La mission de bons offices que six chefs d’Etat de la Cédéao devaient effectuer dans notre capitale, hier, a été annulée in extremis pour, dit-on, des raisons de sécurité. En effet, quelques manifestants pro- CNRDRE s’étaient rassemblés sur le tarmac de l’aéroport protestant contre la venue des chefs d’Etat qui avaient été dépêchés, suite au sommet extraordinaire de l’organisation sous-régionale du 27 mars à Abidjan, pour présenter le plan de sortie de crise aux nouvelles autorités maliennes. Arrivé sur les lieux aux alentours de 10h30, le président du CNRDRE, le capitaine Amadou Haya Sanogo, a demandé aux manifestants de quitter le tarmac. Ce qui fut aussitôt fait. D’autres manifestations d’opposants à la venue de la mission de haut niveau de la Cédéao avaient eu lieu également à Bamako devant la Bourse du Travail et à Kati où les épouses des militaires sont sorties massivement pour soutenir le CNRDRE.
C’est avec regret que les membres du CNRDRE, avec à leur tête le capitaine Amadou Haya Sanogo, président de l’instance dirigeante, ont dû rentrer sans avoir pu rencontrer les chefs d’Etat de la Cédéao qui devaient arriver hier dans notre capitale. En effet, à la suite du sommet extraordinaire des chefs d’Etat et de gouvernement tenu à Abidjan le 27 mars 2012, il avait été décidé de dépêcher les présidents de Côte d’Ivoire, du Nigeria, du Burkina Faso, du Niger, du Libéria et du Benin pour venir rencontrer les mutins qui ont renversé le président Amadou Toumani Touré dans la nuit du 21 au 22 mars 2012. L’objet de cette visite était de présenter aux nouvelles autorités maliennes, issues du coup d’Etat, un plan de sortie de crise devant permettre le retour à l’ordre constitutionnel. La Cédéao avait menacé de sévir par la force au cas où les militaires refuseraient d’obtempérer au plan qui devait leur être remis précisément hier lors du déplacement que ces six chefs d’Etat devaient effectuer dans notre capitale. Plusieurs sanctions avaient été brandies notamment par le président béninois Thomas Yayi Boni allant jusqu’à préconiser l’usage de la force armée pour dégager le CNRDRE. Ce qui avait surchauffé une atmosphère déjà très électrique à Bamako où partisans et adversaires des militaires ne cessent de battre le pavé dans un sens ou dans l’ autre.
C’est donc au moment même où les nouvelles autorités attendaient les différentes délégations à l’aéroport international de Bamako-Senou, qu’une information est tombée : les chefs d’Etat ont décidé d’annuler leur venue à Bamako suite à la manifestation des partisans du CNRDRE qui s’étaient momentanément installés sur une partie du tarmac. Arrivés sur les lieux aux environs de 8 heures, les manifestants – estimés à une centaine – avaient pris place sur le tarmac brandissant des banderoles hostiles à la Cédéao.
Arrivé à l’aéroport vers 10h30, le président du CNRDRE, Amadou Haya Sanogo, s’est directement tourné vers les manifestants en leur demandant de quitter les lieux pour ne pas donner prétexte à ceux qui penseraient que les chefs d’Etat de la Cédéao n’étaient pas les bienvenus chez nous. Il a salué les manifestants pour leur soutien ” aux militaires qui ont sauvé le Mali “.
Sans polémique, les manifestants se sont transportés vers le parking de l’aéroport tout en scandant des slogans hostiles à la Cédéao et au président déchu ATT. En tout cas, ils étaient loin des officiels et même de la presse. Les uns et les autres avaient même pensé qu’ils étaient rentrés paisiblement à la maison. Avant d’apprendre, aux alentours de 12 heures, que les chefs d’Etat ont annulé leur venue dans notre capitale. Motif officieusement invoqué : la sécurité n’est pas totale. Aucune raison officielle de l’annulation de cette mission ne sera donnée à la presse qui avait fait le pied de grue, trois heures durant devant le salon présidentiel près du tarmac.
Au moment où la presse nationale et un nombre impressionnant de confrères venus des quatre coins de la planète attendaient, de la Bourse du Travail nous parvenaient des informations sur les affrontements entre les partisans du régime militaire et les membres du Front uni pour la sauvegarde de la démocratie. A Kati également une marche de soutien au CNRDRE était organisée au même moment et qui ne cachait pas, là aussi, son hostilité à la venue de la délégation de haut niveau de la Cédéao.
Après plusieurs heures d’attente (de 10h30 à 13h)à l’aéroport et plusieurs minutes de négociation au téléphone auprès des chefs d’Etat afin qu’ils se décident à faire le déplacement de Bamako, le président du CNRDRE et sa délégation ont rejoint son QG à Kati. Sous les applaudissements de la foule qui l’attendait près du parking, très très loin du tarmac. Voilà comment cette grande et décisive rencontre entre le capitaine Amadou Haya Sanogo et les six chefs d’Etat mandatés par la Cédéao a échoué.
On a appris qu’Alassane Dramane Ouattara avait rebroussé chemin quelques minutes avant l’atterrissage de son avion et que les autres chefs d’Etat l’ont rejoint le même jour à Abidjan. Pour certainement préparer une autre mission auprès du CNRDRE. Qui, nous l’espérons, sera la bonne.
Mamadou FOFANA