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« Les bars-restaurants : C”est ce qui marche le plus à Bamako maintenant », affirme une jeune opératrice économique. Difficile de soutenir le contraire si l’on se donne le temps de faire un tour dans le district. En 2000, on ne dénombrait pas moins 200 espaces de ce nom uniquement dans la capitale. Aujourd’hui, ce chiffre a certainement doublé. Nombre d’honnêtes gens tombent dans le piège de l”appellation. Nous en avons fait l”amère expérience.
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Un soir, nous choisissons de sortir pour découvrir Bamako by night et décompresser un peu. Fatigué par la promenade vespérale, nous nous rendons finalement dans un bar-restaurant à Magnambougou afin de déguster un plat et reprendre des forces pour le reste de la nuit. A notre arrivée, quelques filles presque nues sont attablées dans le jardin désespérément vide. Elles viennent certainement d”arriver et attendent qu”on leur serve. Erreur de jugement !
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Mais, apparemment, notre arrivée n”est pas passée inaperçue. Certaines ont tout de suite trouvé un prétexte pour se déhancher sous nos yeux ; histoire d’attirer notre attention. Quand la barmaid se présente, nous lui demandons le menu. Elle est embarrassée visiblement. Néanmoins, elle nous apporte une carte des alcools et apéritifs. Et lorsque nous lui demandons leur spécialité, elle nous répond que le restaurant est déjà fermé.
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Seul le bar est donc ouvert. Cela nous a paru curieux parce qu”il n’est que 22 h. Il est surprenant qu”un restaurant ferme à cette heure de la nuit, un week-end de surcroît. La curiosité nous pousse à rester et à demander un jus qu’on a mis un temps fou à nous servir parce qu’il fallait certainement l’acheter ailleurs.
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Il nous a suffi de peu de temps pour comprendre en réalité ce qui se passe dans ce bar-restaurant. Il y a un flux important. Mais, aucun arrivant ne s”assoit à une table. Ils empruntent tous un long couloir après avoir murmuré quelques mots à l”oreille d”un jeune homme apparemment habitué à ce genre de confidence. Et au fur et à mesure que les clients entrent, le nombre des filles diminue à la table. Elles s”éclipsent discrètement pour emprunter le même couloir.
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Un discret bordel
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Le bar n”est en fait que la partie visible de l”investissement. Derrière, nous avons découvert au moins une dizaine de chambres et il n”y a aucun doute sur l”usage que le propriétaire en fait : des chambres de passe. Un discret bordel ! Certains y viennent avec leurs maîtresses. D”autres se contentent de puiser dans le parc de prostituées qui y a élu domicile. Mais là où le bât blesse, c’est que la plupart de ces filles de joies sont visiblement des mineures. Une descente de la Brigade des mœurs confirme cette crainte. En effet, elle y retrouve de nombreuses adolescentes.
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Presque tous les bar-restaurants se livrent à ce genre d”activités illicites. « Tu es naïf ! Tout le monde sait qu”on ne trouve dans ces bar-restaurants que l”alcool et le sexe. Ce sont aujourd”hui des hauts lieux de la débauche où jeunes filles et femmes mariées vont se prostituer, où des pères de famille vont se rajeunir avec des gamines de l”âge de leurs filles », nous dit un confrère lorsque nous lui avons rendu compte de notre mésaventure.
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Nous ne sommes pas les seuls pourtant à tomber dans le piège de l”appellation. "En me promenant dans la ville, j”ai tout de suite remarqué qu”il y avait assez de bar-restaurants. Ce qui est une nouveauté pour moi dont la dernière visite au Mali date de 1998. Je me suis dit que ces restaurants marchent à perte ou qu”il y a eu aussi une révolution culturelle dans le pays. Parce que d”habitude, le Malien préfère manger et inviter ses hôtes à la maison que d”aller au restaurant. Ce n”est pas dans leur habitude. Le visiteur averti ne peut donc qu”être surpris par la floraison des bar-restaurants », commente une consœur béninoise lors d”un récent séjour au Mali.
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« Une nuit, par curiosité, j”ai décidé d”inviter des amis participants au même séminaire que moi à venir découvrir les plats asiatiques. Quelle ne fut pas ma surprise de ne trouver rien à manger. Nous avons fait au moins six restaurants sans trouver à manger. C”est à ce moment-là que j”ai compris le vrai usage de ces espaces. J”ai compris pourquoi il y en a tant parce que la débauche est ce qui attire le plus de monde à cette époque de crise de repères morales », ajoute-t-elle dépitée.
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Des mineures au menu
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C”est la même réalité que nous avons réellement découverte au cours d”une enquête dans les différents quartiers de la capitale. Ces bar-restaurants ne sont en fait que des maisons closes déguisées. Ils sont gérés par des proxénètes qui ont jeté leur dévolu sur des gamines pauvres pour appâter la clientèle. Même s”ils font le bonheur de beaucoup de vicieux, ils sont aujourd”hui décriés par des citoyens. Les voisins se plaignent de l”ambiance qui les empêche de dormir. Sans compter le risque de voir leurs enfants emprunter le mauvais chemin que leur ouvre cette activité. Dans les mosquées, les prêcheurs ne ménagent pas leur foi pour dénoncer la prolifération de ces espaces de débauches.
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« On dit que le Mali est un pays musulman. J”en doute fort. Sinon comment peut-on tolérer ces espaces sataniques dans nos voisinages ? Comment les autorités peuvent tolérer une telle prolifération de lieux de déperdition et de vice qui ne fait que pervertir sa jeunesse ?… », s”interroge l”imam de l”Immeuble Lafia (Hamdallaye ACI-2000). Il reconnaît que « ce ne sont pas des étrangers qui fréquentent ces lieux de la débauche. Mais, des fidèles qui sont régulièrement dans les mosquées avec nous. Ce sont des pères de familles au-dessus de tout soupçon d”adultère et d”alcoolisme qui les fréquentent. Et les prostituées qu”ils vont y chercher sont les femmes ou les enfants de leurs coreligionnaires. Allhahou Akbar ». Allah, le Tout Puissant, reconnaîtra les siens le moment venu.
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Poursuivre la purge
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La majorité des citoyens souhaitent aujourd”hui que les autorités fassent le ménage à ce niveau. « Nous apprécions beaucoup les rafles de la Brigade des mœurs. Malheureusement, elles ne sont pas régulières. Nous souhaitons que ces actions se poursuivent et que ceux qui sont en infraction soient jugés pour l”exemple. Sinon, notre société va pourrir et il n”y aura plus d”âge pour se prostituer », souligne Yaya Maïga, un jeune informaticien de Boulkassoumbougou.
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Un avis partagé par ses camarades de « grin » et d”autres interlocuteurs rencontrés à travers le district de Bamako. Pour cet électricien, « si, après la défaite du Mali face au Togo (le 27 mars 2005, Ndlr) les vandales s’étaient uniquement contentés de saccager les bars et restaurants de la ville, je pense qu”on aurait volontiers organisé des prières dans les mosquées et les églises pour les bénir ».
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Cela en dit long sur le ras-le-bol d”une frange de plus en plus importante de la population sur la prolifération de ces espaces de débauche. Les autorités doivent prendre leur responsabilité pour prévenir le pire.
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Moussa Bolly
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