La campagne pour l’élection présidentielle du 29 juillet prochaine est une opportunité pour les différents candidats de dévoiler leurs projets de société. Et le secteur privé n’entend pas rester en marge de cette échéance électorale car le Conseil national du patronat du Mali (Cnpm) est résolument engagé à jouer pleinement un rôle prépondérant dans le plaidoyer et le lobbying en faveur des entreprises maliennes pour faire entendre la voix du secteur privé. C’est ainsi qu’il a initié un Mémorandum du secteur privé validé le mardi 10 juillet 2018 au cours d’un atelier au siège du Patronat, pour être soumis aux candidats à l’élection présidentielle du 29 juillet 2018.
Il s’agissait, au cours de l’atelier de validation, d’amender et de valider une synthèse des préoccupations du secteur privé (Mémorandum) qui sera soumise aux différents candidats à l’élection présidentielle afin qu’ils se l’approprient et s’engagent concrètement sur un certain nombre d’actions qu’ils mettront en œuvre en faveur du secteur privé, une fois élus.
Pour Moussa Alassane Diallo (vice-président du Cnpm) qui présidait l’atelier, les acteurs du secteur privé sont confrontés à des difficultés de tous genres et qu’ils sont les mieux placés pour faire un diagnostic de la situation socioéconomique du Mali. «Au-delà de ce diagnostic, il faudrait que les acteurs du secteur privé aient une capacité d’analyse et de proposition, pour présenter aux différents candidats la grille de lecture du Cnpm de la situation et des perspectives économiques de notre pays.
Le Mali est dans un environnement à la fois sous régional et régional. Sous régional parce que le Mali fait partie de l’Union monétaire Ouest africaine (Umoa). Et en tant membre de l’Umoa, le Mali ne gère pas sa politique monétaire et sa politique budgétaire, étant sous ajustement structurel avec le Fonds monétaire international (FMI). Et si on sait que la politique économique d’un pays repose à la fois sur la politique monétaire et la politique budgétaire, les acteurs du secteur privé doivent avoir la capacité de proposer des axes de réflexions et d’actions, de façon à soutenir une croissance durable et inclusive. Cette croissance durable et inclusive ne viendra que par les acteurs des entreprises qui ont un rôle important, un devoir et une obligation à jouer», a fait comprendre Moussa Alassane Diallo.
Le Mémorandum en 2 grands chapitres
Intitulé “Préoccupations du secteur privé malien porté par le Cnpm en prélude à la rencontre des candidats à l’élection présidentielle”, le Mémorandum du secteur privé comprend deux grands chapitres. Le 1er chapitre est “La poursuite des points d’accord obtenus avec l’actuel gouvernement et la non remise en cause de ces avancées” et le 2e chapitre est “Les préoccupations actuelles dont une réponse diligente est attendue”.
Au niveau du 1er chapitre, concernant “La poursuite des points d’accord obtenus avec l’actuel gouvernement et la non remise en cause de ces avancées”, il s’agit de la réduction de l’Impôt sur le traitement des salaires (Its) à partir de la Loi de finance initiale de 2019, avec un taux maximal souhaité de 25 % ; la suppression de la “Taxe emploi jeunes (Tej)” et la “Taxe de formation professionnelle (TFP” à partir de la Loi de finance rectificative 2018, soit une réduction de charge pour les entreprises de 4 % de la masse salariale ; l’accès à la commande publique dans des conditions préférentielles pour les entreprises ou regroupements d’entreprises nationales.
Le 2e chapitre sur “Les préoccupations actuelles dont une réponse diligente est attendue” est scindé en 4 thématiques : l’environnement des affaires, la fiscalité ; le financement des entreprises, les relations avec les banques et les Partenaires techniques et financiers (PTF) ; la sécurisation de l’activité économique ; l’emploi, la formation et le développement des compétences des ressources humaines.
Le sous chapitre ” l’environnement des affaires et la fiscalité ” concerne la mise en œuvre d’une véritable réforme fiscale en vue de la promotion de l’investissement national ; la relecture de plusieurs textes (Code minier, Code des investissements, etc.) afin de les rendre plus facilement applicables et plus incitatifs pour les entreprises ; l’apurement de la dette intérieure et l’indemnisation rapide des victimes de la crise sécuritaire de 2012 ; l’instauration d’une fiscalité applicable aux banques et opérations bancaires dans les parties à fort risque sécuritaire afin de garantir l’activité économique sur l’ensemble du territoire national, les indemnités de fin de carrière.
Le sous chapitre “financement des entreprises, relations avec les banques et les PTF” est relatif à une réduction des taux d’intérêts des établissements financiers grâce à une facilité au refinancement auprès de la Bceao ; l’élargissement des sources et des gammes de garanties pour le financement avec à la clé plus de flexibilité et d’accessibilité pour les PME et les banques ; la mobilisation de ressources à long terme au niveau des partenaires au développement ; l’accès aux ressources publiques pour l’ensemble des intervenants du secteur financier ; l’innovation en matière d’ingénierie financière ; l’accompagnement des partenaires publics et privés avec une nouvelle approche basée sur une combinaison entre prêts et dons ; la vulgarisation du crédit-bail et du leasing ; l’instauration d’une autorité de gestion pour coordonner, suivre et évaluer l’intervention des bailleurs dans les projets/programmes ainsi que leurs financements sous forme d’un guichet unique.
Le sous chapitre “La sécurisation de l’exercice de l’activité économique” a trait à la célérité dans la formalisation des garanties au niveau des services du cadastre à travers une sécurisation des titres fonciers ; l’exercice en toute impartialité et avec professionnalisme de l’action juridique et judiciaire intentée à l’encontre des entreprises ; le renforcement de la répression des infractions à caractère économique sous toutes leurs formes avec une attention particulière pour la cybercriminalité ; l’encadrement de l’exercice du droit de grève avec l’instauration d’un service minimum dans les branches sensibles du secteur privé tel que le secteur bancaire et des assurances ; l’instauration d’une clause de sous-traitance obligatoire de 30 % du montant du marché à des entreprises nationales pour les multinationales adjudicatrices de marché de gros travaux en vue de favoriser un transfert de technologies ; le respect strict des critères de catégorisation des entreprises lors de l’attribution des marchés ; l’amélioration de la gestion des deniers publics, notamment ceux réservés aux paiements des factures des entreprises privées lors de l’exécution de marchés publics.
Le 4e sous chapitre “l’emploi, la formation et le développement des compétences des ressources humaines” traite de l’augmentation de l’offre de formation professionnelle à travers une multiplication sur tout le territoire de centres de formation professionnelle (collèges et lycées agricoles, collèges et lycées techniques); la promotion de la formation en alternance par le biais de partenariats signés avec des entreprises locales et assortis de mesures incitatives ; la signature d’accords bilatéraux avec des pays partenaires afin de permettre aux élèves et étudiants d’effectuer des stages professionnels ; le renforcement de l’éducation de base dans les régions avec une attention particulière pour la question de la scolarisation des jeunes filles ; la mise en place d’un mécanisme de financement de la formation professionnelle plus efficace, plus souple et plus transparent ; l’amélioration de l’adéquation emploi/formation dans des secteurs d’activités particuliers tel que celui de la construction pour une meilleure insertion des jeunes diplômés.
Les précisions de
Moussa Alassane Diallo : “Le Cnpm est à équidistance de tous les candidats à l’élection présidentielle”
Après la validation du Mémorandum, une série de rencontres avec les différents candidats est prévue à partir du lundi 16 juillet prochain au siège du Cnpm afin qu’ils s’approprient ledit Mémorandum et s’engagent sur un certain nombre d’actions qu’ils mettront en œuvre en faveur du secteur privé, une fois élus. Moussa Alassane Diallo, le vice-président du Cnpm a tenu à préciser que malgré ce Mémorandum, le Cnpm ne donnera pas de consigne de vote à ses adhérents car, à ses dires, “le Cnpm est avec l’ensemble des candidats et il est à équidistance de tous les candidats à l’élection présidentielle”.
Siaka DOUMBIA