’ont pas manqué de souligner le net engouement qui se fait sentir autour de cette forme de solidarité qu’est l’Assurance maladie obligatoire. «Si nous prenons le premier trimestre de l’année 2014, on constate que l’hôpital Nianankoro Fomba a eu à réaliser plus de 5 200 prestations. Mieux, en 2015, toujours dans le premier trimestre, nous sommes à 7 500 prestations», se félicite Dr Soungalo Sanogo, point focal AMO de l’hôpital. Même s’il reconnait par ailleurs que tout est loin d’être rose. Au nombre des quelques faiblesses qu’il a évoquées, le responsable sanitaire retient notamment  le retard dans l’attribution des numéros AMO, l’insuffisance des supports ainsi que le retard dans le remboursement des factures de la part de l’Inps. Abondant dans le même sens que son subordonné hiérarchique, le Directeur par intérim de l’hôpital, Dr Tiécoura Samaké, a regretté le fait que certaines pharmacies ne respectent pas la convention qu’elles ont signée. C’est pourquoi, il a souhaité que la Canam rencontre celles-ci autour de ce problème qui a été plusieurs fois évoqué au cours des conseils d’administration de sa boîte.

De son côté, Dr Cheick Sangaré, promoteur de la pharmacie Amary Daou, non moins président de l’Ordre des pharmaciens de Ségou, a salué la confiance qui se crée de plus en plus autour de l’AMO, mais surtout l’importance que la Canam accorde aux autres acteurs de la chaîne à travers cette caravane. Et notre interlocuteur d’exprimer la satisfaction de l’Ordre au regard du nombre de plus en plus accru des pharmacies conventionnées, celui des adhérents ainsi que l’augmentation des médicaments répertoriés de l’AMO. «Souvent, il y a des décisions qui viennent de la Canam, quand on essaye de l’appliquer, le client ne comprend pas. Aussi, arrive-t-il que le médecin, peut-être par omission, prescrive un médicament qui n’est pas répertorié au niveau de l’AMO», regrette-il toutefois. A la question de savoir pourquoi des pharmacies refusent de livrer les médicaments, le président de l’Ordre a fait savoir que cette situation est due au fait que certaines pharmacies avaient des factures en souffrance. Mais la Canam, aux dires du Dr Sangaré, est en train d’y faire face.

Markala: les acteurs notent de réelles avancées

Dans cette ville située à 35 km de Ségou où  la caravane a débarqué, la pharmacie ‘’OD’’ est conventionnée depuis environ 4 ans. Sa gérante, Traoré Djènèba Oumar, reconnait que les choses ont beaucoup évolué depuis. «Au niveau du paiement, ça se passe un peu plus vite. Au début, on était souvent à 3 mois de paiement, mais maintenant nous sommes à 1 mois, tout au plus deux», note-t-elle avec satisfaction. Mieux, il y a une parfaite communication entre eux et les clients. Seul couac qu’elle note, c’est au niveau des prescripteurs, car, explique-telle, des produits pour adultes peuvent souvent se retrouver sur des ordonnances pour enfants. «Il y a eu une avancée. Que ça soit à l’Inps ou à la Canam, les paiements se font normalement», avoue Dr Ousmane Traoré, gestionnaire du CSRéf de Markala. Notre interlocuteur affirme par ailleurs que Ségou ou Bamako s’est toujours manifesté de manière prompte toutes les fois qu’il y a eu un problème à leur niveau. Il a par ailleurs fait siens nombre de problèmes sus évoqués, tout en confessant que les cas de rupture sont dus au fait que ceux qui en ont la charge oublient souvent de les signaler à la hiérarchie. L’orateur a ainsi suggéré que l’on déconcentre aussi bien la confession des fiches de soin que les paiements des factures au niveau de la Canam et de la Caisse malienne de sécurité sociale (Cmss).

Pour sa part, Kadiatou Traoré dite  Mah N’Diaye avoue que les couacs qu’elle a connus avant l’obtention de sa carte de membre n’appartiennent plus qu’à un vieux souvenir. «Depuis que j’y ai adhéré, il y a environ 3 ans, j’ai pratiquement eu sur place tous les produits qui m’ont été prescrits», apprécie cette transformatrice de produits locaux qui ne cache pas son entière satisfaction.

Au cours d’un débriefing qu’ils ont eu avec les caravaniers, le samedi 25 avril, les responsables de la Canam ont promis de réagir face à ces constats pour améliorer davantage cette reforme qui est en train d’atteindre sa vitesse de croisière.  Une chose est sûre, c’est que tant qu’une reforme est en chantier, il y aura toujours des écueils, surtout si celle-ci est d’ordre social. L’AMO, naturellement, ne fait pas exception à la règle. Ce qui est important, c’est la détermination de Luc Togo, Directeur Général de la Canam, et de ses collaborateurs de rendre cette reforme irréversible. Mais ils n’y arriveront jamais sans l’implication de chaque Malien, surtout de la presse.

Bakary SOGODOGO, envoyé spécial

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