Point de droit : Qu’est-ce que le délit d’initié ?

0

Le délit d’initié est un délit boursier que commet une personne qui vend ou achète des valeurs mobilières en se basant sur des informations dont ne disposent pas les autres ; l’utilisation ou la communication d’éléments privilégiés peuvent permettre des gains illicites lors de transactions boursières, qui sont interdits par la règlementation de contrôle des marchés financiers.

 On dit d’une personne qu’elle est initiée soit en vertu de ses fonctions de direction d’une entreprise cotée en bourse, soit parce que, dans l’exercice de ses fonctions, elle est amenée à détenir des informations privilégiées.

Le code des marchés financiers1 réglemente le délit d’initié en disposant que l’initié qui aura réalisé ou permis de réaliser sur le marché boursier, directement ou par personne interposée, une opération avant que le public ait connaissance des informations privilégiées, commet un délit.

La doctrine les qualifie d’initiés de droit, internes ou par nature. Ce sont en fait les dirigeants sociaux, le président, les directeurs généraux, les membres du directoire ou toute personne ayant la qualité d’administrateur ou membre du conseil de surveillance. Ils sont frappés par la loi d’interdiction d’opérer sur le marché boursier en raison des fonctions qu’ils exercent où il y a une présomption d’initiation irréfragable concernant les titres des sociétés qu’ils dirigent et concernant les titres d’autres entreprises appelées à traiter avec la société qu’ils dirigent.

Les initiés indirects

Est réputé initié quiconque dispose d’information privilégiée dans le cadre de l’exercice de sa profession. L’initié ne voit peser sur lui aucune présomption irréfragable ou simple : il faut démontrer sa qualité d’initié indirect, le juge répressif devra constater que l’information privilégiée a été acquise à titre professionnel.

En conséquence, ils peuvent appartenir à la société sans rentrer dans la liste limitative des dirigeants, comme par exemple un directeur financier, ou un directeur administratif, ou encore être étrangers à la société mais entretenir avec celle-ci des relations professionnelles. On peut citer : le liquidateur ; certains employés de banque ou de société de bourse ; des partenaires contractuels ; des avocats d’affaire qui interviennent dans la négociation de contrats ; le cas du directeur d’un cabinet d’un ministre.

Toutes ces personnes subissent l’obligation de s’abstenir de toute opération sur le marché dès qu’elles ont eu accès à une information privilégiée.

L’information privilégiée

Cette notion se décompose en deux éléments : il faut une information ; il faut que l’information soit privilégiée.

L’information doit porter sur les perspectives d’évolutions ou sur la situation d’un émetteur de titre, sur les perspectives de valeurs mobilières ou sur un contrat négociable. En principe, dans le cadre d’une information protégée ce sont tous les éléments d’ordre interne qui touchent les éléments de la société. Ce sont par exemple les résultats commerciaux ou financiers de cette société. Mais aussi des événements extérieurs à la société mais susceptibles d’avoir une incidence sur les cours des titres émis sur la société. C’est par exemple des négociations internationales. Des qualités qui distinguent cette information des simples rumeurs qui circulent dans les milieux d’affaires ou boursiers. Voici quelques exemple d’information précise : connaître le montant exact des pertes qui seront annoncées ou au contraire connaître le montant exact des dividendes versés aux actionnaires ; la connaissance que l’on a de la signature d’un contrat ; connaissance de restructuration ; connaissance de l’acquisition ; la participation dans d’autres sociétés.

A contrario, ne constitue pas d’informations précises le fait de faire l’état de bruits alarmants portant sur les prochaines difficultés de la société.

La cour de cassation a précisé ce qu’elle entendait par information : il faut des renseignements précis pour être immédiatement exploités sur le marché.

Le privilège

Elle doit être privilégiée, c’est une situation d’inégalité. Le privilège consiste à détenir des informations déterminantes avant que le grand public en ait connaissance. Le privilège réside dans l’antériorité de la connaissance et par le nombre de ceux qui partagent l’information.

Autrement dit, l’information reste privilégiée même si le nombre des initiés augmentent, dès lors que la grande partie des épargnants ou investisseurs ne disposent pas de cette information.

Les éléments constitutifs de l’infraction

En effet, l’initiation, l’information, le privilège ne sont que des éléments préalables qui rendent le délit d’initié possible mais ne le réalisent pas en lui-même.

L’infraction ne va se matérialiser que par la réalisation d’une opération boursière. S’agissant des auteurs de l’infraction, la loi prévoit large pour fermer à l’initié une échappatoire trop facile. La loi incrimine les opérations faites par les initiés eux-mêmes mais aussi celles réalisées pour leur compte par des personnes interposées.

Dans les deux cas, qu’il agisse directement ou indirectement, l’initié reste l’auteur principal du délit. Dans cet esprit d’extension de la répression, la loi a été plus loin car elle a incriminé des comportements parallèles c’est-à-dire la communication à des tiers d’information privilégiée même sans la réalisation d’opération. L’élément matériel du délit est différent pour ce qui est de la communication illicite d’information privilégiée. Cependant, il faut préserver la communication dans les sociétés. En conséquence, ne tombent pas sous le coup de l’interdiction légale toutes les communications d’informations faites dans un cadre purement professionnel, comme par exemple à l’occasion d’une réunion des dirigeants de différentes sociétés en cours de négociation.

La responsabilité des personnes morales est possible5. Il s’agit d’un délit intentionnel, la mauvaise foi est requise. La mauvaise foi est déduite de la profession et fonction exercée par l’auteur de la communication des informations privilégiées.

Répression du délit d’initié

Les sanctions encourues

L’infraction est passible d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende d’un millions cinq cent mille euros calculée à partir du profit réalisé par l’initié et elle peut porter sur un chiffre décuple du montant de profit éventuellement réalisé. La tentative n’est pas incriminée. En revanche la complicité est punissable.

Les personnes morales peuvent se rendre coupables du délit d’initié, elles encourent alors une amende quintuplée. Le tribunal peut prononcer la dissolution de la personne morale si elle est créée spécialement pour commettre ce délit d’initié. Les personnes morales peuvent être frappées d’une interdiction d’exercer l’activité à l’occasion où l’infraction a été commise.

La compétence des juridictions répressives

C’est le tribunal de grande instance de Paris qui reçoit compétence pour la poursuite, l’instruction et le jugement des délits en question.

Ben Dao

 

 

Commentaires via Facebook :