Adoption de politique nationale de réparation en faveur des victimes des crises au Mali, validation de la méthodologie du rapport sensible aux enfants, organisation des audiences publiques… La Commission Vérité Justice et Réconciliation (CVJR) relève des défis majeurs en vue de restaurer la dignité des victimes par une réparation adéquate des préjudices.
Créée pour faciliter le dialogue, le pardon, le vivre ensemble et les réparations en faveur des victimes des crises au Mali, la Commission Vérité, Justice et Réconciliation est désormais dotée d’une Politique nationale de Réparation et son Plan d’actions 2021-2025, adoptée par le Conseil national de Transition, en Novembre 2022.
Trois mois plus tard, et dans la dynamique de fortifier la CVJR, le Conseil des ministres a adopté au début Mars, des projets de texte relatifs à la création, à l’organisation et aux modalités de fonctionnement de l’Autorité de Gestion des Réparations en faveur des Victimes des Crises.
Respectueuse des questions relatives aux enfants et aux droits humains, en Octobre 2022, il y a eu la validation de la méthodologie du rapport sensible aux enfants par la CVJR. Laquelle a tenu sa 5eme audience consacrée aux femmes victimes de violences sexuelles et aux enfants victimes de conflits, en Juin 2022. Une véritable tribune offerte aux victimes pour livrer à l’opinion publique leur version des faits et donner l’opportunité aux citoyens de comprendre ces évènements marquants du pays.
«Ces audiences ont pour but d’établir la vérité, de rendre aux victimes leur dignité et une reconnaissance nationale, voire contribuer à la réconciliation et la stabilisation », note un observateur indépendant.
31.588 dépositions
Faut-il rappeler que la Commission Vérité, Justice et Réconciliation a été instituée par les plus hautes autorités du pays en réponse à la crise multidimensionnelle de 2012. Opérationnelle sur l’ensemble du territoire, à la date du lundi 24 Octobre 2022, le nombre de victimes ayant fait leurs dépositions à la CVJR s’élevait à 31.588 personnes.
Sur le terrain des actions salvatrices pour promouvoir la paix et le vivre ensemble, menées par la CVJR sont illustratives. Outre des dépositions enregistrées et des audiences organisées, tout un arsenal de travail a été fait, en partenariat avec des organisations de la société civile, notamment sur le concept de justice transitionnelle au Mali.
«Nous avons travaillé avec la CVJR dans le cadre de nos activités sur la justice transitionnelle, à Tombouctou en 2021 et à Gao en 2022. Ça été une occasion pour elle d’expliquer sa mission, d’informer sur l’état des lieux des dépositions faites », se souvient Ibrahima Amadou Maïga, Secrétaire général du Réseau National pour l’Eveil Démocratique et Patriotique (RENEDEP). Et d’ajouter : « La société civile peut et doit faire le plaidoyer pour l’accélération du processus de justice transitionnelle à travers des actions réparatrices et dédommagement des victimes comme recommandé dans le rapport de la CVJR ».
Bénéficier de réparations
Participante à l’atelier de validation de la politique nationale de réparation, en Février 2020, la représentante de l’ambassadeur du Canada au Mali, Mme Stefanie Bergeron avait rappelé toute l’importance de la justice pour les victimes de crise.
«La construction d’une paix durable à la suite d’un conflit ne peut se faire sans une réconciliation véritable, qui englobe la justice pour les victimes. Cela inclut le droit aux réparations pour toutes les victimes de violations des droits humains, sans discrimination », avait-elle estimé.
C’est dire que l’adoption de la politique nationale de réparation des victimes a été un ouf de soulagement pour la Coordination nationale des associations des déplacés et victimes de guerre dans notre pays. On se rappelle que la présidente de cette Coordination Mme Haidara Amina Maiga avait incessamment invité le Président Assimi Goita a adopté cette loi, avant la fin de la transition, pour que les victimes puissent bénéficier de réparations.
A noter que, les trois premières audiences ont porté sur les atteintes au droit à la liberté, les atteintes au droit à la vie, les disparitions forcées. S’agissant de la 4ème audience, elle a été consacrée aux trois précédentes. La 5ème audience statuant sur le thème : « les femmes victimes de violences sexuelles et les enfants victimes de conflits » a enregistré le témoignage de 12 victimes dont 10 femmes et 2 enfants. Signalons que ces femmes ont été victimes de violences sexuelles et les enfants, victimes pour le premier de balle perdu ayant abouti à l’amputation de son pied droit et le second d’enrôlement forcé dans un groupe arme.
Pour les responsables de la CVJR, le bilan des audiences est satisfaisant. Au regard de son importance, il est prévu qu’une agence de réparation et un centre pour la paix et l’unité nationale doivent remplacer la CVJR afin de continuer sa mission.
Ousmane A. Morba
Source : Le Nouveau Courrier