Ce que je pense… Aux jeunes filles et garçons : Entre feuilletons et assimilations, il n y a qu’un pas à franchir…

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Le Mali démocratique aura, des années 1991 à nos jours, enregistré beaucoup d’avancées surtout sur le plan du libéralisme à tout vent. Cette notion de liberté de tous quelque soit le sexe, l’âge ou la religion commence à faire des misères parmi ceux qui pensent qu’elle signifie ‘’ chie en lit et libertinage ‘’. Ainsi votre désormais habituelle chronique a décidé de passer au peigne fin un phénomène phénoménal, excusez du pléonasme mais c’est ce qui traduit le plus la charge qui pèse sur nos cœurs meurtris, qui n’est autre que les séries et feuilletons télévisés tant admirés et adulés par le malien de nos jours. Quid, entendez par là qu’en est-il des répercutions de cette nouvelle culture dangereuse du sensationnel qui ne finit pas de nous tourner la tête, à quelques exceptions près bien évidemment, dans le bon ou le mauvais sens.

 

Apres vingt-trois ans de régime autoritaire, les maliens, dans leur majorité, se sont soulevés pour réclamer haut et fort l’instauration de la démocratie plurielle. L’essentiel de ces revendications avait trait à la mise en place d’un libéralisme total qui devait embrasser tous les domaines et secteurs de la vie comme, bien entendu, la politique, l’économie, l’éducation…

L’aboutissement douloureux de ces luttes fut l’avènement du 1er régime et de la 1ère constitution libérale en 1992 qui a considérablement bouleversé nos us et coutumes qui étaient jusque-là très adossés à nos réalités traditionnelles. Le citoyen malien pour ne pas dire l’ex-oppressé, au contact avec les différentes formes de liberté a adopté des comportements qui sont pour le moins inquiétants. A l’occasion des remous autour de cette année placée sous le signe du cinquantenaire, nous pensons qu’avec le recul nécessaire et le sens de l’analyse appropriée, qu’il échoit à chacun de s’interroger sur les tenants et les aboutissants de certaines choses qu’on ne manque pas de vivre en longueur de journée. Ces pratiques ont, de la manière la plus inéluctable, un impact non négligeable sur notre subconscient et nos différents agissements collectifs.

Chose pourtant omniprésente dans notre quotidien de tous les jours, mais paradoxalement ignorée quant a leurs effets pernicieux. Les feuilletons télévisés occupent une trop grande place dans notre vie pour qu’on ne puisse pas jauger leur impact bon ou mauvais pour la santé morale de celles et ceux qui en sont exposés. Il faut rappeler que cette vague de feuilletons télévisés a commencé dans notre pays dans les années 1991 tout premièrement avec les séries nord-américaines comme « Dynastie », « le Coupable » et autres, qui ont fait leurs beaux jours sur le petit écran malien. S’en est suivie la salve de sitcoms sud-américaines du genre « Cercle de Feu », « Rosa », « Femme de Sable »… Vers la fin des années quatre vingt dix qui ont à leur tour conquis le cœur et l’âme de plus d’un. De nos jours, il n’est un secret pour personne que c’est les « Rubi », les « Au Cœur du Péché » ou bien même les « Roman de la Vie » qui font vibrer à leur rythme le cœur des inconditionnels fans incapables de s’en passer.

Si malheureusement il n’y a pas la moindre statistique officieuse ou officielle sur la quantité de ceux qui seraient complètement happés par ce phénomène national, s’il faut le dire sous-régional puisque de Bamako à Ouagadougou en passant par Dakar et Abidjan jusqu’au fin fond des capitales Guinéenne et Togolaise… ces fameux feuilletons télévisés embrasent d’une manière synchronisée les medias audiovisuels de ces différents pays sub-sahariens. A voir de près la situation, on serait sans doute tenter d’affirmer que nos autorités publiques ne mesurent pas l’ampleur et le potentiel danger qui menacent la moralité et l’éthique de la frange de la société obnubilée par ces spectacles plus qu’inquiétants. En effet, les femmes âgées, les adolescentes et les adolescents et même les enfants, ce qui est le plus inadmissible et revoltant, ne jurent que par le nom des feuilletons qu’ils suivent pieusement comme si c’était une recommandation divine. Leur vie est rythmée matin midi et soir par les feuilletons.

Il n’est point rare de voir des femmes au ménage abandonner leur plat du jour sur le feu pour suivre les frasques de leurs actrices préférées. Sans compter ces jeunes filles à la fleur de leur âge, sécher les cours à l’école pour aller se faire matraquer par le petit écran. Le comble de l’absurde se confirme quand on constate que même les tout petits, dont les cerveaux sont encore en formation, s’amassent eux aussi devant la télé. Malheureusement non pour regarder le foot ou les dessins animés, mais pour suivre comme des grandes personnes les feuilletons qui les font désormais tant rêver à l’image de leurs mamans et sœurs aînées.

Si ceux qui doivent les éduquer se permettent de les appeler quand la randonnée cinématographique commence, pourquoi ne profiteront-ils pas même s’ils n’y comprennent pas grand-chose ?

Avec un tel constat, il va de soi qu’on se demande si, à l’image de l’empereur Romain de l’an 50 après JC. Jules César qui, pour faire oublier à ses sujets les affres de la vie qui les tourmentaient à l’époque, les faisaient distraire par ce qu’on a appelé « Panem et Circences » qui veut dire en langue de Molière « pain et jeux ».

 Cela se traduisait par des distributions tapageuses de nourriture à ceux qui étaient affamés, et surtout par l’organisation pompeuse des spectacles macabres comme les «Combats de Gladiateurs ». On se demande si nos dirigeants actuels n’ont pas ourdi de toute pièce cette situation d’obsession populaire afin d’amener la « Plèbe » malienne a non seulement oublier ses problèmes mais aussi, à s’oublier soi-même. De toute façon, il est fâcheux de se rendre compte que tout un peuple voire tout un sous-continent, trouve sa drogue psychologique et son opiome dans l’assimilation et l’acculturation. Non ! Et non ! Ces deux mots ne sont point galvaudés ici, ni abusivement employés. Rien qu’à s’en tenir aux thèmes et aux images qu’y sont véhiculés, on n’a pas besoin d’une loupe pour savoir que ces feuilletons ne sont pas aussi passifs et bénins en terme d’influence, qu’on pourrait le penser (rares sont ceux et surtout celles qui ne s’en inspirent pas dans leur quotidien !). Les thèmes développés par ces feuilletons sont ceux qui tournent essentiellement autour « des jeux d’amour » :

Comment aimer quelqu’un et pouvoir le tromper sans qu’il ne s’en rende compte ? Comment se venger d’une copine qui t’a chipée ton petit ami ?

Comment dire non à son mari, à son papa ou à sa mère ?

Comment s’habiller sexy pour faire succomber tels ou tels mecs ? Enfin bref, les exemples sont légion, mais ils sont malheureusement tous mauvais les uns que les autres. Il va sans dire que ce phénomène d’outrecuidance est une véritable « Bombe à retardement » pour nous les jeunes. On ne s’inspire plus des illustres personnages de notre histoire pour poser nos actes, mais des films qui sont sensés passer un message donné dans une société donnée, différente de la nôtre, pour des populations données qui n’ont pas les mêmes mœurs que nous. Votre journal le « Flambeau » pense que pour la meilleure formation d’une jeunesse malienne consciente et travailleuse pour les prochaines cinquante ans à venir, il va falloir que les autorités publiques et plus particulièrement celles qui sont en charge de la culture puisqu’il s’agit jusque-là d’elle, prennent des décisions politiques et administratives visant à atténuer ce flot d’acculturation médiatique. De telles mesures se traduiraient tout d’abord par le « changement des horaires de diffusion de tout feuilleton à connotation perverse ». Au lieu de 19H et 13H qui trouvent pratiquement tous les enfants en veille, il va falloir les passer à 00H si c’est vraiment aux adultes qu’ils sont destinés.

En plus, chose pourtant obligatoire dans certains pays, mentionner « l’âge d’interdiction » de ces films en bas de l’écran afin de sensibiliser certains parents instruits et soucieux de la bonne éducation de leurs mômes. Tenir les enfants à l’écart de ce, à quoi ils ne sont pas assez mûrs pour affronter. Et pour nos jeunes filles et garçons qui disent « kou tâ dabilâ fô ko ka bôhalâ » c’est-à-dire « nous n’arrêterons jusqu’à ce que mort s’en suit », nous leur disons qu’entre feuilleton et assimilation il n’y a qu’un pas à franchir…Ce qui est dit est dit ! A bon lecteur, salut ! 

                                                   Daouda Kinda

 

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