Au Mali, les grandes villes sont devenues des nids d’exode où se retrouvent les ressortissants de plusieurs localités rurales en quête de travail. La migration interne est de plus en plus pratiquée par les jeunes ruraux qui quittent leurs villages et campagnes à la recherche d’un avenir meilleur dans les localités urbaines. C’est donc un phénomène qui prend de l’ampleur
En effet, l’exode rural est aujourd’hui un phénomène de plus en plus fréquent au Mali. Les jeunes ruraux dans l’objectif d’accroitre leur niveau de vie quittent leurs villages pour chercher du travail en ville. Ils laissent derrière eux les personnes âgées et les enfants qui ne peuvent produire suffisamment pour se nourrir.
Confrontés à d’énormes difficultés lors de leur déplacement massif vers les villes et pendant leur séjour, les jeunes ruraux n’ont qu’un seul objectif « ramener quelque chose au village ». Des injures, maltraitance, manque d’abris et pour combler le tout loin des siens, les rêves de beaucoup d’entre ces jeunes sont brisés après avoir mis les pieds dans les villes où ils sont censés avoir un avenir meilleur.
Alors qu’autrefois ces jeunes ruraux attendaient la saison sèche (après les travaux champêtres) pour se rendre dans les grandes villes à la chercher du travail en attendant la prochaine saison pluvieuse, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui, les zones rurales sont presque vides en pleine saison pluvieuse, les jeunes dans leur quête d’une vie meilleure ne reviennent plus après avoir fait la découverte des merveilles des grandes villes. Surtout avec l’avènement de la crise sécuritaire les choses se sont empirées. Une fois qu’un villageois quitte le village pour se rendre dans les zones urbaines où il n’y a plus de sécurité il ne revient plus. Ce qui a permis à Ousmane Djiré de dire que « cette crise sécuritaire a affecté partout au Mali mais les villages du nord et du centre sont les plus touchés. Autrefois avec l’agriculture et l’élevage les jeunes ruraux arrivaient à subvenir à leurs besoins, ce qui a changé aujourd’hui avec l’avènement de cette crise. On ne cultive plus. Tous les jeunes se sont déplacés vers les zones plus sécurisées, nos animaux sont enlevés par les GAT on ne peut plus rester dans ces villages ».
Pour certain, l’exode rural est un vieux phénomène pratiqué tout au long de l’histoire humaine et se déroule aujourd’hui encore à l’échelle planétaire selon une intensité et des modalités diverses. Appelé aussi migrations rurales, il désigne le déplacement durable de populations quittant les zones rurales pour aller s’implanter dans des zones urbaines.
Les principales causes de l’exode rural au Mali
La pauvreté est le facteur majeur de l’exode rural au Mali. Les jeunes ruraux émigrent vers les grandes villes pour des raisons économiques et bien d’autres raisons souvent liées aux conditions de vie en milieu rural : gagner de l’argent pour se constituer un trousseau de mariage, soutenir financièrement leurs familles ou éviter un mariage forcé. Il y a aussi l’augmentation de la population rurale qui exige nécessairement la multiplication des lieux de travail, manque d’infrastructures industrielles au profit des lieux de production concentrés, besoin grandissant de main-d’œuvre dans les zones urbaines (industrie) et surtout les conditions de vie sont meilleures en ville.
« Nous nous rendons dans les localités urbaines pour chercher du travail parce qu’il n y a rien à faire au village après les travaux champêtres. Chaque année après les récoltes au village je me rends à Bamako pour gagner de l’argent et subvenir aux besoins de ma famille », a déclaré Younoussa Ongoiba, un ressortissant du village de Gono région de Douentza.
Il nous confie qu’il pratique l’exode rural depuis plus de 15 ans maintenant avant la crise sécuritaire au Mali en 2008. « J’ai effectué mon premier voyage vers la capitale Malienne en 2008 avec un ami âgé de 21 ans. On a travaillé 7 mois à Bamako avant de retourner au village à l’approche de la saison pluvieuse ».
Les effets de l’exode rural
La recrudescence de l’exode rural peut poser des défis aux zones urbaines, tant pour les migrants que pour leurs nouvelles communautés. Le déplacement massif des jeunes ruraux dans les grandes villes peut entrainer le surpeuplement des villes occasionnant par suite la hausse du prix des loyers. Des implantations illégales et un taux de chômage plus élevé dans les villes entraînent l’insécurité alimentaire, la pauvreté, l’insuffisance des services de santé et le stress.
Que faut-il faire ?
Il est en effet important de créer une dynamique politique de développement rural, œuvrant pour la productivité de la terre, la viabilité économique, l’emploi rural par le biais notamment de régulations publiques des prix et de la production alimentaire.
Lutter contre l’insécurité grandissante dans les milieux ruraux et procéder au retour des services sociaux de base dans les villages et campagnes. Reconnaitre et valoriser la multifonctionnalité, utilités et significations économiques, sociales, culturelles et environnementales de l’agriculture. C’est dans ce cadre que l’agro écologie est nécessaire, car elle assure une productivité du travail élevée et offre des rendements à l’hectare supérieurs à l’agriculture conventionnelle tout en ayant des coûts de production très faibles.
Assurer un accès démocratique et équitable aux ressources, ce qui suppose de cesser radicalement les accaparements de terres, sources de toujours plus d’expulsion, de chômage, d’exode et donc de misère.
Veiller à ce que les agriculteurs aient à disposition de manière décente des semences de qualité (locales et améliorées), technologies de l’agriculture écologiquement intensive et outils manuels ce qui exclut les microcrédits à taux d’intérêt exorbitants.
Oumar Sawadogo