Climat tendu entre pouvoirs exécutif et judiciaire : Jusqu’où iront les magistrats ?

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Le ministre de l’Economie et des Finances, Dr Boubou Cissé a suspendu le lundi 24 septembre dernier, le salaire des magistrats en grève depuis le 3 août. En réplique, les deux syndicats (SAM et SYLIMA), dans un communiqué, ont dénoncé une prétendue affaire de corruption dont le ministre serait en cause. Ce n’est pas tout, ils menacent le gouvernement de procéder à d’autres révélations si leurs préoccupations ne sont pas prises en compte.

Les magistrats grévistes semblent avoir manqué de stratégie de communication en faisant ces accusations, espérant gagner la sympathie des justiciables. Des justiciables qui, depuis de longues semaines, souffrent de cette grève qui ne finit pas.

En effet, le ministre de l’Economie et des Finances Dr Boubou Cissé a ordonné de ne pas payer les salaires des magistrats grévistes à partir du mois de septembre 2018. Dès l’annonce de la nouvelle, comme par enchantement, ils ont ‘’révélé’’ des  malversations financières où le ministre en question serait en cause. Pire, pour faire aboutir leur lutte, ils menacent l’exécutif de faire d’autres révélations si le gouvernement continue sa campagne de provocation, tout en se réservant le droit d’entreprendre d’autres actions plus fortes.

Cependant, la question qui taraude les esprits est de savoir pourquoi étant au courant de cette affaire de malversations financières, les magistrats ont attendu que le ministre prenne ses responsabilités avant de pondre ce qu’ils appellent ‘’ des révélations’’. De nombreux citoyens ont réagi à cet effet. Et beaucoup ont qualifié l’attitude des magistrats de ‘’complicité’’ ou de ‘’chantage’’.  Mais ce qui parait évident, c’est que les magistrats ont raté le coche et ont manqué de stratégie de communication. Les réactions d’indignation des citoyens suite à leur communiqué ont fait le tour des réseaux sociaux. Suite à la publication d’un confrère qui a exprimé son indignation sur sa page facebook, un magistrat dont nous taisons le nom ne s’est pas empêché de réagir.

«Mais pourquoi vous acharner contre les magistrats comme ça ? Même si vous n’êtes pas juristes, vous savez que la politique judiciaire du pays est mise en œuvre par le Ministre de la Justice et ce dernier est nommé par qui ? Sachez que les magistrats poursuivants que sont les procureurs, reçoivent des instructions, imaginez le reste », a lâché un magistrat sur la page facebook d’un confrère

En tentant de calmer, le jeu, il ajoutera : «les magistrats ne sont rien dans la non poursuite des infractions économiques. Ils sont astreints à une obligation de réserve sinon vous auriez su beaucoup de choses. Rendre la justice est différent d’écrire un article de journal».

Il faut préciser que  la retenue de salaire ordonnée par le ministre est une conséquence logique de la grève des magistrats qui ont opté pour le jusqu’au-boutisme. Face à leurs menaces de divulguer d’autres «secrets» si leurs revendications ne sont pas satisfaites, un avocat adjuge que l’inadvertance est de taille.

Les deux syndicats de magistrats dans un communiqué avaient pointé du doigt  le Bâtonnier de l’Ordre des Avocats du Mali, accusé d’avoir adressé un courrier confidentiel au Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga. La réaction du Bâtonnier ne s’est pas fait attendre à travers un autre communiqué où il a réaffirmé sa liberté et son indépendance.

«Au sujet de l’information tendancieuse selon laquelle, le Bâtonnier aurait adressé un courrier confidentiel au Premier ministre, cette information n’est que pure affabulation et n’engage que son auteur ou ses auteurs. Le Barreau ne sera ni assujetti ni inféodé à quelque pouvoir ou entité que ce soit et encore moins à des syndicats fussent-ils des syndicats de Magistrats », précise le communiqué.

Dans ce bras de fer qui oppose les magistrats au gouvernement, ce sont les citoyens qui souffrent le martyre. De nombreux détenus attendent leur jugement pour être fixés sur leur sort tandis que les commissariats de police sont remplis de personnes qui ont dépassé le délai prévu par la garde à vue, sans oublier le nombre de dossiers en attente depuis des mois dans les tribunaux à cause de la grève des magistrats.

Moussa Sékou Diaby

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