Discours Me Soyata Maïga, Rapporteur Commissaire à la Commission africaine des droits de l’homme

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Discours Me Soyata Maïga, Rapporteur Commissaire à la Commission africaine des droits de l’homme
Me Soyata Maiga

J’ai l’insigne honneur en ma qualité de Rapporteure Spéciale sur les Droits de la Femme en Afrique, de vous adresser les salutations et les remerciements de la Commission Africaine des Droits de l ‘Homme et des Peuples, pour avoir accepte de prendre part a ce séminaire combien significatif, en raison de la thématique et des Enjeux dont nous allons discuter durant ces trois jours.

Permettez-moi d’adresser également nos vifs remerciements à Mme la Ministre de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, qui a bien voulu accepter de nous faire bénéficier de l’expertise de ces services techniques, ce qui a facilité l’organisation de l’évènement, dans des délais relativement courts.

Cet engagement de sa part, témoigne de l’intérêt que la République du Mali porte au travail de la Commission Africaine, première institution en charge de la Promotion et de la Protection des Droits de I ‘Homme et des Peuples sur notre Continent.

La CADHP a été créée en 1987 par I’OUA en tant qu’organe technique indépendant en vertu des dispositions de la Charte Africaine des droits de l ‘Homme et des Peuples, le seul instrument juridique obligatoire, à avoir été, à ce jour, ratifié par l’ensemble des 53 Pays africains.

Malgré les contraintes liées à l’insuffisance des ressources humaines, matérielles et financières qui lui sont allouées, notre institution a su instaurer, au fil des années, un dialogue constructif avec les Etats parties à la Charte Africaine, autour de la responsabilité première qui leur incombe dans la promotion et la protection des droits de I’ homme aux niveaux national et régional. La Commission Africaine, se félicite également du partenariat dynamique et fécond qu’elle a su développer avec les organisations’ de la Société Civile africaine qui tiennent en prélude a chacune de nos Sessions ordinaires, un forum, unique en son genre appelé Forum des ONG et au sein duquel elles analysent la situation des droits de l’homme sur Ie Continent, dénoncent les abus et les violations constates et élaborent des résolutions sur des thématiques ou des cas spécifiques qu’elles portent ensuite à l’attention de notre institution.

La Commission Africaine a, à travers une feuille de route signée en janvier 2012 avec Ie Haut Commissariat aux Droits de l’Homme des Nations-Unies, développe plusieurs axes de collaboration avec les Mécanismes· spéciaux des Nations Unies à travers des missions conjointes, des ateliers, des déclarations et communiques conjoints.

C’est grâce aux efforts conjugués de l’ensemble de tous ces acteurs que la Commission Africaine a réussi à étendre son influence au delà des frontières de notre Continent.

Notre organe a pu également élargir le champ de ses compétences en s’inspirant dans son travail, des règles et principes applicables dans le droit international relatif aux droits de l’Homme et des Peuples. C’est ainsi qu’en relation avec les nouveaux développements et enjeux en matière des droits de l’homme, la Commission Africaine a, au fur et à mesure, crée en son sein, des groupes de travail et des mécanismes spéciaux dont celui de la Rapporteure Spéciale sur les Droits de la Femme en Afrique qui a pour mandat entre autres, d’analyser les causes et les conditions qui créent et perpétuent certaines formes de violations des droits des femmes; d’identifier les possibilités pour la Commission Africaine d’exercer une action plus efficace dans Ie domaine du respect des droits de la femme et de la petite fille ainsi que dans la mise en œuvre par les Etats parties, des instruments juridiques nationaux, régionaux et internationaux pertinents;

II s’agit aussi pour la Rapporteure d’aider à l’harmonisation des initiatives des Gouvernements, des ONG et des institutions Nationales des droits de l’Homme sur les questions relatives aux Droits de la Femme.

Madame la Ministre, Distingues invités

Nous travaillons en faveur de la ratification continentale du Protocole sur les droits de la femme en Afrique communément appelé Protocole de Maputo, adopté en 2003 par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement de l’Union Africaine et entre en vigueur en Novembre 2005.

En plus de cet instrument juridique africain novateur et plein de promesses, pour la réalisation du bien-être des femmes et des filles sur le Continent, les Chefs d’Etat africains ont adopté en juillet 2004 la Déclaration Solennelle sur l’égalité entre les hommes et les femmes en Afrique en vertu de laquelle ils se sont engagés à faire rapport annuellement, à la Commission de l’Union Africaine, sur les progrès réalisés dans l’intégration du Genre dans les Plans Politiques et Programmes, en vue d’échanger au cours de leurs sessions ordinaires sur les défis rencontres, mais aussi sur les bonnes pratiques relevées dans les expériences/pays.

Mais le constat a été largement fait qu’en dépit des engagements pris et des obligations qui incombent aux Etats en vertu des instruments juridiques internationaux régionaux de protection des droits de femmes, tels que la CEDEF et son protocole facultatif, la Convention sur les droits de l’enfant, les femmes et les filles en Afrique, continuent d’être l’objet de discriminations, de pratiques néfastes, et de multiples formes de violation de leurs droits fondamentaux.

A l’occasion des visites et missions qu’il m’a été donné d’effectuer, dans plus de 25 pays africains, j’ai pu constater la similarité d’un certain nombre de défis qui expliquent en partie cette situation, notamment le déficit législatif, la reconnaissance des textes’ par les femmes, la faiblesse et les dysfonctionnements des appareils judiciaires nationaux, l’absence et ou l’insuffisance de mesures efficaces permettant l’application effective des lois visant à assurer la protection des droits des femmes.

Mais c’est dans notre sous-région Ouest-Africaine que la situation est préoccupante. En effet celle-ci reste largement marquée par la persistance des conflits armes, l’instabilité sociale et politique, les coups d’état, l’insécurité alimentaire, l’existence de pratiques culturelles et traditionnelles néfastes et discriminatoires à l’égard des femmes et des filles qui sont autant de facteurs constitutifs de violences à leur égard et qui les maintiennent dans la pauvreté et dans un état permanent de vulnérabilité juridique et économique.

Les droits des femmes et des filles sont particulièrement mis en mal dans les pays en conflit et dans ceux ou perdurent les crises politiques sécuritaires à répétition.

Malgré tout, au cours de 27 années d’existence et de pratique de la Commission, peu de femmes victimes des violations des droits de l’homme ont pu saisir notre organe pour exercer leurs droits, à travers le mécanisme de Communications/Plaintes, en vue d’obtenir réparation, non pas parce qu’elles ne Ie souhaitent pas, mais parce qu’il est possible qu’elles ne comprennent pas la procédure ou qu’elles n’aient pas les moyens, ni la disponibilité de l’assistance judiciaire pour le faire.

C’est pourquoi des le début du conflit au Mali, la Commission Africaine a travaillé, avec plusieurs organes de l’Union Africaine et les mécanismes des Nations Unies sur la protection des femmes et des enfants, à travers notamment l’adoption de Résolution spécifiques, une mission d’établissement des faits et la mise en place d’une mission d’observation des droits de l’homme dirigée par la Commissaire en charge des droits de l’homme au Mali.

Mme la Ministre de la femme, Honorables invités, Chers participants,

Au terme d’une année d’implication au Mali, il sied à présent, pour la Commission, de discuter avec les acteurs étatiques, les organisations féminines et les mécanismes internationaux et régionaux en charge des questions des droits de l’homme et de protection des droits des femmes, autour de l’expérience des uns et autres en vue de dégager les constats/besoins/pertinences des interventions et du partenariat, d’échanger sur les actions et initiatives, afin de voir si les attentes et préoccupations des femmes et des filles ont été prises en compte, intégrées au simplement ignorées.

Les femmes elles-mêmes, en particulier dans les régions affectées par les conflits, et au sein des populations déplacées et refugiées, ont-elles été impliquées dans les dynamiques de sortie de conflits, ont-elles été conscientisées sur leurs rôles et leurs responsabilités ? Les femmes victimes ont-elles été entendues et obtenues réparation? Quel a été le sort des auteurs et complices des viols et autres violences physiques, psychologiques et économiques ?

Au cours de ces trois jours d’échanges et de discussion, que· nous voulons riches et participatifs, j’ exhorte les ns et les autres à nous faire part des leçons apprises, des bonnes pratiques identifiées dans l’accompagnement économique, psychologique et juridique des victimes, et surtout de formuler des Recommandations pertinentes dans le but de renforcer l’environnement de protection des droit des femmes et des filles et de favoriser une plus grande participation de leur part dans les mécanismes de gestion post-conflit et dans la Gouvernance politique, surtout à l’approche des nouvelles échéances communales.

C’est sur ces quelques mots de remerciements et de présentation des attentes du séminaire, que je voudrais Mme la Ministre, avec votre permission, céder la parole à mon ami et confrère Guillaume Ngefa, Représentant du Haut Commissaire aux droits de l’homme des Nations Unies au Mali, pour no us entretenir sur le thème de notre séminaire, avec sa vision et sa riche expérience.

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