Les donsow, c’est-à-dire les chasseurs, seraient à l’origine de la fondation de l’Empire du Mali. En effet, la tradition raconte que Soundjata est né de l’union d’un chasseur et d’une femme-buffle, Sogolon Koutouma qui serait la fille d’un chef. Légende ou réalité ? En tout cas, dans l’espace bamanan et maninka (malinké) et chez les peuples qui leur sont affiliés comme les Bobo, la fondation d’un village ou d’une ville est toujours le fait d’un chasseur.
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Selon des historiens, les chasseurs mandingues forment, depuis les temps les plus anciens, une immense confrérie très puissante. Très soudée, elle est largement représentée au Mali, en Guinée, en Gambie, au Burkina Faso, au Sénégal, au Niger et en Côte d’Ivoire. Et n’entre pas dans la confrérie qui le veut ! Pour devenir chasseur, il faut être initié. Une initiation qui porte sur l’étude de la faune et de la flore, l’art de la chasse, car on ne tue pas n’importe comment et n’importe quel animal. Elle est complétée par la maîtrise du savoir ésotérique, la face « cachée » de la connaissance, seulement révélée aux initiés.
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Comme dans toute société initiatique, la confrérie a des grades. Le nouvel initié est d’abord apprenti « donso » placé sous les ordres et la protection d’un maître confirmé, avant de prétendre au statut de « donso ». Celui qui détient le savoir et qui a acquis l’expérience accède au grade de grand maître, de « donso Karamoko ». C’est le sage, le grand initié qui peut enseigner l’art et ses secrets.
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Il arrive que des chasseurs abandonnent la chasse pour se consacrer à l’un des arts liés à leur savoir. Ceux qui sont passés maîtres dans le savoir ésotérique deviennent des « soma ». Ceux qui excellent dans la connaissance des plantes se spécialisent comme guérisseurs qui n’ont rien à avoir avec les nombreux charlatans que nous connaissons aujourd’hui. D’autres, enfin, peuvent opter pour la musique comme Yoro Sidibé. Ces chantres chantent alors l’exploit des grands chasseurs-guerriers.
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Généralement, un Donso ne peut pas devenir chef et ne fait pas de politique. Il peut être mis à contribution pour sa bravoure et défendre le pouvoir en place. Il peut être le conseiller d’un chef ou être sollicité dans des médiations. Mais, s’il accède à des fonctions politiques, il doit obligatoirement quitter la confrérie. Ainsi Soundjata aurait cessé d’être chasseur quand il est devenu roi puis empereur du Mali.
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Les donsow sont plus que des professionnels de la chasse. Ces fondateurs de villages, par ailleurs gardiens des traditions, en sont aussi les nourriciers et les protecteurs. Chasser c’est avant tout savoir manier les armes ! De chasseurs à guerriers, le pas est donc souvent vite franchi… Pour preuve, les « sofa » (soldats) de Samory Touré, qui se sont battus contre les Français dans le Wassoulou lors de la pénétration coloniale, étaient majoritairement constitués de chasseurs.
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Et ce sont les chasseurs qui ont le plus souvent défendus les populations civiles en Sierra Leone contre les milices de Foday Sankho et Charles Taylor, et au nord de la Côte d’Ivoire. Dans ce dernier pays, ils ont été utilisés comme gardes du corps de personnalités et comme gardiens. Dans des villages frontaliers au Mali, au Burkina et en Côte d’Ivoire, ils sont le plus souvent impliqués dans la lutte contre la criminalité. Ils ont ainsi à leur actif l’arrestation de redoutables criminels.
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Certes la chasse, surtout la grande chasse, a perdu de son importance. Toutefois, la confrérie des donsow est loin d’être tombée dans le domaine du folklore. Ainsi, depuis 2002, le ministère de la Culture du Mali organise une rencontre régionale des chasseurs pour illustrer ce que le Mali avait encore d’authentique et d’ancien. C’est ainsi que deux rassemblements de donsow ont été organisés dans le pays. Deux événements qui ont beaucoup marqué les esprits. La Rencontre des chasseurs est une initiative du président Alpha Oumar Konaré visant à marquer l’entrée du Mali dans le IIIe Millénaire tout en faisant un clin d’œil au passé à travers cette communauté assez représentative de nos valeurs ancestrales.
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« On dit que l’armée de Soundjata disposait de 60 000 archers. Ce n’était donc pas une légende », s’était émerveillé le ministre de la Culture, Cheick Oumar Sissoko, à l’ouverture de la 1re Rencontre des chasseurs de l’Afrique de l’Ouest ! La force de cette confrérie réside dans sa solidarité et son extrême cohésion. « Nous sommes unis par des liens sacrés », confie Seydou Diakité alias Waraba Tiatio (le lion brave), l’un des grands Karamoko du Mali. Cette grande solidarité est une arme redoutable dans les situations qui mettent en cause les membres de la confrérie. Karamokow aw dansoko, aw ni ko !
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Moussa Bolly
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