Poignardé dans son lit (suite) : La piste du téléphone

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Trois personnes ont été interpellées, des indices réunis mais l”enquête reste encore au stade des présomptions.
Dans notre parution du 13 septembre dernier, nous nous interrogions sur l”identité de l”auteur de l”assassinat, dans son lit, de Moussa Fofana, habitant au Banconi. La question reste encore d”actualité et n”a pas reçu de réponse même si une lueur d”espoir vient éclairer la piste suivie par les enquêteurs du commissariat de police du 6e arrondissement de Korofina Nord.

Pour rappel, Moussa Fofana, la quarantaine alerte, avait effectué deux séjours en France, avant de se résoudre à regagner le pays, voilà quelques années, pour s”occuper de sa famille. Depuis, il cultivait les 10 ha de terres céréalières appartenant à sa grande famille installée à Senou.

DES GÉMISSEMENTS :

Dans la nuit du 7 au 8 septembre, aux environs de 4 heures du matin, sa femme en état de grossesse très avancée, a été réveillée par les gémissements de douleur de son mari. Quelques minutes plus tard, il rendra l”âme adossé au mur de sa véranda. L”homme avait reçu quatre coups de couteau au thorax, un sous l”aisselle et un autre au bas-ventre.

Depuis cette nuit maudite qui a traumatisé sa famille, et particulièrement son père âgé de 75 ans, tout le monde se pose la même question : "qui a fait ça et pourquoi ?". C”est l”inspecteur Ibrahim Maïga, chef de la brigade de recherche et de renseignement qui a la difficile mission d”élucider le mystère. Il tente d”éclaircir une affaire qui continue à défrayer la chronique à Banconi Filabougou. Mais pour le moment le limier ne détient aucune piste sérieuse pour la suite de l”enquête.

Les renseignements pris dans la famille du défunt font état de l”implication d”un officier supérieur de l”armée. Il serait redevable à Moussa Fofana de 1,5 million de Fcfa. Cette piste n”a pas été ignorée par Ibrahim Maïga et ses hommes. Au contraire, le policier assure "n”écarter aucune hypothèse".

L”enquête a, jusqu”ici, permis d”arrêter trois hommes. Une semaine après l”assassinat de Moussa Fofana, l”inspecteur Papa Mamby Keita du commissariat de police du 3e arrondissement a mis la main sur un certain Moussa Samaké. L”épervier du Mandé a appris de ses informateurs, que Moussa Samaké était en possession du téléphone du défunt. Après plusieurs jours de recherche, il finit par l”interpeller au Banconi. Curieusement, Moussa Samaké figurait parmi ceux qui avaient aidé les policiers, la nuit de l”assassinat, à déplacer le corps de la victime. Il faisait également partie du groupe qui avait recherché activement soit l”arme du crime, soit un indice.

Après l”arrestation de Samaké par le 3e arrondissement, le contrôleur général Sissoko en charge de ce commissariat en informa son homologue du 6e, Baka Sissoko. Les deux hauts gradés convinrent du transfert de Moussa Samaké au 6e arrondissement. Il a été mis à la disposition de l”inspecteur en charge du dossier. Ibrahim Maïga cuisina pendant deux jours le suspect sans obtenir grand chose de lui. Mais au troisième jour de sa détention, Moussa Samaké avoua détenir le téléphone du défunt. Il n”avait, évidemment, pas l”appareil sur lui. Il l”aurait confié à un de ses amis, un certain Karim Diarra. Les policiers ne tardèrent pas à coincer ce dernier quelque part en ville. Conduit au commissariat le 12 septembre, Karim annoncera, à son tour, avoir refilé le téléphone à Youssouf Koné. Quand les policiers appréhendèrent Youssouf, il détenait effectivement l”appareil. Mais le portable ne contenait plus la carte SIM, la boîte noire en quelque sorte de l”appareil, qui aurait pu aider les limiers à voir un peu clair dans cette affaire.

T-SHIRT ET "JEANS BLESSÉ" :

Comment l”appareil est-il parvenu aux mains de Moussa Samaké ? La version qu”il donne ne convainc personne. Il explique que la nouvelle de la mort brutale de Moussa Fofana a suscité un grand désordre dans sa famille. Il rôdait, par hasard, dans les parages. En effet sa famille et celle des Fofana sont séparées par une rue. Il se précipita chez ses voisins en détresse et découvrit l”appareil jeté près d”un arbre. Il reconnut immédiatement le téléphone du défunt et s”en empara.

Une aubaine pour Moussa car sa femme venait d”accoucher et qu”il n”avait pas les moyens de faire face aux obligations du baptême. Le téléphone "ramassé" avait une certaine valeur. Le délinquant avait la certitude qu”en le vendant il pourrait couvrir les dépenses du baptême. Il ne s”encombra pas de la carte SIM. Il l”enleva et la jeta dans la cour.
Une fois le calme revenu, il informa son grand frère qu”il détenait le téléphone de Moussa Fofana. Ce dernier lui aurait conseillé de le remettre aux enquêteurs qui pourraient s”en servir à bon escient. Moussa refusa pour les raisons évoquées plus haut. Il fit part à sa femme de sa trouvaille. Elle lui prodigua les mêmes conseils que son grand frère. Mais Moussa s”entêta à poursuivre son dessein délictueux. Il garda donc l”appareil qu”il fit passer de main et en main pour brouiller les pistes.

Les enquêteurs ont appris que la nuit de l”assassinat, Moussa Samaké avait été aperçu dans les parages, peu de temps avant le crime, par un douanier qui revenait de son service. Le suspect doté d”un gabarit de gladiateur portait un T-shirt rouge et un pantalon "jeans blessé". Le douanier avait braqué ses phares sur lui pendant qu”il détalait à grandes enjambées. Craignant de se faire agresser, le gabelou préféra ne pas le poursuivre. Moussa Samaké a été arrêté dans les mêmes vêtements décrits par le douanier. Il portait encore hier, au passage de notre équipe au commissariat, le même T-shirt et le même pantalon.

Karim Diarra, Moussa Samaké et Youssouf Koné sont à la disposition du procureur de la République, près le tribunal de première instance de la Commune I. Ils refusent pour le moment d”avouer le crime qui leur est reproché. En attendant, la famille de Moussa Fofana maintient son accusation : l”assassin ne peut être que l”officier incriminé.

G. A. DICKO

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