La section malienne d’Amnesty international a organisé une conférence de presse, le mercredi 22 février dernier au mémorial Modibo Keita, pour présenter le rapport 2016-2017 d’Amnesty International sur la situation des droits humains dans le monde. La conférence était animée par Salif Fofana, directeur par intérim d’Amnesty International-Mali, en présence d’El Béchir Sangaré, coordinateur juriste d’Amnesty International-Mali et de plusieurs membres de son bureau.
Comme chaque année, les responsables d’Amnesty International produisent un rapport annuel sur la situation des droits humains dans le monde. Pour cette année, c’est un document de 500 pages qui retrace les graves violations des droits humains commises dans le monde en 2016. Cette conférence de presse a débuté par la projection d’une vidéo de 3 minutes sur les cas de violations commises courant 2016 dans le monde, et notamment en Afrique de l’ouest et du Centre. Ainsi, le directeur par intérim a présente les grandes lignes de ce rapport sur le Mali.
Selon lui, de graves violations des humains ont été commises au Mali courant 2016 et se résument essentiellement aux exactions perpétrées par des groupes armés, le recours excessif à la force, l’impunité, la justice internationale, la liberté d’expression, le droit à l’éducation, le droit à un niveau de vie suffisant et le droit des femmes.
Pour les exactions perpétrées par des groupes armées, le conférencier à précisé que des attaques de groupe armés contre la Minusma se sont multipliées. Plus de 62 attaques ont ainsi été menées durant l’année 2016, tuant 25 membres des forces de maintien de la paix et six civils qui travaillaient pour l’Onu. Des mines terrestres utilisées par les groupes armés ont tué et mutilé des civils ainsi que des membres des forces de maintien de la paix et des forces de sécurité.
Recours excessif à la force, “Des membres des forces de sécurité et des forces de maintien de la paix ont recouru à la force de manière excessive et ont été accusés d’exécutions extrajudiciaires. L’Onu a signalé 24 cas d’homicides, d’exécutions sommaires et de disparitions forcées en mars et mai 2016, l’organisation a annoncé que, parmi 103 personnes arrêtées en 2016 par les forces maliennes et internationales pour des accusations liées au terrorisme, trois avaient été sommairement exécutées et 12 avaient été torturées par les forces maliennes. En avril, deux manifestants ont été abattus et quatre autres blessés à l’aéroport de Kidal au cours d’une manifestation contre des arrestations menées par les forces internationales. En juillet 2016, les forces maliennes ont tiré à balles réelles lors d’une marche organisée à Gao par le mouvement de résistance civile qui a fait trois morts et 40 blessés”, a-t-il précisé
Quant à l’impunité, le conférencier a affirmé que malgré les progrès enregistrés, avec notamment le renforcement et le rapprochement de la Commission vérité, justice et réconciliation, pour enquêter sur les graves violations des droits humains commises entre 1960 et 2013. Mais il regrette que cette commission ne soit pas toujours opérationnelle à fin 2016. Il y a aussi l’ouverture du procès du Général Amadou Haya Sanogo, jugé pour des charges liées à l’enlèvement et à l’exécution, en 2012 ; la condamnation de Al Faqi Al Mahdi à 9 ans de prison pour avoir dirigé des attaques contre des bâtiments religieux et des monuments historiques.
Son constat est que de nombreux défis restent à relever comme le regain de l’insécurité, l’absence de l’Etat dans une grande partie des régions, les difficultés liées à la mise en place des autorités intérimaires.
Pour la liberté d’expression, il a précisé que malgré toutes les garanties juridiques, les entorses sont encore constantes comme l’agression des journalistes, l’interdiction de manifestation et les difficultés d’accès aux medias d’Etat.
Quant au droit à l’éducation, Salif Fofana a évoqué que, selon les Nations-Unies, 296 des 2 380 écoles des régions de Gao, Kidal, Ségou et Tombouctou ont été fermées pour des raisons d’insécurité, sans que des solutions alternatives ne soient proposées. “Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a souligné la mauvaise qualité de l’enseignement, liée au grand nombre d’élèves par enseignant, ainsi qu’au manque de manuels scolaires et d’enseignants qualifiés. Il a en outre pointé du doigt les disparités existant entre les zones rurales et urbaines en matière de scolarisation”, a-t-il ajouté.
Pour les droits des femmes, “la loi 052 relative à la promotion de genre a permis d’élire plus de 2 800 conseillères municipales aux élections de novembre 2016. Malgré cette situation réjouissante, cette loi n’est pas regardante dans certains organes de décisions comme les autorités intérimaires et le Conseil national de l’entente”, a-t-il conclu. M.TRAORE