Depuis le début de l’état d’urgence le 12 janvier 2013, le lot des mécontents ne cesse de grossir. Les artistes dès le début se sont plaints, le ministre Bruno Maïga les a rencontrés pour fairebaisser la tension et expliquer le bien fondé de l’état d’urgence.
Mais aujourd’hui force est de reconnaître que les artistes maliens surtout les plus jeunes sont confrontés à des pires difficultés qu’ils n’ont jamais connues. Mamadou Diabaté batteur de djembé nous déclare : “ quand on a fait la restitution de la rencontre avec le ministre on était content, mais aujourd’hui on ne fait pas le sumu, pas de mariage, pas de cérémonies festives.
Les griottes qui nous donnent du travail ne bougent plus à cause de l’état d’urgence, cette situation ne peut pas continuer. Comment va-t-on vivre et nourrir nos familles ? “ Assis sur un tas d’habits, des baffles et micros éparpillés, Madou Kouyaté un jeune artiste qui joue le n’goni n’en revient pas, il a été surpris de voir ses affaires jetées au dehors par son propriétaire. “J’ai toujours dit que l’état d’urgence est contre nous les artistes, on me dit que c’est pour le bonheur du pays. Mais ce bonheur fait mon humiliation, ça fait 13 ans que je suis ici, personne n’a un franc de crédit avec moi, à plus forte raison les fraisde location de ma maison “.
En quittant N’Tomikorobougou, Madou Kouyaté nous a fait savoir qu’un huissier a cadenassé les chambres de trois de ses frères à Korofina. Ils sont guitariste, bassiste et joueur de ngoni. Ils sont en chômage, alors qu’ ils jouaient dans des orchestres lors des concerts, des soirées récréatives ou lors des animations dans les bars et restaurants, rien ne marche depuis trois mois.
” Je ne pouvais jamais imaginer cela, l’huissier même nous a dit qu’il comprend notre situation parce qu’on a toujours payé avant la fin du mois, mais cette fois, il a trop écouté la propriétaire de la maison. Et sans nous accorder certaines circonstances atténuantes, il ferme tout avec nos affaires à l’intérieur et on est obligé de faire quelque chose “. Malgré cette situation certains artistes se tirent d’affaire, ceux qui ont économisé bien avant la crise parviennent à faire face au quotidien. Pour Madou Diabaté la situation de ces artistes est réelle. ” Je suis d’accord mais ce ne sont pas des gens de notre catégorie, ceux qui vivent en fonction des événements. Ce sont des gens qui sont dans leurs propres maisons, ou jouent avec des grands artistes, sinon tous ceux qui ont des marchés à Bamako souffrent. On a tous des problèmes “.
Pour ne pas rester comme ça, certains artistes ont repris service avec les animations dans les bars, restaurants et espaces culturels pour éponger les dettes avant la fin de l’état d’urgence. Qui sera prorogé jusqu’à une semaine de l’ouverture des campagnes électorales.
En tout cas les artistes ne savent plus à quel Saint se vouer, même Haïra Arby qui voulait faire la dédicace de son nouvel album à la fin de ce mois, sur les dunes à Tombouctou est obligée de revoir son programme, car l’état d’urgence sera prorogé par les députés à l’assemblée nationale.
Kassim TRAORE