La fin de la gestion artisanale de l’administration malienne n’est pas pour demain. Pour preuve, les services de renseignement viennent de découvrir la présence sur la liste des retraités de la garde nationale au niveau de la caisse nationale de retraite, des noms d’une dizaine de paysans vivant dans une bourgade de Bafoulabé, mais qui ne s’empêchent jamais d’aller prendre chaque mois leur pension. Pourtant cette situation était là depuis 2011.
On ne le dira jamais assez, les caisses publiques de l’Etat sont pillées à tous les niveaux. On n’a même pas besoin d’être intelligent pour en tirer son compte. C’est ce chemin tortueux que l’agent de garde à la retraite, Fomba, vivant à Kati a choisi pour insérer en bonne et due forme, les noms d’une dizaine de paysans du cercle de Bafoulabé dans la liste des agents de la garde admis à la retraite. Comment ?
En raison du fait que cette affaire n’a pas fini de révéler tous ses secrets et faire tomber toutes les ‘’grosses têtes’’ qui ont décidé de pactiser avec ce diable de Fomba pour piller l’Etat, nous nous réservons de dévoiler certaines informations. Au risque de ne pas réveiller le chat qui dort. Mais, ce qui est intéressant dans cette histoire, c’est la cupidité des services de la caisse nationale de retraite, à fermer les yeux sur cette injustice doublement préjudiciable à l’Etat malien.
En effet, une enquête ouverte par le pôle économique correspondant du tribunal de Kayes a permis de savoir qu’une dizaine de personnes, n’ayant jamais mis le pied à l’école bénéficient de la pension d’Etat, sous le sceau d’agents de la garde nationale à la retraite. Ce dossier ouvert à partir des services de renseignement de la gendarmerie nationale est loin de connaître son épilogue. Car, l’évolution des investigations, interpellations et interrogatoires au niveau de la justice ont permis de savoir que ce réseau maléfique était autant rôdé et disposant d’un mode-opératoire huilé, qu’on ne peut attribuer sa paternité à un simple ancien de la garde nationale, résidant à Kati. Mais puisque le niveau d’évolution du dossier lui fait porter le chapeau, il est bien qu’on s’attarde un peu sur son cas.
Aussi bizarre que cela puisse paraître, celui qui percevait ces pensions de retraite (Fomba) en qualité d’ancien garde républicain n’en était pas un. Car, radié de ce corps il y’a belle lurette, aucune décision, ni arrêté ministériel n’a fait mention de sa mise à la retraite. Quand lui-même a pu illégalement bénéficier de ce droit des années durant, à cause de l’amateurisme des services de la caisse de retraite du Mali, mine de rien, il ne s’est pas fait prier pour dresser sa propre liste de retraités du même corps que lui, afin de mieux piller le trésor malien.
Des complices parmi des officiers et responsables de la caisse de retraite !
Dans cette manœuvre, le nommé Fomba a procédé avec intelligence au recrutement de son bataillon de faussaires. Il s’agit d’une dizaine de paysans résidant à Bafoulabé, qui était tous garanti de percevoir 50 000 FCFA mensuellement en guise de pension. C’est pourquoi, selon le résultat des enquêtes, l’ancien garde, a fait établir au nom de chacun d’eux une carte d’identité civile au commissariat de Kati, tout en leur octroyant comme statut professionnel : agent de garde à la retraite.
Pire, mensuellement, les salaires de ces ‘’curieux’’ retraités de la garde nationale tombaient dans les comptes de la BDM de Kati avant d’être transmis dans un autre compte à Kayes. C’était devenu un rituel. A chaque de fin de mois, au même titre que les pensionnaires réguliers de l’Etat des localités lointaines faisaient le voyage pour rejoindre les grandes agglomérations afin de retirer leur due, ces paysans aussi ne s’empêchaient point de rallier la ville de Kayes pour aller prendre leur pension. Seulement leur point de chute n’était pas la perception de Kayes, mais plutôt l’hôtel des rails, ou certainement un agent de l’administration publique leur faisait parvenir leurs ‘’pensions’’. C’est bien dans ce même local que les éléments de la gendarmerie de la brigade de Kayes ont pris ces protagonistes en train de se partager leurs sous. Ainsi les onze pensionnaires, sont depuis, devenus des nouveaux pensionnaires de la maison d’arrêt de Bamako. Ce qui est regrettable est le fait qu’on n’a pas pu mettre encore, les grappins sur le cerveau du réseau, le nommé Fomba, qui a intégré la garde nationale depuis, sous la deuxième République, avant d’être radié.
En attendant, les limiers du pôle économique sont entrain de cuisiner les responsables de la caisse de retraite dans des marmites bouillonnantes. Une telle passivité d’une administration de trésorerie publique ne saurait rester sans sanctions. Des sanctions, qui planent aussi sur la tête des responsables de la direction de l’intendance militaire au cas où les cadres de la caisse de retraite diront que les noms de cette structure. Dont les dirigeants seront amenés à dire, eux aussi, s’ils ont reçus cette liste de la part de l’état-major de la garde nationale. D’ailleurs, on affirme que là-bas, un colonel ne dort plus que d’un seul œil. Va-t-il décider de parler ? Histoire de désigner ses complices au niveau du ministère de la Défense. En tout cas, à ce niveau la quiétude est de mise. Pour la simple raison que ces paysans ont été déclarés à la retraite à partir de 2011. Or, selon un cadre de ce département, en 2011, par décision du président ATT, toutes les mesures de droit à la retraite ont été prorogées.
Faut-il le signaler, selon certaines sources, cette manœuvre a fait saigner la caisse publique à coup de millions. En plus des pensions, les protagonistes se prévalaient souvent même de leur statut de garde à la retraite pour prendre des crédits avec certaines banques. Mais le paradoxe a été toujours que ces sous faramineux tombaient dans d’autres comptes.
Affaire à suivre.
Moustapha Diawara