La Faculté des lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines (FLASH) de l’Université de Bamako a rendu un vibrant hommage à Jean-Pierre Daogo Guingané, professeur à l’Université de Ouaga et Docteur d’état en lettres, décédé le 23 janvier 2011. Il était le président du Centre international de théâtre pour l’Afrique de l’Ouest.La cérémonie s’est déroulée, le 3 février, à l’Ambassade du Burkina au Mali.
Excellence Monsieur l’Ambassadeur Extraordinaire et Plénipotentiaire du Burkina Faso au Mali.
C’est le cœur affligé que la Faculté des lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines de l’Université de Bamako a appris la perte cruelle du Professeur Jean Pierre Daogo Guingané, survenue le 23 Janvier 2011 à Ouagadougou. Ce deuil frappe durement l’Administration de la FLASH, l’ensemble du corps professoral et des étudiants qui nous ont délégués pour venir partager avec la famille et les proches du disparu leur douleur, tout comme celle des Autorités du Burkina Faso, du monde des Arts et de la Culture, du peuple Burkinabé tout entier.
Excellence Monsieur l’Ambassadeur
Nous nous recueillons devant la Mémoire d’un collègue Educateur et Enseignant, d’un Formateur et d’un créateur de génie. Né en 1947, à Garango Jean Pierre nous quitte à 64 ans, laissant déboussolé le Théâtre Burkinabé et la Scène intérnationale qu’il avait marqué par ses relations fusionnelles, ses créations osées…
Docteur d’Etat, professeur titulaire à l’Université de Ouagadougou où il fut chef de département des Lettres modernes, puis doyen de la Faculté des Langues, des Lettres, des Arts et des Sciences Humaines, Jean Pierre sera plu tard Secrétaire Général du Ministère des Enseijnements Supérieurs et de la Recherche Scientifique puis Secrétaire d’Etat auprès dti Président de la République, chargé des Arts et de là Culture.
Homme plus poussé vers la créativité, il descend sur le terrain de la pratique, à l’écoute du petit peuple pour vivre ses pulsions, traduire sur scène ses espoirs, ses angoisses, ses rêves.
Taillant le temps à la hache, il dotera le Burkina d’un théâtre moderne de premier plan à l’échelle de notre continent.
Fondateur du théâtre contemporain africain avec le Nigérian Wolé Soyinka, le Congolais Sony Labou Tansi et Prosper Compaoré son compatriote, il sera baptisé au Burkina Faso l’Artiste du peuple pour avoir été trois fois lauréat du Grand prix national des Arts et des lettres. C’était avec ses oeuvres "le Fou’ éditée par CEDA en 1986, "le cri de l’espoir" (Gambidi 1990) et la Musaraigne (Gambidi 1997).
Nous ne saurons taire d’autres spectacles de grandes factures.
La Savane en transe
Papa oublie – moi
La grossesse de Koudibi
– Les Lignes de la main
– Malo pilote et une douzaine de pièces dramatiques inédites.
Dans toutes ses oeuvres Jean-Pierre Guingané expose les vies victorieuses de la misère humaine.
Plus de vingt ans de coopération ont lié le dramaturge Burkinabé et ses pairs, Maliens : comédiens, metteurs en scène, professeurs critiques d’Art
Après avoir crée le Théâtre de la Fraternité de Ouagadougou, l’Union des Ensembles Dramatiques de Ouagadougou (UNEDO) le Festival International du Théâtre et de la Marionnette de Ouagadougou, l’Espace Culturel Gambidi dont une scère porte le nom de Sony Labou Tansi, et une station radio de sensibilisation. Jean-Pierre s’en est allé, laissant un immense héritage à la charge des hommes de théâtre du Burkina Faso. Un Penseur a dit que les grands hommes meurent deux fois, une première fois comme homme et une deuxième fois comme grand. Le vide laissé par l’illustre disparu interpelle la conscience universelle. Faisons qu’on ne parle jamais de Jean Pierre au passé
L’homme était grand parce qu’il savait partager, associant tous les créateurs disponibles à ses manifestations artistiques pour un enrichissement mutuel.
Il y a quelques mois en 2010, en décentralisant le FITMO sur l’Afrique de l’Ouest, il avait largement responsabilisé les jeunes acteurs culturels du Mali qui eurent ainsi l’occasion de s’initier à la gestion et à la régie des grands spectacles, à l’animation des regroupements culturels sous -régionaux.
Ainsi il venait de renforcer la coopération Sud – Sud dans le domaine de la culture tel que l’a souhaité le Sommet de la Francophonie tenu à Bruxelles et qui avait reconnu la culture comme le moteur du développement dans les pays A C P (Afrique, Caraïbes Pacifique).
Par son dynamisme, Jean Pierre a fait entrer le théâtre africain dans la cour des grands, dans les prés -carrés des institutions internationales. Il le réussira en se faisant élire comme Membre du comité Exécutif de l’institut international du théâtre I I T UNESCO – Paris et Président du Bureau Régional pour l’Afrique de I l’IT – Dakar. Je collaborais avec lui en tant que président de 1’1 I T – Unesco Mali. En 2009 le monde du théâtre Francophone lui rendra les plus grands honneurs à Cotonou.
Directeur de l’Institut supérieur de l’image et de son du Burkina, il avait métamorphose ce domaine en l’ouvrant au vent de l’esprit.
C’est dans le cadre de la coopération entre l’université de Bamako de celle de Ouagadougou qu’il avait rendu une visite de courtoisie à notre chef de DER de Lettre et Arts. La survie de ce projet serait un hommage en sa mémoire.
Excellence Monsieur l’ambassadeur nous osons compter sur votre disponibilité pour nous aider à réaliser ce beau rêve qui se veut, une synergie entre les chercheurs et les créateurs de nos institutions universitaires.
A travers le théâtre – débats, Jean Pierre Guingané explorait de nouveaux territoires en l’homme, entreprenait des investigations, une aventure, l’opportunité de connaître des mondes, des cultures et des gens d’horizons très différents.
Avec Idrissa Ouèdrago, le cinéaste il créera la Tragédie du roi Christophe d’Aimé Césaire à la Comédie Française. A Manille, aux Philippines, il fera découvrir un pan du " Malade imaginaire " de Molière dans une technique scénique burkinabé. Il créera de nombreuses oeuvres africaines pour décloisonner le théâtre de notre continent.
Jean-Pierre Guingane relevait ainsi les défis qu’il se fixait en puisant dans les sources suivantes :
Sa culture médiatique
Son honnêteté intellectuelle
Son sens de la responsabilité dans la liberté
Son appel fraternel au dialogue entre les cultures et partant entre les citoyens, entre les peuples, entre les religions et les civilisations
En tant qu’écrivain, metteur en scène, communicateur, Jean Pierre avait fait de la paix sont credo, parce qu’indispensable à la démocratie et au développement.
C’est cette vision qu’il nous laisse à travers les messages de ses nombreux personnages dont cette intervention de Watila, en.page 86 de la pièce la " Savane en transe ". " Il n’existe pas de guerre juste et de guerre injuste Toute guerre est mauvaise. C’est ce que je vous demande de comprendre et de transmettre aux générations futures ". Ce message doit parvenir à destination, selon les voeux de Jean-Pierre Daogo Guingané. A tout prix et a n’importe quel prix.
Gaoussou DIAWARA
*Département des Lettres et
Arts /Flash Bamako
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