Yirimadio (1) : Gorge Tranchée

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Le professeur, paralysé sur son lit par une fracture, a été assassiné dans des circonstances étranges.

Nos lecteurs se rappellent certainement du meurtre de Sara Diané en avril 2005. L”affaire à l”époque avait défrayé la chronique des faits divers. Aujourd”hui encore certaines personnes persistent à croire qu”il existe toujours des zones d”ombre qui n”ont jamais été éclaircies par les enquêteurs. Ce, malgré l”insistance et la persévérance de certains membres de la famille de Sara qui estiment que les investigations ont été bâclées.

Sara Diané a été abattu sur sa moto alors qu”il se rendait de Toukoto à son village de Massala, non loin de Séféto dans le cercle de Diéma. Les usagers du tronçon qui l”ont découvert ont cru à un banal accident de circulation. Ce n”était qu”au moment du bain mortuaire que le père de Sara découvrit la triste vérité. Son fils, commerçant très prospère dans son village et jouissant d”une grande notoriété dans la contrée, avait été la cible d”un tireur embusqué.

L”assassin l”avait tué et s”était enfui en laissant derrière lui un bidon d”eau, de nombreux crachats de tabac à chiquer, signes de toute une journée d”attente. Pour masquer son crime, l”assassin était revenu sur ses pas après que le corps eut été enlevé. Il avait égorgé un âne sur le lieu du crime. Selon une croyance du milieu, ce rituel servirait à enterrer pour l”éternité un crime qu”on ne veut pas voir élucidé.

Comme cette triste histoire, celle que nous vous proposons aujourd”hui présente aussi de nombreuses zones d”ombre que la police cherche présentement à éclairer. Les faits se sont passés à Yirimadio dans la journée du 16 mai dernier. Dans ce quartier périphérique de la capitale, vit un homme, un professeur d”enseignement secondaire général officiant au lycée Askia Mohamed. Amadou Koïta avait été victime d”un accident de la circulation, il y a quelques semaines. Il a eu une fracture à la cuisse. Après avoir passé quelques jours à l”hôpital, il préféra regagner son domicile pour se faire soigner par un tradithérapeute. Depuis son retour chez les siens, le professeur s”était installé dans son salon. Un de ses fils qui alterne études universitaires et coraniques était chargé de le veiller. L”étudiant dormait chaque soir auprès de son père. Les autres membres de la famille passaient la nuit dans la cour ou à l”étage de la maison familiale.

UNE ENTAILLE DE 15 CM :

Le mercredi 16 mai dernier, alors que le commissaire principal Jean Pierre Porna Dembélé s”apprêtait à rentrer chez lui aux environs de 19 heures, trois personnes se présentèrent à lui. Elles lui demandèrent de leur accorder quelques minutes. Le policier accepta sans se faire prier d”écouter le trio dans son bureau. L”un des visiteurs lui expliqua qu”un membre de sa famille avait été trouvé mort dans la matinée à la maison. Le narrateur révéla que vers 16 heures, lui-même et ses deux compagnons s”étaient rendus à la morgue de l”hôpital Gabriel Touré pour le bain mortuaire. Mais ils constatèrent que Amadou Koïta avait la gorge ouverte et portait plusieurs traces de couteau au thorax. Le commissaire se fit accompagner du médecin légiste du centre de santé de référence de la Commune VI et alla vérifier les allégations des trois inconnus.

A l”hôpital, le commissaire, un inspecteur de police et le médecin pénétrèrent dans la morgue. Ils découvrirent que le professeur avait effectivement la gorge tranchée sur 15 cm et portait des entailles de couteau sur tout le thorax.
L”enterrement fut reporté pour permettre aux policiers de mener une enquête approfondie. Tout naturellement on se tourna vers la famille du défunt. La première personne interpellée fut le fils qui dormait à côté de son père. L”étudiant déclara au commissariat de police du 13e arrondissement qu”il avait dormi effectivement ce soir auprès de son père. Aux enivrons de 3 heures du matin, Amadou Koïta avait toussoté. Le fiston s”était réveillé pour lui demander ce qui n”allait pas. le défunt aurait répondu que tout allait bien. Puis l”étudiant s”était recouché pour ne se réveiller qu”entre 5 et 6 heures. Après avoir fait sa toilette, il s”était rendu chez le marabout pour réciter les versets du Coran appris la veille.

Alors qu”il était chez son maître, sa petite sœur vint lui annoncer en courant que leur père se trouvait dans un état bizarre. L”étudiant accourut à la maison. Il s”approcha du malade et l”appela. Comme le professeur ne répondait pas, son fils lui prit la main qui était déjà flasque. Ayant compris que son père était très mal en point, il fit venir un certain Ouologuem, infirmier à la retraite, voisin de la famille. L”infirmier arriva, posa le stéthoscope sur la poitrine de Amadou et constata que le professeur était mort. Les enfants et les autres membres de la familles transportèrent alors le corps à la morgue.

LA PIÈCE A CONVICTION :

 Les enquêteurs firent alors venir l”infirmier pour savoir dans quel état il avait trouvé le mort. Ouologuem répondit qu”il ne savait rien de l”homme qu”il avait fait envoyer à la morgue. A la question de savoir s”il s”était aperçu que l”homme avait la gorge tranchée, l”infirmier déclara ne pas avoir examiné le cou de Koïta. Il ne savait rien non plus des traces de couteau retrouvés sur la poitrine. Le commissaire le plaça en garde en vue, le temps de voir clair dans l”affaire.

Dans la famille de Amadou Koïta, personne, y compris sa femme (elle aussi malade), n”a constaté la blessure sur le cou du défunt. Même ceux qui ont mis le corps dans une Sotrama pour la morgue assurent n”avoir pas remarqué la blessure à la gorge. Les policiers s”intéressèrent alors à la literie du malade. Elle avait dans un premier moment disparu. Mais le très persévérant, inspecteur Tangara, qui menait l”enquête, découvrit sur le toit de la maison le drap sur lequel avait été commis l”assassinat. Qui a jeté la pièce à conviction à cet endroit ? Les hommes du commissaire Dembélé réfléchissent à cette énigme digne d”un roman de Agatha Christie.

Les policiers explorent une autre piste. Ils ont appris des voisins de la famille que le défunt Koïta s”apprêtait à prendre une seconde femme. La nouvelle serait parvenue à son épouse à laquelle, évidemment, elle ne pouvait pas faire plaisir.
Plusieurs proches de l”enseignant sont venus dire à la police leur conviction que l”assassin de Koïta devait être recherché parmi les membres de sa famille.

Le commissaire Jean Pierre Dembélé et ses hommes sont en train d”effectuer un travail de fourmi pour démêler l”écheveau d”une affaire pour le moins étrange. Avec un peu de chance comme le dit l”inspecteur Colombo, ils pourront reconstituer les pièces du puzzle.

G. A. DICKO


Yirimadio (2) : UN JEUNE CORPS SANS VIE

Le commissariat de police du 13e arrondissement a découvert, lundi dernier, le corps d”un garçon, âgé d”environ 10 ans dans un champs à Yirimadio.

L”adolescent, très mal vêtu, avait toutes les apparences d”un mendiant. Il avait ainsi une sébile près de lui. Plusieurs marques d”épines étaient visibles sur la plante de ses pieds. Le corps du garçon a été placé à la morgue de l”hôpital Gabriel Touré en attendant que les enquêtes fassent la lumière sur les circonstances de sa mort.

Si l”adolescent se révèle être un talibé, la découverte de son corps va ranimer les reproches faits aux parents qui confient leurs enfants à des maîtres coraniques qui ne possèdent même pas les moyens de leur propre subsistance.

G. A. D.

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