La polygamie est beaucoup pratiquée dans nos sociétés traditionnelles. Elle n’est pas sans conséquences. Elle crée des dissidences entre les couples, trouble de nombreux foyers. Rares sont les coépouses qui s’entendent, qui s’aiment. Dès que le mari décide de prendre une autre, la femme se montre rebelle, récalcitrante, ne respectent plus personne même les parents et proches du mari, qui deviennent des ennemis jurés. Elle s’affole, n’accomplit plus correctement ses devoirs conjugales, consacre peu de temps pour son propre entretien, s’erre souvent sans destination précise, ne s’habille plus correctement.
Cette enfoirée désorientée se confie à n’ importe qui, expose ses problèmes partout, même à un enfant croisé dans la rue, toutes les paroles, mêmes les plus viles sont prises au sérieux, rien n’est à négliger. Prise dans l’étau de la jalousie et de l’agressivité, elle ne fait plus la différence entre ses amis et ses ennemis. Par la force des choses, elle va jusqu’ à utiliser la violence, va à la rencontre de la future coépouse pour lui barrer la route, la tabasser. C’est la débâcle totale. Dans cette situation de détresse, les marabouts, les charlatans, les voyants et autres prédicateurs sont les plus sollicités. Dans tous les cas, ils trouvent leurs comptes. Peu importe le prix imposé par ces faiseurs de talismans, ces prédicateurs, ces invocateurs de Dieu, l’essentiel pour la déboussolée c’est que la kognomousso ne rentre pas sous le toit de son mari. Les boniments, les futiles sont considérées comme de la pire réalité. Tous les stratagèmes sont alors bons pour gâter le mariage. En cas d’échec, ces soit disant savants sans état d’âme trouvent des alibis pour se défendre, est-ce que le médicament a été correctement utilisé par la cliente ou les sacrifices donnés selon les consignes, si tout cela est irréprochable, ils vous diront tout simplement, c’est une question de temps, ça ira.
Plusieurs raisons poussent l’homme à marier plusieurs femmes. Par exemples si la femme ne respecte pas son mari, ni les parents de celui-ci, lorsqu’ elle le prive de rapports sexuels, si elle est infidèle ou est atteinte d’une maladie incurable ou stérile, etc.
Ce sont les hommes mêmes qui sont souvent à l’ origine de tous ces troubles faits. Certains montrent carrément leur préférence parmi leurs épouses. Ils ne les traitent pas de la même manière, sont injustes.
A propos, il est dit dans le Coran : Dieu (A Lui, la puissance et la gloire) avait toléré à l’homme d’épouser plus qu’une femme selon ce verset : (… épouser trois ou quatre. Si vous craignez de ne pas les traiter avec équité, n’en épouser qu’une) (Coran IV, 3).
IL avait d’ autre part montré que cela n’est pas toléré que dans la nécessité absolue. IL a mis en garde les hommes en disant : « Vous ne parviendrez jamais à faire régner la concorde entre vos femmes, quelle que soit votre bonne volonté. Toutefois ne vous laissez pas emporter par vos penchants au point d’en délaisser une complètement ». (Coran IV, 129).
« Si la femme n’engendre que des filles comme il arrive dans la plupart du temps, cela ne constitue pas une raison valable pour que l’homme ait une autre qui pourra lui donner des garçons, selon ses présomptions. La femme n’est plus responsable, car c’est Dieu seul qui donne la progéniture. Il a dit (Il crée ce qu’il veut. Il donne aux uns des filles, aux autres des garçons. A d’autres garçons et filles. Il rend stérile qui il veut. Il est Savant et Puissant (Coran XL II. 49-50)
Le prêcheur Lassana CISSE, précise « Au cas où la première femme est stérile alors que l’homme ne peut pas se séparer d’elle et aspire à une vie où il aura des enfants, l’Islam tolère à cet homme de prendre une 2ème épouse qui pourra lui assurer une descendance. Lorsque la femme est atteinte d’une maladie incurable, le mari a le droit de se marier ’avec une autre qui lui assure le service et le bien être pour éviter les relations sexuelles proscrites. Lorsque l’ homme , pour garder sa chasteté, ne peut pas se contenter d’ une seule femme, a le droit de se marier avec une autre à condition qu’ il soit capable d’ assurer le ménage, de dépenser pour les deux et de remplir toutes ses obligations envers elles. Si le nombre de femmes dépasse considérablement celui des hommes par exemple à la suite de guerre et pour ne plus laisser les femmes faire le trottoir, l’Islam a toléré aux hommes d’avoir plus qu’une seule épouse »
Gounédy COULIBALY, Planton au CAP « Nous les maures noirs, nous pratiquons maintenant la polygamie. Ce sont les maures blancs qui continuent toujours avec la monogamie. Nos mariages ne sont pas célébrés à la mairie. Seul le mariage religieux compte pour nous, c’est facile de le défaire. Avec le mariage civil, si tu veux divorcer ta femme, on te trimbale devant les tribunaux. C’est compliqué surtout si la femme n’est pas consentante », dit-il en tirant sur sa pipe bourrée de tabac.
« Depuis que mon mari a épousé une seconde femme, il a changé. Il ne veut plus me sentir, si je mets de l’eau pour sa toilette lui, il refuse de se laver. Il ne mange plus mes plats. Il a déménagé toutes ses affaires chez la Kognomousso, m’a coupé même le lit. Je ne comprends rien. On dirait que j’ai préparé du poulet et ses déchets pour le lui donner. Comme disent les bambaras : A bé komi gné chè na bo dé tobi ka sigui a koro », raconte une femme.
Et un commerçant d’ajouter « Ma première épouse a des problèmes de santé, elle a été opérée 3 fois. J’ai épousé une autre femme »
Birama SISSOKO, Manœuvre « Dans nos milieux soninkés, l’homme épouse jusqu’ à quatre femmes. Mais chez les fonctionnaires, ce n’est pas le cas. Vous verrez rarement un fonctionnaire prendre deux femmes. Ils ont peur de leurs femmes qui sont extrêmement jalouses»
Bassirou DOUMBIA, enseignant, Ecole B Diéma « La polygamie fait partie de nos coutumes, on ne peut pas s’en défaire. Que l’homme ait les moyens ou pas, s’il désire prendre plusieurs femmes, il peut le faire »
« Je suis la première épouse de mon mari. Je n’ai jamais eu d’enfants avec lui depuis que je suis mariée, il y a près de dix ans. Mes deux enfants appartiennent à mon premier mari décédé par suite d’accident. Mon époux a pris une deuxième femme. Malheureusement cette femme aussi n’a pas eu d’enfants. Un jour, notre mari nous a amenées toutes au Centre de Santé pour passer la visite. Les résultats ont montré que le problème se situe à son niveau. Malgré tout, il continuait à nous accuser. Il a épousé une troisième femme, ce fut pareil. Il voulait nous répudier toutes, mais ses amis ont intervenu. Finalement, il s’est résigné » témoigne Sétou KONE, Vendeuse de condiments
« Un jour, une femme est venue me consulter. Elle m’a proposé une grande somme d’argent pour mettre fin aux jours de son mari qui voulait marier une autre femme. J’ai fais savoir à la dame que je ne suis pas un charlatan tueur. Mais que je peux faire quelque chose pour empêcher ce second mariage. Elle tenait à son projet, je l’ai renvoyée de chez moi », explique un charlatan, le bonnet incliné.
« Quand j’ai informé mon épouse de mon intention de prendre une autre femme, elle n’a pas posé de problème et s’est contentée de dire simplement Ni ka heren bala Allah ka latiké, autrement dit s’il y a ton bonheur dedans, que ça se réalise. Ma femme n’a pas été à l’école, mais elle est très compréhensive. Elle ne s’oppose jamais à ma volonté », déclare Adama TRAORE, Volontaire de la Croix Rouge.
« Moi personnellement, je n’ai pas de problème. J’ai 2 coépouses, mais nous nous entendons parfaitement, nous sommes comme des sœurs utérines. Notre mari est un homme juste, il partage tout équitablement entre nous, sans distinction. Il ne montre jamais qu’il aime une plus que l’autre, en tout cas selon mes observations », avoue Hawa DIAWARA, Présidente Association Kissiba
« Mon mari est un inconscient. Depuis qu’il s’est marié avec une autre femme, il a arrêté de faire des rapports sexuels avec moi durant mes nuits. C’est lorsqu’ il est en conflit avec cette dernière qu’il me considère alors, moi aussi je lui montre toutes mes couleurs, je ne le laisse pas faire. IL dort les mains entre ses jambes », déclare une femme dans l’anonymat.
« Une seule femme constitue un fardeau, à plus forte raison plusieurs. Avec les temps qui courent qui est fou pour épouser même une femme. Je préfère rester célibataire, même quand je gagnerai du boulot », renchérit un homme en prenant du thé avec un enfant morveux.
Ouka Ba Diéma
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