Cette Tabaski tabasse qui et qui ?

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La tabaski, C’est la coquette et coûteuse fête annuelle ! Elle est la plus inspirante et la plus amusante des fêtes musulmanes. Quant on l’annonce, elle ne renonce point à se présenter sur la place publique de la croyance religieuse. Une fois apparue, elle incite à la parure, à la bonne bouffe et surtout à la solidarité agissante. En nous, autour de nous, elle ne passe jamais inaperçue. Perçue comme un coup de vent rafraîchissant pour le cœur et le corps des musulmans, la belle et bonne fête est maintenant transformée en coup de vent refroidissant. Car elle devient source de préoccupations pour la plupart des personnes occupées par la préparation de cette fête de Tabaski. Ainsi, par son coup de vent de préoccupations que les fêtards reçoivent de plein fouet, la Tabaski tabasse n’importe qui sur son chemin presque incontournable.

 

Différentes conceptions d’une fête

Dans la plupart des pays d’Afrique noire, l’écrasante majorité de ceux qui célèbrent annuellement cette Tabaski, ignore son origine et son sens.. Elle est  confondue à l’appellation et la signification des mots : L’Aïd al-Adha(la fête du sacrifice) et l’Aïd al-Kébir( la grande fête). Cette grande fête du sacrifice marque la commémoration de la soumission à Dieu du patriarche Ibrahim qui s’apprêtait à sacrifier, Ismaël, son fils aîné, sur ordre divin. Dieu lui a envoyé un mouton qu’il a égorgé en sacrifice à la place de son fils. Les musulmans font cette fête, le dixième jour du mois « Dou Al Hijja » du calendrier lunaire arabe. Mais tous les  pays, même des voisins, ne fêtent pas le même jour.  
À au moins un jour de l’Aïd el-Kébir, la propreté doit être de rigueur dans la maison et tout son contenu.
C’est suite à cette mesure d’hygiène que chaque famille musulmane, si elle a les moyens de le faire, sacrifie un de ces animaux (brebis, chèvre, mouton, vache ou chameau) après la prière matinale du jour de la fête. Il faut que l’animal soit étendu sur son flanc gauche et sa tête tournée vers
La Mecque ( côté Est) avant de l’égorger. De cette viande, quelques morceaux seront donnés en sacrifice aux plus pauvres musulmans. Car, à la période de cette fête, il faudrait augmenter le degré de la solidarité et de la tolérance qui incitent à donner, à  pardonner et aussi se faire pardonner. Ces comportements doivent se faire dans l’humilité tout en évitant les tapages et actes ostentatoires.

Même si elle est connue sous différentes appellations, l’Aid Al Adha, l’Aid Al Kébir, Tafaska ou Tabaski, la plus grande fête musulmane ne se pratique pas avec la même conception religieuse. En effet, de nombreux musulmans du Moyen Orient(considéré comme le berceau de l’Islam)  soutiennent que l’être humain effectue ce sacrifice une seule fois dans sa vie. Par contre dans d’autres pays, dont le Mali, le musulman doit annuellement faire ce sacrifice de bête si ses moyens financiers lui permettent.

 

Confusion autour du mot Tabaski    

Le terme Tabaski est dérivé de Tafaska qui est un mot de la langue amazighe d’Afrique du nord. Ce mot qui signifie offrande en amazigh n’a aucune racine de la langue arabe qui est un solide outil de communication de la religion musulmane. Fêtée annuellement en Afrique du nord, la Tafaska est une tradition non musulmane dont la pratique a commencé bien avant l’instauration de l’islam. Ainsi porteuse de rituel authentiquement africain, la Tafaska se fête dans tous les pays d’Afrique du nord de façon carnavalesque avec  des troupes musicales des danses et comédies. Des hommes déguisés amusent les enfants dans les rues pendant cette Tafaska qui dure entre 3 et 6 jours.

Bien qu’elle ait connu une déformation phonétique, cette Tafaska prononcée Tabaski dans plusieurs autres pays d’Afrique francophone ( Bénin, Burkina Faso, Cameroun, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal et Togo) y a toujours conservé son caractère traditionnel lors de sa célébration dans ces milieux  musulmans francophones.

 

La tabaski apparait donc comme une combinaison de l’aid Al-Adha, l’Aid Al-Kébir et de la Tafaska que les musulmans des pays cités fêtent  onéreusement . Dès qu’elle pointe à l’horizon, la terrible Tabaski apporte avec elle la cherté. Les prix des denrées de première nécessité, des ustensiles de cuisine, des produits de beauté et des vêtements deviennent exorbitants à la période de cette Tabaski. À quelques jours seulement de la récente fête de Tabaski du 06 novembre dernier, la bombonne de gaz pour la cuisson qui coûtait 2000 Fcfa est maintenant vendue à 6000 Fcfa. Cette Tabaski qui tabasse moralement les relations conjugales, familiales, bref sociales, n’épargne ni les pauvres ni les riches.

 

Des foyers conjugaux surchauffés

Généralement en Afrique et particulièrement au Mali, l’homme est considéré comme la principale source financière pour assumer des dépenses liées à la nourriture, au logement et à l’habillement. Gare à lui si son manque de moyens, même temporaire, survient au moment où la lune de Tabaski se présente. Très rares sont les femmes qui accepteraient d’entretenir un bon climat conjugal avec des maris dont les moyens sont devenus trop limités face aux multiples besoins liés à la Tabaski.

 

Des relations familiales sous tension

Dans le cas des couples qui ont des enfants et de surcroit des beaux-pères et des belles-mères, l’inquiétude chasse la quiétude dans le corps de l’homme à l’approche de la fête de Tabaski. De l’achat du mouton pour sa propre famille et celui de sa belle-famille( dans certains cas de figure) aux habillements de ou des enfants, sans oublier ses propres parents, des hommes mêmes aisés, constatent rapidement le dégonflement de leurs portes-feuilles. Même si quelques fois madame vient financièrement au secours le couple sans cesse de gauche à droite pour supporter des dépenses trop lourdes réellement et socialement.

  

Des liens sociaux tabassés par la Tabaski

Dès que l’atmosphère de la fête se fait sentir, des besoins inopinés surgissent de tous les coins sociaux. Ainsi commencent des quêtes insistantes pour des frais de coiffure et de couture, des prix d’habits prêt-à-porter ou des chaussures de qualité même pour ceux ou celles qui en possèdent en quantité.  Des frères, des beaux-frères, des cousins, des oncles, des tontons et surtout des fiancés et copains( Kamalen) qui ne pourront pas suffisamment répondre à ces demandes financières verront leurs liens sociaux, avec quémandeurs et quémandeuses,  périodiquement ou définitivement endommagés. Des filles ou femmes qui ont aussi des sources de revenus reçoivent elles aussi de plein fouets ces coups de vents de mécontentements si elles pas utilement leurs sacoches.

Ainsi cette fête de Tabaski, au lieu d’être porteuse de joies et d’allégresses, soulève un grand vent d’occupation et surtout de préoccupations sur le visage d’une grande majorité de la population malienne qui, défaut de pouvoir la fuir, devrait s’en réjouir.

 

Nécessaire changement de mentalité

Notre société malienne actuelle est très majoritairement pauvre. Cette société a besoin des apports des leaders d’opinions, des prêcheurs, des communicateurs, des animateurs, des artistes, bref de la Société civile pour la sensibiliser à mieux choisir entre la Tabaski humblement religieuse dans la méditation et celle entièrement  tapageuse dans l’ostentation. Nous pouvons modérer nos comportements sociaux sans demander aux pouvoir législatif et exécutif de légiférer ou de décréter.

Si la Tabaski religieuse augmente notre joie et notre foi, la Tabaski tapageuse tabasse qui que se soit parmi nous directement ou indirection.

Lacine Diawara, Option

 

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