La structure de la subvention du gaz pèse gravement sur les opérateurs privés et sur les finances de l’Etat. Il faut la modifier mais à quel prix ?
Depuis plus de deux semaines, les ménages sont privés de gaz butane. Et pour cause, les opérateurs de gaz ne distribuent plus le combustible. Au départ, ils manquaient eux-mêmes de gaz. Leurs cuves étaient vides. Les opérateurs criaient à la faillite à cause d’un retard de paiement de la subvention de l’Etat. L’enveloppe s’élevait jusqu’à 3,5 milliards de Fcfa. Face à l’ampleur de la crise du gaz sur le marché, les pouvoirs publics ont réagi en débloquant 1,5 milliard de Fcfa la semaine dernière. Le Budget national doit donc encore 2 milliards. C’est ce que retient principalement Oudiari Diawara, le président du regroupement des opérateurs gaziers du Mali. Ce paiement partiel est insuffisant et ne constitue pas la solution, juge-t-il. Il faut, préconise-t-il, payer entièrement la subvention et faire en sorte que les mêmes difficultés ne se reproduisent plus. En réalité, explique-t-il, « le sous-secteur du gaz butane souffre de manque de financement et de volonté politique ». En effet, tous les ans, la même difficulté refait surface : le budget annuel alloué à la subvention du gaz est nettement inférieur à couvrir une consommation nationale qui ne cesse de s’accroitre. Pour preuve, l’enveloppe de cette année (4 milliards de Fcfa) est épuisée depuis avril. « Pour régler toutes les factures des mois restants de l’année, il faut attendre jusqu’au premier, voire au deuxième trimestre de 2012 où nous serons payés sur le budget de 2012. En attendant il n’y aura presque rien pour le reste de l’année », constate Oudiari Diawara. « Et, il en est ainsi d’année en année. Dans un tel cercle vicieux, nous, en tant qu’opérateurs économiques, ne pouvons pas vendre à perte encore moins vendre sans être sûrs du paiement de nos factures », souligne-t-il avec amertume. « Nous ne sommes pas prêt à reprendre les activités dans de telles conditions », assure-t-il. Face à cette crise de confiance, les opérateurs gaziers ont donc décidé de suspendre la livraison de bonbonnes de gaz jusqu’au moment où l’Etat apportera des réponses durables aux maux qui gangrènent le sous secteur. Pourtant, les solutions existent. A défaut de trouver solutions innovantes, notre pays pourrait faire comme des pays voisins chez lesquels la subvention est soutenue par des prélèvements sur les produits de grande consommation ou encore des fonds étrangers.
DEFAUT DE MAITRISE DE LA SUBVENTION. Au Burkina Faso, c’est l’Etat lui-même qui s’occupe du ravitaillement du pays tandis que la distribution est confiée à des sociétés de distribution. Au Sénégal, l’Etat est actionnaire principal du sous-secteur pour mieux contrôler la situation du produit qui devient de plus en plus stratégique. La conséquence directe de ce protectionnisme est que nos sociétés ne peuvent plus acheter du gaz au Sénégal sans une autorisation spéciale du ministre de tutelle. En Côte d’Ivoire d’où, avant la crise, provenait la quasi totalité de la consommation malienne, les règles du marché se durcissent. « Non seulement, il faut du cash, mais aussi le gaz n’est pas toujours disponible ». En ce qui concerne l’Algérie qui produit du gaz, c’est l’insécurité totale sur la route. Pour Oudiari Diawara, toutes ces difficultés ne facilitent pas la tâche aux opérateurs qui doivent toujours payer plus chère pour acheminer le gaz à bon port. Mais la plaie reste encore le manque de maîtrise de la subvention accordée par l’Etat.
Quelle est alors l’incidence financière de la subvention du gaz sur les sociétés gazières ? Pour répondre à cette question, notre interlocuteur aligne les chiffres à l’aide d’une calculatrice de poche. Le prix du kilogramme du gaz au mois d’octobre 2011 est fixé à 956 Fcfa, selon un arrêté du ministre des Finance en date d’octobre 2011. Pour une société de distribution de gaz qui vend par exemple au cours de ce même mois 25 000 bouteilles de 6 kg, les recettes normales de la vente des bouteilles à raison de 956 Fcfa le kg seront de 143 400 000 Fcfa. En réalité dans ce montant, la part de la subvention de l’Etat qui est de 636 Fcfa par kg s’élève à 95 400 000 Fcfa. Le client paie, en effet, son gaz à 320 Fcfa le kg dans les deux formats de bouteille subventionnée. Sur les 143 400 000 Fcfa