Les magistrats au ministre : ‘’Désormais, ce sera coup pour coup’’

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Magistrats
Magistrats (photo archives)

Samedi dernier, les magistrats maliens ont expliqué aux journalistes leur agacement par le ministre de la justice, Mohamed Aly Bathily, qui n’hésite pas à les jeter en pâture. Surveillés par la sécurité d’Etat, sermonnés à tout propos et harcelés dans l’exercice de leur fonction, les magistrats seraient l’objet de traitements caporalistes qu’ils croient à l’existence d’une Gestapo de l’époque stalinienne.

 

C’est dans ce contexte que tous les syndicats de la justice sont désormais ligués contre les attaques du garde des sceaux. «Cette conférence de presse n’aurait pas lieu n’eu été les sorties intempestives du garde des sceaux. Désormais, ce sera coup pour coup», a déclaré Issa Traoré, président du Syndicat autonome de la magistrature(SAM).

 

 

Les syndicats de la justice, au regard des dispositions pertinentes du code de procédure pénale, ont exprimé leur incompréhension relativement aux mandats de dépôt décernés contre six de leurs camarades : quatre magistrats, un greffier et un clerc d’huissier. Ces mandats ne s’imposaient pas la lecture du droit que font les magistrats.

 

 

Adama Yoro Sidibé, président du Syndicat libre de la magistrature(Silma), a invité le ministre de la Justice à respecter la présomption d’innocence dont devraient bénéficier leurs camarades lorsqu’il est amené à parler d’eux.  Selon lui, les affirmations de culpabilité contre les juges poursuivis ont un effet négatif sur l’image des présumés coupables qui restent innocents tant qu’une décision judiciaire définitive disant le contraire n’a pas été prononcée.

 

 

Les syndicats de la justice  déplorent également le ton va-t-en-guerre du garde des sceaux chaque fois qu’il fait une sortie dans les médias.  Le ministre de la Justice avait notamment déclaré à propos du dossier Adama Sangaré qu’il ferait poursuivre le procureur en charge de l’affaire pour recel de délinquant si le maire du district n’était pas envoyé en prison.

 

 

Le garde des sceaux avait également déclaré qu’il a demandé à la Sécurité d’Etat de surveiller tout magistrat en charge des dossiers. « Nous disons: oui pour l’assainissement de la Justice. Nous sommes prêts à jouer notre partition dans cette entreprise de salut public. Mais nous disons aussi: halte Gestapo ! », a affirmé Sidibé.

 

 

Pour les magistrats, le ministre doit intégrer la règle de l’indépendance du pouvoir judiciaire vis-à-vis de l’exécutif, surtout devant les partenaires étrangers. «Quel que ministre de la Justice qu’il soit, il est un membre de l’exécutif, et à ce titre, il lui est interdit de s’immiscer dans les affaires du judiciaire. En allant dire à Bruxelles, devant des partenaires étrangers, qu’il a fait mettre des magistrats en prison, il crée le trouble chez ses interlocuteurs et dessert le Mali », a dit le président du Syndicat libre des magistrats.

 

 

Des doléances sur la table

Les magistrats entendent transporter le combat sur le front syndical à travers la réouverture prochaine des négociations avec le gouvernement au sujet de leur cahier de doléances. Les préoccupations essentielles des magistrats se trouvent sur la table du gouvernement depuis 2007, mais à cause du contexte de crise multiforme qu’a connu le pays, les deux syndicats avaient décidé de surseoir aux revendications contenues dans le cahier des charges.

 

 

L’objectif des prochaines négociations est d’éviter aux magistrats de devoir louvoyer entre deux récifs: manquer, au plan professionnel, à son sacerdoce en trichant; ou démissionner de ses obligations familiales en sacrifiant ses enfants, sa famille. Les greffiers aussi vont se joindre aux magistrats dans la perspective des négociations en demandant, entre autres, des parcelles à usage d’habitation et l’ouverture d’une passerelle entre leur fonction et la magistrature.

 

 

Un autre problème évoqué par les syndicalistes est la non-tenue à date de la première session de la Cour d’Assises. Cette session devrait s’ouvrir normalement le 24 février 2014 et s’étaler 21 jours au cours desquels 120 affaires devraient être jugées. Selon les syndicalistes, si la session de la cour d’Assises s’était tenue à la date prévue, aujourd’hui un innocent aurait recouvré sa liberté et son honneur.

 

 

Aux dires des magistrats, du temps du ministre Malick Coulibaly, le Mali s’était inscrit dans la tradition des bonnes pratiques en matière criminelle. La Cour d’Appel de Bamako a pu organiser 6 sessions d’assises dont une à Ségou. Plus de 500 accusés ont pu être jugés. Des condamnations à l’amende pour un montant de plus de 100 millions de francs CFA ont été prononcées.

 

Soumaïla T. Diarra

 

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5 COMMENTAIRES

  1. Il suffit de faire même une petite allusion à la justice ou aux magistrats pour provoquer un véritable lever de boucliers contre les juges. La plupart de ces réactions sont sans objectivité. On ne cherche même pas à comprendre le problème en question. La haine du juge suffit. Pourtant, ce juge est justement payé pour attirer sur lui les frustrations de la société :chaque décision qu’il prend fait au moins un mécontent. Même le voleur qui est pris sur le fait en veut au juge d’être condamné, de même que tous ses parents ou amis qui ont intervenu en sa faveur en vain (le sachant fautif). Même le juge qui a bien fait son travail est detesté à plus forte raison lorsqu’il s’est trompé. On ne peut même pas concevoir qu’il puisse se tromper de bonne foi. Comme s’il était surhumain. A l’inverse, le juge n’a pas le droit de repondre, de s’expliquer à cause du secret professionnel et de l’obligation de réserve. La vérité est très simple : le pouvoir qui leur est reconnu par la loi leur attire toute sorte de jalousie et les autres pouvoirs, qui sont plus nantis cherchent toujours à le marginaliser. Mais un jour viendra où les gens comprendront. Du moins ceux qui veulent comprendre…

  2. Les magistrats vous etiez libres pendent les 2 dernieres decenies,qu’avez vous fait? Si ce nest pas legaliser la corruption au mali ,du bas de la famille juridique jusqu au plus haut sommet,c’est un systeme de corruption toute la famille y etait soumise,si non il y avait des des dignes mais contraints,soit tu suis ou tu degages.
    Bathily est un espoir pour tous les maliens pour assainir la justice,s’il est ne continue pas cette allure on risque de retourner a la cas du depart,c est a dire voler,tuer,tricher et payer les juges tu es acquitté.
    Du courage Mr.le ministre

  3. Mr le ministre au nom du peuple résiste contre ces fossoyeurs de notre cher pays. Nous vous implorons sachant que c’est très très difficile,car ils vont employer tous les mots du genre: règlements de compte, zèle ,opportunisme, mais nous le petit peuple savons que vous ne voulez qu’une seule chose: ce pour lequel vous êtes à ce poste: “la justice” .Encore une fois Mr Bathyli le peuple et l’histoire attendent beaucoup de toi, et merci d’avance car nous te faisons confiance.

  4. « Nous disons: oui pour l’assainissement de la Justice. Nous sommes prêts à jouer notre partition dans cette entreprise de salut public. Mais nous disons aussi: halte Gestapo ! »

    Donc vous êtes conscients que la magistrature est la pourriture du Mali et celui qui veut vous laver proprement vous le chassez!
    Les gens sont refractaires au changement quand bien elles le chantent tous les instants, mais dès que les principes de ce changement les atteingnent les voilà revoltées. Je suis à 1000% sûre que ce ministre de la justice est sur la bonne voie. Quand on arrive à écrouer directement des “magistrats” c’est que sans nul doute les faits sont GRAVES !!!!!

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